par Michelle Martin

BERLIN, 31 janvier (Reuters) - Les dirigeants conservateurs allemands ont tenté durant le week-end de rassurer leurs compatriotes inquiets des conséquences de l'afflux de migrants en Allemagne.

Selon un sondage de l'institut Emnid pour le Bild am Sonntag, le soutien à l'Union chrétienne démocrate (CDU) de la chancelière Angela Merkel et à ses alliés de l'Union chrétienne sociale (CSU) bavaroise a baissé de deux points, à 34%, par rapport à la précédente enquête, et n'avait pas été aussi bas depuis juillet 2012.

Le parti souverainiste et anti-immigration Alternative für Deutschland (AfD) gagne deux points pour atteindre 12% d'intentions de vote, un record pour un sondage Emnid.

Samedi, la chancelière fédérale a estimé que les réfugiés syriens et irakiens devraient rentrer dans leurs pays une fois que les conflits qui les déchirent seront terminés.

Angela Merkel a jusqu'à présent résisté aux pressions venant de son propre camp pour fixer un plafond au nombre de réfugiés que l'Allemagne, qui en a reçu 1,1 million en 2015, peut accueillir chaque année.

Les incidents de la nuit du Nouvel An à Cologne ont accru les tensions au sein de la coalition gouvernementale, la CSU ayant notamment menacé de saisir la justice.

Le gouvernement a réagi jeudi en annonçant un durcissement des conditions d'octroi du droit d'asile en Allemagne et une accélération des procédures d'expulsion.

Dans une interview au Bild am Sonntag, le coordinateur pour la question des réfugiés, Peter Altmaier, déclare que Berlin veut pouvoir expulser les réfugiés condamnés pour des crimes commis en Allemagne vers le dernier pays hors UE par lequel ils ont transité, s'ils ne peuvent être renvoyés dans leurs pays d'origine en raison des conflits.

Il explique que le gouvernement allemand négocie avec la Turquie, la Jordanie et le Liban afin que les réfugiés syriens et irakiens fuyant la guerre puissent rester dans ces pays jusqu'au retour de la paix.

MIGRANTS ÉCONOMIQUES

Pour Simone Peter, dirigeante des Verts (opposition), le gouvernement, Merkel et Altmaier "s'éloignent petit à petit d'une culture d'accueil".

Pour sa part, le ministre de l'Intérieur Thomas de Maizière a estimé que l'Allemagne ne pouvait accepter de migrants économiques.

"Il est impossible que l'Allemagne prenne en charge tous les réfugiés des régions du monde en crise. Et cela s'applique particulièrement aux gens qui ne viennent pas de Syrie et qui arrivent ici pour avoir simplement une vie meilleure", a-t-il dit au magazine Der Spiegel.

Reiner Haseloff, ministre-président (Premier ministre) CDU du Land de Saxe-Anhalt, a déclaré au Welt am Sonntag que l'Allemagne ne pouvait plus tolérer "la perte de contrôle" de ses frontières et a demandé une "stricte réduction" du nombre des arrivées.

La dirigeante d'AfD, Frauke Petry, a préconisé que les garde-frontières soient autorisés à ouvrir le feu sur les migrants qui tenteraient de pénétrer clandestinement en Allemagne.

L'Allemagne, a-t-elle dit au journal Mannheimer Morgen, doit réduire l'afflux de migrants grâce à des accords avec l'Autriche voisine et au renforcement des frontières extérieures de l'Union européenne.

Aucun agent de police ne souhaite tirer sur un migrant, a-t-elle déclaré. "Je ne le veux pas non plus, mais, au bout du compte, la dissuasion inclut le recours à la force armée", a-t-elle déclaré.

"Le dernier homme politique allemand qui autorisait à tirer sur des réfugiés était Erich Honecker", a réagi un responsable du SPD (Parti social-démocrate), Thomas Oppermann, en faisant allusion à l'ancien numéro un communiste de la RDA. (Eric Faye, Tangi Salaün et Guy Kerivel pour le service français)