MADRID, 2 février (Reuters) - Le gouvernement espagnol ne peut empêcher un référendum sur l'indépendance de la Catalogne, qui n'aura aucun caractère contraignant mais pourra servir de base à des négociations sur les relations futures entre Madrid et la riche région du nord-est de l'Espagne, estime Artur Mas.

Pour le président de la Communauté autonome de Catalogne, le référendum projeté ne vise ni à proclamer l'indépendance de la région ni à rompre avec l'Etat espagnol mais simplement "à connaître l'opinion de la population".

"Une riposte anti-démocratique de la part des autorités espagnoles serait particulièrement malvenue aux yeux de la communauté internationale", dit-il dans une interview publiée dimanche par La Vanguardia, le principal journal catalan.

Le président du gouvernement espagnol, le conservateur Mariano Rajoy, s'est engagé à aller devant le Tribunal constitutionnel pour empêcher le référendum sur l'indépendance de la Catalogne mais Artur Mas propose une autre solution.

"C'est ce que j'appellerais une solution que le gouvernement central peut très bien admettre: on nous laisse organiser la consultation, le gouvernement espagnol n'est pas impliqué et ensuite nous allons à Madrid pour négocier", explique-t-il.

Mariano Rajoy a répété dimanche que "l'unité de tous les Espagnols fait la grandeur de l'Espagne, et c'est ce que veut la majorité d'entre eux". "Ceux qui ne sont pas d'accord doivent respecter le souhait de la majorité et respecter la loi", a-t-il souligné.

Artur Mas, rallié à l'idée de l'indépendance catalane il y a seulement quatre ans, a mis au point un plan de bataille en trois étapes.

PLAN EN TROIS ÉTAPES

La première, initiée en janvier, consiste à demander au Parlement espagnol d'autoriser la Catalogne à organiser le référendum. Les Cortes espagnoles, dominées par les conservateurs du Parti populaire (PP), devraient logiquement rejeter cette demande.

La deuxième phase consistera à organiser une consultation sans l'aval du Parlement de Madrid - consultation tout à fait légale aux termes du statut d'autonomie de la Catalogne, fait remarquer Artur Mas.

Le gouvernement de Barcelone a déjà fixé au 9 novembre prochain la date de ce référendum, deux mois après un scrutin similaire en Ecosse.

La question sera: "Voulez-vous que la Catalogne devienne un Etat ? Si oui, voulez-vous que cet Etat soit indépendant ?".

La troisième phase, en cas de blocage venu de Madrid, sera de saisir l'occasion des élections régionales, prévues normalement en 2016, pour transformer ce scrutin en quasi-vote d'autodétermination.

La situation est toutefois loin d'être simple pour le président de la "Generalitat", dont l'alliance Convergence et Union (CiU, conservateur) est concurrencée par la Gauche républicaine catalane (ERC), formation aux revendications beaucoup plus tranchées sur la question de l'indépendance.

Convoquer une élection anticipée pourrait se révéler un pari risqué au moment où les partisans les plus intransigeants ont vu leur audience s'ancrer dans l'opinion publique avec la crise économique de ces dernières années.

En 2012 et 2013, des millions de Catalans sont descendus dans les rues à l'occasion de la fête nationale, le 11 septembre, pour demander le droit de voter sur une séparation. (Fiona Ortiz, Guy Kerivel pour le service français)