* Mise en garde de l'Eglise sur les migrants et la bioéthique

* La voix de l'Eglise est écoutée, ne peut être injonctive-Macron

* La laïcité n'a "pas pour fonction de nier le spirituel"

PARIS, 9 avril (Reuters) - Emmanuel Macron a défendu lundi, devant la Conférence des évêques de France (CEDF), "l'humanisme réaliste" de sa politique migratoire et démenti tout "agenda caché" en matière de bioéthique, s'efforçant de rassurer une Eglise catholique qu'il a appelée à s'engager davantage.

Le chef de l'Etat, qui a rencontré depuis son arrivée au pouvoir il y a près d'un an les responsables des principaux cultes représentés en France, était l'invité de cette première rencontre de ce type organisée au collège des Bernardins à Paris par la CEDF.

Cette dernière est sortie de sa réserve à plusieurs reprises ces derniers mois pour dénoncer la politique migratoire du gouvernement - jugée "inhumaine" par ses détracteurs - et mettre en garde contre toute nouvelle législation en matière de bioéthique, notamment sur les questions de la GPA et de la PMA.

"Sur les migrants, on nous reproche de ne pas accueillir avec assez de générosité ni de douceur, de refouler les mineurs isolés, on nous accuse même de laisser prospérer des violences policières", a déclaré Emmanuel Macron devant quelque 400 invités.

"Mais, à dire vrai (...), nous tentons dans l’urgence de mettre un terme à des situations dont nous avons hérité – je pense ici aux délais de traitement administratifs mais aussi aux conditions d’octroi des titres de réfugiés", a-t-il ajouté. "C’est la conciliation du droit et de l’humanité que nous tentons (...) C’est le cap de cet humanisme réaliste que j’ai fixé", a-t-il poursuivi, insistant sur l'importance de tenir ces principes "parfois contradictoires".

A un mois de la fin des Etats généraux de la bioéthique, le chef de l'Etat a également démenti "tout agenda caché" et réaffirmé ses positions - hostilité à la législation de la GPA qui pose selon lui "une question sur la dignité du corps de la femme" et un avis "insuffisant" du Comité consultatif national d'éthique (CCNE) sur la PMA.

Ecoutée, la "voix de l'Eglise ne peut être injonctive", a-t-il estimé. "Notre société aura à s'exprimer de manière pleine et entière. Nous ne sommes pas là face à un problème simple qui pourrait se trancher par une loi seule, mais face à des débats moraux, éthiques, profonds qui touchent au plus intime de chacun d’entre nous."

"REPARER LE LIEN"

Le quinquennat de François Hollande avait été marqué sur le plan sociétal par l’adoption de la loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe - qui avait provoqué de nombreuses manifestations - et par l’adoption à l’unanimité d’une loi sur la fin de vie instaurant un droit à la "sédation profonde et continue".

"Nous partageons confusément le sentiment que le lien entre l’Eglise et l’Etat s’est abîmé, et qu’il nous importe à vous comme à moi de le réparer", a dit Emmanuel Macron, demandant aux Catholiques de ne pas se "sentir aux marches de la République, mais de retrouver le goût et le sel du rôle qu' y toujours joué".

"Dans ce moment de grande fragilité sociale, quand l’étoffe même de la nation risque de se déchirer, je considère de ma responsabilité de ne pas laisser s’éroder la confiance des catholiques à l’égard de la politique - et des politiques", a-t-il souligné. "La France a été fortifiée par l’engagement des catholiques, certains pourront considérer que de tels propos sont en infraction avec la laïcité (...) mais reconnaître les uns n’est pas diminuer les autres".

"Je considère que la laïcité n’a certainement pas pour fonction de nier le spirituel au nom du temporel, ni de déraciner de nos sociétés la part sacrée qui nourrit tant de nos concitoyens", a-t-il souligné. (Marine Pennetier, édité par Jean-Philippe Lefief)