La baisse de 2,5% du yen vis-à-vis du dollar en l'espace d'une semaine est bienvenue compte tenu des grosses difficultés rencontrées par les exportateurs japonais sur le marché mondial.

Mais un examen attentif des propositions du chef du Parti libéral-démocrate (PLD) pour une politique nettement plus offensive de stimulation de l'économie montre que certaines de ses idées ne sont pas réalisables à court terme et que d'autres pourraient se révéler contre-productives.

Finalement, peu d'entre elles sont susceptibles d'être adoptées rapidement après les élections législatives du 16 décembre, bien que, selon les sondages d'opinion, Shinzo Abe semble bien parti pour récupérer son poste de Premier ministre qu'il a quitté en 2007, après une seule année à la tête du gouvernement.

Ses propositions incluent une politique d'assouplissement monétaire "illimitée" jusqu'à ce l'inflation atteigne 2 à 3%, des taux d'intérêt à court terme négatifs et des rachats ciblés par la Banque du Japon (BoJ) d'obligations émises pour financer des travaux publics.

REPOUSSER LES IDÉES LES PLUS CONTESTABLES

Anticipant la résistance des banquiers centraux à son projet, Shinzo Abe a même évoqué la possibilité de modifier la loi garantissant l'indépendance de la BoJ afin que le gouvernement puisse lui imposer son point de vue.

Face à cette menace, la banque centrale étudie discrètement les options dont elle dispose au-delà de son programme actuel d'achat d'actifs.

Malgré tout, un nouvel assouplissement de sa politique prendrait probablement la forme d'une augmentation des achats d'actifs ou celle d'un relèvement de son objectif d'inflation, actuellement fixé à 1%.

La fixation de taux négatifs, qui reviendrait à faire payer les banques commerciales qui placent leurs réserves auprès de la banque centrale, afin de les encourager à prêter davantage à l'économie, est largement considérée au sein de la Banque du Japon comme étant une mauvaise stratégie.

Le gouverneur de la BoJ, Mazaaki Shirakawa - qui a maintenu les taux de dépôts à 0,1% - a fait valoir qu'un taux nul découragerait les banques de se prêter entre elles, les rendant trop dépendantes du financement par la banque centrale, et qu'un taux négatif aggraverait encore cette dépendance.

PROGRAMMES DE TRAVAUX PUBLICS

A moins d'une reprise de la demande de crédit des entreprises et des particuliers, des taux négatifs pourraient également compromettre les efforts entrepris par la BoJ pour soutenir l'économie en injectant des liquidités, via des achats d'actifs.

Les banques, de leur côté, pourraient être réticentes à vendre des obligations à la BoJ de crainte de se retrouver avec des liquidités sur les bras qu'elles ne pourraient pas prêter.

"Je ne vois aucune chance pour que cela soit retenu", conclut Izuru Kato, économiste chez Totan Research à Tokyo.

Shinzo Abe a également émis l'idée que le gouvernement lance des programmes de travaux publics pour stimuler l'économie et que la BoJ achète des obligations pour financer ces travaux.

Mais les marchés interprètent cette proposition comme un appel à la banque centrale à garantir directement la dette publique, ce que Shinzo Abe a démenti, précisant qu'il voulait simplement que la BoJ achète sur le marché des obligations strictement réservées aux dépenses d'infrastructures.

Quoiqu'il en soit, demander à la BoJ d'aider au financement des dépenses publiques ressemblerait dangereusement à un financement effectif de l'Etat - ce qui est légalement interdit à la Banque du Japon.

Ceci réduit les options de la BoJ. L'une d'elles serait d'acheter davantage d'obligations sur le marché pour faire baisser les coûts d'emprunt, ce qui permettrait de contenir la hausse du yen afin de favoriser les exportations.

La BoJ s'est engagée à acheter un total de 39.000 milliards de yens (367 milliards d'euros) d'obligations d'Etat d'ici fin 2013 dans le cadre de son programme de rachat d'actifs. Elle a aussi prévu d'acheter pour 21.600 milliards de yens d'obligations souveraines à long terme dans ses opérations de marché.

Juliette Rouillon pour le service français, édité par Véronique Tison et Marc Angrand

par Leika Kihara