* L'Allemagne se pose en modèle pour l'Europe

* La France ne parviendra pas à ses objectifs en 2013

* Hollande réclame de la "souplesse"

* Le cas de Chypre évoqué (Actualisé avec déclaration de Hollande)

par Julien Ponthus

BRUXELLES, 14 mars (Reuters) - Le rythme du redressement budgétaire s'est imposé jeudi comme l'un des principaux débats du Conseil européen de Bruxelles, où les dirigeants des Vingt-Sept doivent adopter une stratégie pour ranimer la croissance et contrer l'explosion du chômage.

Jugés partiellement responsables de l'atonie de l'activité par des économistes, les efforts consentis pour réduire les déficits inquiètent aussi les politiques, qui craignent de voir le populisme gagner du terrain, comme en Italie avec le succès du Mouvement 5 Etoiles de l'humoriste italien Beppe Grillo.

Les dirigeants européens ont été accueillis par une manifestation organisée par les syndicats européens dénonçant une politique qui entraînerait l'UE dans une spirale négative.

"Non à l'austérité, oui à l'emploi des jeunes", pouvait-on lire sur une banderole brandie à un jet de pierre du quartier européen de Bruxelles bouclé par les forces de l'ordre.

La poursuite à marche forcée l'assainissement budgétaire constitue une véritable fracture politique dans l'Union.

François Hollande a pris la tête d'une coalition de pays qui réclame plus de temps pour assainir les comptes, reconnaissant que son objectif de ramener le déficit à 3% du PIB en 2013 ne pourrait être atteint et qu'il lui faudrait un an de plus.

"La souplesse est nécessaire si on veut faire en sorte que la croissance puisse être la priorité", a déclaré François Hollande à son arrivée au Conseil. "S'il y avait trop de rigidité, il y aurait à ce moment-là trop de chômage."

A l'inverse, Angela Merkel maintient que l'assainissement des comptes publics n'est pas incompatible avec la création d'emplois : le taux de chômage en Allemagne est moitié moindre que ce qu'il est en France, les comptes y sont pratiquement à l'équilibre et l'économie donne de sérieux signes de reprise.

L'ALLEMAGNE, "MODÈLE" DE L'EUROPE

Le gouvernement allemand s'est d'ailleurs vanté mercredi d'être "envié par le monde entier" pour la bonne santé de ses finances publiques, prévues en excédent dès 2015.

"Grâce à cette approche, l'Allemagne est à l'avant-garde en Europe", a dit son ministre de l'Economie, Philipp Rösler, parlant de "politique de consolidation orientée vers la croissance" pour expliquer qu'il n'y avait pas de contradiction.

Le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn a abondé dans le même sens à son arrivée au Conseil européen.

"C'est en fait une des pré-conditions d'une croissance durable que les pays aient des finances publiques durables", a-t-il estimé, imité par le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, qui ne voit pas d'alternative "à la mise en oeuvre à la fois des nécessaires programmes d'austérité".

Berlin ne voit aucune raison de renier une politique de rigueur salariale et de flexibilité engagée il y a une décennie qui est à l'origine de ses succès économiques et que l'Europe du Sud devrait imiter pour parvenir au même résultat.

L'Irlande est ainsi montrée en exemple pour avoir réussi son retour sur les marchés financiers après une longue période de plongée dans la récession et mesuré un recul du chômage, qui a baissé à 14,2% au quatrième trimestre 2012.

Mais pour certains économistes, les réductions rapides des dépenses publiques cumulées à de fortes hausses d'impôts ont aggravé la récession qui frappe la Grèce, l'Italie ou l'Espagne.

Ils estiment aussi que c'est la promesse de la Banque centrale européenne de "tout faire" pour sauver l'euro qui a calmé les attaques contre les dettes souveraines, bien plus que la politique de rigueur engagée par ces pays.

A défaut de trancher la question, le Conseil européen devrait demander aux Etats membres de continuer l'assainissement budgétaire en privilégiant les réduction de dépenses aux impôts, d'assouplir le marché du travail et de poursuivre la libéralisation de secteurs protégés de l'économie.

Les dirigeants des pays membres de la zone euro, qui se réuniront entre eux ce jeudi soir, auront un cas pratique à trancher avec un possible plan de sauvetage pour Chypre.

Ce renflouement pourrait atteindre 17 milliards d'euros, le montant du produit intérieur brut (PIB) de l'île, mais des responsables de la zone euro réclament une ardoise moins lourde, de l'ordre de 10 à 13 milliards d'euros, en demandant à Nicosie de lever de nouveaux impôts. (Edité par Yves Clarisse)