Paris (awp/afp) - Le bilan de la pandémie de coronavirus a dépassé vendredi la barre des 10'000 morts dans le monde, dont plus 5000 en Europe, malgré les décisions de confinement qui se multiplient partout mais qui ne pourront pas s'appliquer dans des endroits très vulnérables comme dans les immenses bidonvilles asiatiques.

En outre, trois milliards de personnes n'ont même pas les armes les plus basiques contre le virus, l'eau courante et le savon, s'alarment des experts des Nations unies, qui craignent la perte de "millions" de vies.

La pandémie a fait au moins 10'316 morts depuis son apparition en décembre, selon un bilan établi par l'AFP à partir de sources officielles vendredi à 11h00 GMT. L'Europe, et en premier lieu l'Italie, totalisait à elle seule 5168 décès, loin devant l'Asie (3431 décès).

Les restrictions à la liberté de circulation concernent désormais sur la planète plus d'un demi-milliard de personnes, appelées par leurs autorités à rester confinées chez elles.

En Californie, les 40 millions d'habitants doivent rester chez eux jusqu'à nouvel ordre, sauf nécessité absolue. Même chose pour les 44 millions d'Argentins.

En Malaisie, l'armée va être déployée pour aider la police à faire respecter le confinement de la population.

Et les élèves britanniques se sont dit au revoir sans savoir quand ils se retrouveront: le Royaume-Uni, qui a opté pour une stratégie moins radicale que ses voisins, a fermé vendredi ses écoles.

Les célèbres plages de Rio seront fermés pour au moins deux semaines à partir de samedi. Et la France a pris des mesures pour interdire le littoral de la Côte d'Azur aux promeneurs qui venaient trop nombreux y prendre le soleil malgré les consignes.

Lydie Moronvalle, un médecin installé dans un petit village français, a prévenu que les personnes très âgées qui vivent encore chez elles "ne comprennent pas toujours pourquoi elles n'ont plus autant de visites, et certaines risquent de se laisser mourir".

"Comme des zombies"

Après Netflix, Google a annoncé vendredi la réduction de ses débits sur YouTube pour utiliser moins de réseau afin d'alléger la pression sur l'internet en Europe, où les obligations de confinement et le télétravail ont augmenté le trafic.

Qualifié d'"ennemi de l'humanité" par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le Covid-19 a jusqu'à présent contaminé plus de 240.000 personnes dans le monde.

En Italie, placée en confinement généralisé depuis une semaine, le nombre de prêtres morts du coronavirus, après être venus bénir les patients dans les hôpitaux, s'allonge de jour en jour.

"Équipés d'un masque, d'une casquette, de gants, d'une blouse et de lunettes nous, les prêtres, nous promenons dans les salles comme des zombies", a raconté le curé d'une paroisse de Bergame (nord). "On ne sait plus où mettre les morts. Certaines églises sont utilisées" pour cela, s'alarme l'évêque de la ville, Mgr Francesco Beschi.

La Chine n'a elle fait état vendredi d'aucune nouvelle contamination d'origine locale, pour le deuxième jour consécutif, offrant un espoir sur l'efficacité des mesures de confinement.

Pour des dizaines de milliers de Chinois - étudiants, professionnels, sportifs - à l'étranger, notamment en Europe, le mot d'ordre est désormais: "Rentrer à la maison", même s'ils sont désormais confrontés à la méfiance d'une partie de leurs compatriotes.

Les poules du jardin

Une hostilité qui n'a pas découragé Yang Qingyun, 28 ans, étudiante à Munich, désormais en quarantaine chez elle dans le Shanxi (nord).

"J'avais le pressentiment que l'épidémie exploserait en Allemagne. La plupart des Allemands ne prenaient pas la maladie au sérieux et j'avais peur que ma fille soit contaminée", explique-t-elle à l'AFP.

Sur le plan diplomatique, la Chine a accusé vendredi Donald Trump de "fuir ses responsabilités" après des propos du président américain estimant que le monde payait "le prix fort" pour la lenteur chinoise à communiquer sur le nouveau coronavirus.

Donald Trump a prédit un recours imminent à la chloroquine, un antipaludéen, comme possible traitement pour les malades du Covid-19 après des résultats encourageants en Chine et en France. Mais nombre d'experts ont appelé à la prudence en soulignant l'absence de données cliniques solides et publiques.

Des multinationales de l'industrie pharmaceutique se sont engagées jeudi à fournir un vaccin contre le Covid-19 "partout dans le monde", dans un délai estimé de 12 à 18 mois minimum.

Particulièrement touchée aussi, l'Espagne se prépare à affronter "les jours les plus durs" de la pandémie en incorporant des milliers de personnels soignants.

Dans les coins isolés du pays, la solidarité est au rendez-vous.

Comme d'autres jeunes de son petit village de Castille, Sergio Caminero, 30 ans, fait les courses de ses voisins âgés. Il offre les oeufs des poules qu'il élève dans son jardin, un autre donne le lait de ses chèvres. "Si les choses empirent, au moins dans les villages, on sera auto-suffisant", assure-t-il.

Au bord de la récession

Au-delà du drame sanitaire, le nouveau coronavirus risque de plonger le monde dans la récession, malgré les milliers de milliards débloqués en urgence aux Etats-Unis et en Europe.

Jusqu'à 25 millions d'emplois sont menacés en l'absence de réponse coordonnée à l'échelle internationale, a averti l'Organisation internationale du travail.

La Banque centrale européenne (BCE) a déjà prévenu que l'économie du Vieux Continent allait "se contracter considérablement".

Et le Premier ministre italien Giuseppe Conte a demandé à l'Union européenne d'utiliser "toute la puissance" de son fonds de secours, doté d'une force de frappe de 410 milliards d'euros.

Les Bourses étaient toutefois en forte hausse vendredi, rompant avec un début de semaine cauchemardesque, les investisseurs misant sur l'effet des plans de relance annoncés.

Hong Kong a pris plus de 5% en clôture. Et l'Europe prenait le même cap positif: Paris et Francfort ont pris plus de 5% à l'ouverture et Londres suivait le même mouvement.

afp/al