(Actualisé avec précisions, déclarations de l'amiral Harris)

par Ju-min Park et Jack Kim

SEOUL, 26 avril (Reuters) - L'armée américaine a commencé à déployer mercredi des éléments du bouclier antimissile THAAD sur le site prévu en Corée du Sud, dans un contexte de tensions dans la région en raison du programme nucléaire et balistique de la Corée du Nord.

Ce bouclier antimissile sera opérationnel dans les jours à venir, a déclaré mercredi devant le Congrès américain l'amiral Harry Harris, commandant en chef des forces américaines dans la zone Asie-Pacifique.

L'amiral a dit penser que les Etats-Unis seraient en mesure de contrer toute attaque nord-coréenne qui viserait le porte-avions américain Carl Vinson, qui se rapproche de la péninsule coréenne et se trouve en ce moment dans la mer des Philippines. Harris a ajouté que Washington devrait songer à installer des systèmes de défense supplémentaires à Hawaï. Il s'est déclaré encouragé par les efforts menés par Pékin pour calmer son turbulent allié nord-coréen.

Les Etats-Unis et la Corée du Sud ont convenu en juillet dernier de déployer le système de défense antimissiles pour faire face aux menaces de la Corée du Nord.

Le déploiement plus rapide que prévu du THAAD a été dénoncé à la fois par la Chine et par le favori de l'élection présidentielle du 9 mai en Corée du Sud, Moon Jae-in.

Des centaines de manifestants, pour la plupart des résidents des deux villes sud-coréennes situées à proximité du site, dont Seongju, dans le centre-sud du pays, ont protesté contre ce déploiement.

A Pékin, le ministère des Affaires étrangères a réclamé mercredi le retrait immédiat de ce système. Lors d'un point de presse régulier, le porte-parole du ministère, Geng Shuang, a précisé que la Chine avait exprimé ses graves inquiétudes auprès de Washington et de Séoul à la suite de ce développement.

"La Chine recommande vivement aux Etats-Unis et à la Corée du Sud de mettre fin à des actes qui aggravent les tensions régionales et nuisent aux intérêts stratégiques liés à la sécurité de la Chine, d'annuler le déploiement du système THAAD et de retirer ses équipements", a-t-il dit.

"La Chine prendra avec détermination les mesures nécessaires pour défendre ses intérêts", a ajouté Geng sans préciser son propos.

Les armées américaine et sud-coréenne étaient jusqu'ici réticentes à évoquer publiquement le déploiement du bouclier en raison de l'imminence de l'élection présidentielle.

AFFRONTEMENTS AVEC LA POLICE

Un porte-parole du candidat Moon Jae-in a estimé que la décision de ce mercredi "ignorait l'opinion publique" et a exigé la suspension du déploiement jusqu'à l'installation de la nouvelle administration sud-coréenne.

Le ministère de la Défense sud-coréen a précisé que des éléments du Terminal High Altitude Area Defense (THAAD) avaient été transférés vers le site retenu, un ancien parcours de golf dans le comté de Seongju, à 250 km environ au sud de Séoul.

"La Corée du Sud et les Etats-Unis ont travaillé à assurer une capacité opérationnelle anticipée du système THAAD en réponse à la menace nucléaire et balistique de la Corée du Nord", ajoute le ministère dans un communiqué, précisant que les batteries devraient être opérationnelles à la fin de l'année.

Le Pentagone a de son côté dit que le déploiement du système était un pan essentiel de la défense de la Corée du Sud contre le menace nord-coréenne, ajoutant qu'il serait complété "dès que possible".

Cela fait des semaines que Washington et Pyongyang accentuent la pression l'un sur l'autre, les Etats-Unis ayant envoyé notamment dépêché dans le Pacifique Ouest un groupe aéronaval emmené par le porte-avions USS Carl Vinson.

La Corée du Nord a procédé mardi à d'importants exercices d'artillerie à munitions réelles, tandis qu'un sous-marin américain est venu mouiller dans le grand port de Busan en Corée du Sud, dans le cadre de la démonstration de force de Washington face au discours belliciste de Pyongyang.

L'administration Trump va informer ce mercredi la totalité des élus du Congrès sur le dossier nord-coréen, marqué par les très fortes tensions entre Washington et Pyongyang.

Sur le site de déploiement du THAAD, une dizaine de manifestants ont été blessés lors d'affrontements avec la police, certains d'entre eux souffrant de fractures, a dit à Reuters Kim Jong-kyung, à la tête d'un groupe de villageois protestant contre le THAAD.

"Nous continuerons notre combat et il y a encore du temps avant que le THAAD soit pleinement opérationnel, donc nous nous battrons jusqu'à ce que tous les équipements soient retirés du site et nous demandons au nouveau gouvernement sud-coréen de revoir le projet", a-t-il dit. (avec Ben Blanchard à Pékin; Jean-Stéphane Brosse, Benoît Van Overstraeten, Henri-Pierre André et Eric Faye pour le service français)