par Andy Sullivan

WASHINGTON, 13 juin (Reuters) - La commission du Renseignement du Sénat a poursuivi mardi ses auditions dans l'enquête sur les relations entre des membres de l'équipe de campagne de Donald Trump et des responsables russes, épaississant le "nuage" qui plane au-dessus de la présidence américaine depuis l'investiture du milliardaire en janvier.

Après la déposition à charge faite jeudi dernier par l'ex-directeur du FBI, James Comey, limogé le 9 mai par Donald Trump, les sénateurs ont interrogé dans la journée Rod Rosenstein, numéro 2 du département de la Justice, avant d'entendre l'Attorney General lui-même, Jeff Sessions.

L'audition du ministre américain de la Justice devant la commission du Renseignement est prévue à 14h30 (18h30 GMT) et attendue comme un moment important dans cette affaire qui entrave le fonctionnement de la nouvelle administration présidentielle.

Les sénateurs mènent une enquête parallèle à celle du FBI sur une possible collusion entre des membres de l'équipe Trump et des officiels russes durant la campagne présidentielle et alors que la communauté américaine du renseignement affirme que le Kremlin a tenté d'influencer le résultat de l'élection afin de favoriser Trump jugé, par Moscou, plus conciliant avec les intérêts russes.

Donald Trump nie toute implication de la Russie dans son succès électoral le 8 novembre et soutient n'avoir aucun intérêt personnel dans ce pays. Le Kremlin dément également ces allégations.

Mais le renvoi de James Comey sur ordre du président américain, et après avis de l'Attorney General, a été perçu comme une tentative d'étouffer l'enquête que le FBI menait dans cette affaire.

Devant l'émoi provoqué par cette décision inattendue, le département de la Justice a désigné un procureur spécial, Robert Mueller, afin de mener les investigations de manière indépendante.

L'audition de Rod Rosenstein par les sénateurs avait pour but de déterminer le degré d'indépendance dont Robert Mueller dispose dans cette enquête potentiellement embarrassante pour Trump au moment où circulent des rumeurs sur le limogeage du procureur spécial.

"Le directeur Mueller bénéficiera de toute l'indépendance dont il a besoin pour mener l'enquête d'une manière appropriée", a déclaré Rod Rosenstein, ajoutant qu'il fallait "oublier" les spéculations.

Le numéro 2 du département de la Justice est le seul habilité à pouvoir mettre fin à la mission de Robert Mueller car le ministre de la Justice Jeff Sessions, qui a admis avoir eu des contacts avec l'ambassadeur russe à Washington, a décidé de se récuser pour toutes les décisions relatives à l'enquête russe.

DISSIMULATION

Juriste de renom et ancien directeur du FBI de 2001 à 2013 après avoir été brièvement Attorney General adjoint, Robert Mueller est un fonctionnaire respecté par les élus républicains et démocrates ayant démontré son indépendance à l'égard des différentes administrations qu'il a servies.

Interrogé par la commission du Sénat, Rod Rosenstein a estimé mardi qu'il n'y avait aucune raison de remettre en cause le mandat de Robert Mueller et a affirmé qu'il prendrait aucune décision en ce sens sans bonne raison.

Cette mise au point intervient avant la déposition que Jeff Sessions doit effectuer dans l'après-midi afin d'expliquer la nature de ses relations avec des responsables russes et pourquoi il a dissimulé celles-ci aux membres du Congrès.

L'Attorney General, soutien de la première heure de la campagne de Trump, avait affirmé en janvier lors de son audition de confirmation devant le Sénat qu'il n'avait eu aucun contact avec des représentants russes en 2016.

Depuis, ses conseillers ont été contraints d'admettre que Jeff Sessions avait rencontré à deux reprises l'ambassadeur de Russie à Washington, Sergueï Kislyak. Les mêmes conseillers ont expliqué que Sessions n'avait aucune intention de tromper les parlementaires car ces rencontres s'étaient faites dans le cadre de son mandat de sénateur.

Mais, comme l'ont rapporté plusieurs organes de presse américains, lors de sa déposition à huis clos James Comey a indiqué à la commission sénatoriale du Renseignement que Sessions pourrait avoir rencontré Sergueï Kislyak une troisième fois.

Toute l'incertitude de cette audition tient aux réponses que Sessions acceptera de faire devant les sénateurs.

Plusieurs membres de la commission ont exprimé leur irritation face au silence opposé par d'autres membres de l'administration américaine convoqués devant eux.

"Cela ne peut pas être acceptable", affirmé le sénateur démocrate Ron Wyden.

(Pierre Sérisier pour le service français)