TOKYO/SEOUL, 7 mai (Reuters) - Le Premier ministre japonais Fumio Kishida a rencontré dimanche en Corée du Sud le président sud-coréen Yoon Suk-yeol, alors que les deux dirigeants cherchent à renforcer les relations entre leurs deux pays.

Ce déplacement à Séoul, le premier effectué par un dirigeant japonais en 12 ans, intervient après le voyage à Tokyo du président sud-coréen au mois de mars.

Des contentieux historiques liés à l'occupation japonaise de la péninsule coréenne opposent encore les deux pays, notamment concernant des îlots rocheux que le Japon et la Corée du Sud se disputent, et la question des "femmes de réconfort", des Coréennes contraintes à travailler dans des maisons closes établies pour les soldats de l'armée et de la marine impériales japonaises durant la Seconde Guerre mondiale.

Fumio Kishida n'a pas présenté de nouvelles excuses concernant cette période tandis qu'il s'adressait aux journalistes après son entretien avec le président sud-coréen, mais il a déclaré que son gouvernement héritait de la position des administrations précédentes, dont certaines avaient présenté des excuses.

"Personnellement, mon coeur saigne lorsque je pense aux nombreuses personnes qui ont enduré des souffrances et des peines terribles dans les circonstances difficiles de l'époque", a-t-il déclaré.

Les questions historiques non résolues ne doivent pas signifier qu'aucune mesure ne pouvait être prise pour approfondir les liens, a déclaré de son côté Yoon Suk-yeol.

L'engagement des dirigeants à renforcer la coopération a été salué par les États-Unis, qui y voient un moyen de mieux faire face aux menaces de la Corée du Nord et à la concurrence de la Chine.

"La coopération et la coordination entre la Corée du Sud et le Japon sont essentielles non seulement pour les intérêts communs des deux pays, mais aussi pour la paix et la prospérité dans le monde", a déclaré le président sud-coréen dans son discours d'ouverture.

Cependant, le principal parti d'opposition sud-coréen, le Parti démocrate, a accusé Yoon Suk-yeol de soumission et a critiqué son "oubli de l'histoire" et son engagement dans une "diplomatie de l'humiliation".

"Pourquoi la condition préalable au rétablissement de la diplomatie bilatérale devrait-elle être de renoncer à notre histoire ?", a déclaré le porte-parole du parti, Kang Sun-woo, lors d'une réunion d'information, a rapporté l'agence de presse Yonhap.

SÉCURITÉ ET COOPÉRATION ÉCONOMIQUE

Les discussions entre les deux alliés des États-Unis se sont concentrées sur la coopération en matière de sécurité face aux menaces nucléaires de la Corée du Nord, et également sur les intérêts américains dans la région, a déclaré Shin-wha Lee, professeure de relations internationales à l'université de Corée, basée à Séoul.

"Leurs capacités militaires et économiques sont essentielles pour promouvoir la coopération multilatérale en matière de sécurité régionale, et de mauvaises relations entre les deux pays pourraient entraver les objectifs des États-Unis", a-t-elle commenté.

Fumio Kishida a précisé que les deux dirigeants on discuté des relations bilatérales ainsi que des questions régionales et internationales, et notamment de la Corée du Nord.

Le Premier ministre japonais a ajouté qu'il avait accepté que des experts sud-coréens inspectent le projet de déversement dans l'océan de l'eau contaminée de la centrale nucléaire Fukushima, qui a suscité la controverse en raison des effets possibles sur l'environnement.

Il a également invité Yoon Suk-yeol à participer au sommet du G7 qui se tiendra au Japon à la fin du mois ainsi qu'à des discussions trilatérales avec les États-Unis en marge de ce sommet.

Si Yoon Suk-yeol et Fumio Kishida n'ont pas évoqué les points de friction avec la Chine, ils ont en revanche parlé de valeurs communes en matière de droits de l'homme, d'État de droit et de liberté et d'ouverture dans la région indo-pacifique, a rapporté Leif-Eric Easley, professeur à l'université Ewha de Séoul.

"Cela suggère que Séoul et Tokyo sont de plus en plus sur la même longueur d'onde en ce qui concerne le renforcement de la sécurité de la chaîne d'approvisionnement, la résistance à la coercition économique et la dissuasion de l'utilisation unilatérale de la force en Asie", a-t-il dit. (Reportage Choonsik Yoo, Seoyun Kang, Josh Smith et Hyonhee Shin à Séoul, Sakura Murakami à Tokyo et David Brunnstrom à Washington; version française Camille Raynaud et Kate Entringer)