Londres (awp/afp) - La livre profitait jeudi de spéculations de presse sur un possible changement de position du gouvernement britannique sur son plan budgétaire controversé, tandis que le yen sombrait à un plus bas en 32 ans après l'inflation américaine.

Vers 13H35 GMT (15H35 HEC), la livre bondissait de 0,62% à 1,1169 dollar et de 1,07% par rapport à l'euro à 86,49 pence pour un euro.

Le plan budgétaire de la nouvelle Première ministre Liz Truss est dans le viseur des marchés depuis que l'annonce de mesures coûteuses et non chiffrées avait fait s'envoler le coût de la dette britannique et plonger la livre à son plus bas historique par rapport au dollar.

Selon des informations de l'agence Bloomberg, une volte-face est à l'étude dans les bureaux de la Première ministre comme ceux du ministre des Finances, mais aucune décision n'a pour l'instant été prise.

Depuis Washington, le ministre des Finances Kwasi Kwarteng a pourtant affirmé jeudi à la BBC que la position du gouvernement "n'a pas changé. Je présenterai un plan budgétaire à moyen terme le 31 octobre, comme je l'ai déjà dit cette semaine".

"La situation change presque d'heure en heure", constate Paola Binns, gestionnaire de fonds chez RLAM, interrogée par l'AFP. "A court terme, on pourrait avoir un revirement de la Banque d'Angleterre (BoE) ou du gouvernement. Et les marchés doivent prendre ça en compte dans leurs prix", ajoute-t-elle.

Le rendement des obligations d'Etat reculait, signe d'achats par les investisseurs.

Le taux des bons à 10 ans, qui avait atteint la veille un sommet depuis 2008 à 4,63%, reculait à 4,27%, tandis que celui des bons à 30 ans baissait à 4,62% après avoir dépassé 5% la veille.

L'instabilité britannique a été à nouveau critiquée jeudi par la directrice générale du Fonds monétaire international, qui a appelé jeudi le Royaume-Uni ainsi que les autres Etats à adopter des politiques "cohérentes et consistantes".

Mercredi, des informations du FT, citant des sources anonymes, selon lesquelles la Banque d'Angleterre se tenait prête à étendre son programme de rachat de bons du Trésor à long terme britannique, avait déjà fait temporairement monter la livre, malgré les dénégations répétées de la BoE.

Inflation persistante

Les autres grandes devises reculaient face au dollar, dopé par des données plus fortes qu'attendu sur l'inflation américaine, ce qui laisse attendre un nouveau tour de vis vigoureux de la Réserve fédérale.

L'euro cédait 0,44% à 0,9660 dollar. La devise japonaise dévissait de 0,19% à 147,18 yens pour un dollar, un nouveau plus bas depuis 1998. Quelques instants plus tôt, le yen a reculé à 147,67 yens, un seuil plus franchi depuis 32 ans.

"La première raison de la faiblesse du yen est la divergence de politique monétaire entre les Etats-Unis et le Japon. L'inflation américaine est très élevée et a poussé la Réserve fédérale à remonter ses taux rapidement. La Banque du Japon, au contraire, maintient une politique monétaire très souple car l'inflation est moins élevée", commente Carol Kong, analyste chez Commonwealth Bank of Australia.

L'inflation aux Etats-Unis s'est établie à 8,2% par rapport à septembre 2021, quand elle était en août de 8,3% par rapport à août 2021, selon l'indice CPI, qui fait référence. Ce ralentissement est plus léger qu'attendu, et, sur un mois seulement, la progression des prix s'est de nouveau accélérée, grimpant de 0,4% entre août et septembre, contre 0,1% entre juillet et août.

Résultat, les investisseurs prévoient désormais que la Réserve fédérale américaine va devoir se montrer encore plus inflexible sur ses hausses de taux.

Les marchés "estiment désormais que la probabilité d'une hausse de 0,75 point de pourcentage est de plus de 90% lors de la prochaine réunion, et certains envisagent même une hausse de 1 point", commente Matthew Weller, analyste chez Forex.com.

Les cambistes se demanderont désormais si le gouvernement japonais et la Banque du Japon vont à nouveau intervenir sur le marché des changes pour soutenir la devise, comme ils l'ont fait mi-septembre.

"La derière fois qu'il y a eu deux interventions rapprochées sur le yen était en 1998" et "l'effet sur le taux de change n'avait duré qu'entre deux et cinq jours, ce qui a aussi été le cas en septembre", remarque Christopher Wong, de Oversea-Chinese Banking Corp.

afp/buc