par Tabassum Zakaria et Mark Hosenball

WASHINGTON, 11 novembre (Reuters) - L'enquête du FBI qui a conduit à la découverte d'une liaison extraconjugale entre le directeur de la CIA et Paula Broadwell, co-auteur de sa biographie, ne visait pas à l'origine le fringant général aux impressionnants états de service.

Si une femme proche de David Petraeus n'avait pas porté plainte pour cyber-harcèlement, le FBI n'aurait pas découvert que le général, qui a démissionné vendredi, entretenait une relation avec l'auteur de ces menaces, Paula Broadwell.

Les enquêteurs sont en effet tombés sur des courriels explicites échangés entre Paula Broadwell, 40 ans, et le patron de la CIA, 60 ans, a-t-on appris auprès de deux responsables américains et de deux personnes proches du dossier.

Toute la lumière n'a cependant pas été faite. On ignore encore la nature précise des courriels qui ont mené à l'enquête du FBI et si ceux-ci pouvaient compromettre la sécurité nationale d'une quelconque façon.

La raison pour laquelle le FBI a attendu le jour de l'élection américaine pour informer le directeur du Renseignement national, James Clapper, de l'enquête impliquant David Petraeus, alors que celui-ci avait été auditionné deux semaines auparavant, n'est pas claire non plus.

Selon une des sources, ce délai s'explique par le fait que les enquêteurs n'ont trouvé aucune preuve qu'un crime avait été commis.

Rien n'indique en effet que Petraeus ait enfreint les règles en vigueur à la CIA concernant la vie privée de ses employés, notent des sources au fait des pratiques en vigueur à Langley, le siège de l'agence.

La CIA n'a aucune règle globale interdisant les relations extraconjugales, à moins bien sûr que celles-ci ne mettent en danger la sécurité nationale, comme par exemple des liaisons avec des agents étrangers.

"ALL IN"

Paula Broadwell a rencontré pour la première fois David Petraeus en 2006, lorsqu'après une carrière militaire elle étudiait à Harvard.

Le général américain lui avait alors donné sa carte, lui proposant son aide.

Quatre ans plus tard, elle se trouvait en Afghanistan et transformait son mémoire en une biographie du général intitulée "All In", parue au début de l'année.

"Cela a été la base de notre relation", avait-elle expliqué lorsqu'elle elle avait été invitée au "Daily Show" de Jon Stewart en janvier pour faire la promotion de son livre.

Jusqu'à présent, cette femme mariée à un radiologue, Scott, et mère de deux enfants a mené de front vie de famille et carrière militaire, tout en se consacrant à des oeuvres caritatives et en participant à des compétitions d'athlétisme en tant que triathlète.

"Tout le monde est surpris et choqué", témoigne Ed Williams, un voisin de Paula Broadwell dans une banlieue aisée de Charlotte, en Caroline du Nord.

Paula Broadwell cite l'homme qui partage sa vie dans les remerciements de son livre, se disant reconnaissante qu'il ait joué le rôle de "Monsieur maman" pour ses deux garçons lorsqu'elle se trouvait en Afghanistan ou à Washington.

"Je suis reconnaissante d'avoir un époux extraordinaire et d'un si grand soutien", écrit-elle.

Dans cette liste de remerciements est également citée Holly, la femme de David Petraeus.

"OFFICIER EXCEPTIONNEL"

David Petraeus a démissionné vendredi de son poste de directeur de la CIA, invoquant la mise au jour de cette aventure extraconjugale. (Voir )

"Après avoir été marié pendant plus de 37 ans, j'ai fait preuve d'un manque de jugement en ayant une relation extraconjugale. Semblable comportement est inacceptable à la fois comme époux et comme patron d'une organisation telle que la nôtre", écrit-il. "Cet après-midi, le président a gracieusement accepté ma démission", ajoute-t-il.

Petraeus, qui est l'un des généraux les plus décorés de l'armée américaine, dirigeait la principale agence d'espionnage des Etats-Unis depuis quatorze mois. L'intérim sera assuré par son adjoint, Michael Morell.

Sa démission a été acceptée par le président Barack Obama, qui a reçu David Petraeus jeudi à la Maison blanche puis s'est entretenu par téléphone avec lui dans la journée de vendredi. Parlant d'un "officier exceptionnel", Obama a salué son travail à la tête de la CIA et avant cela son rôle à la tête des forces américaines en Irak puis en Afghanistan. (Avec Doug Palmer, Matt Spetalnick, Rick Rothacker; Agathe Machecourt, Jean-Loup Fiévet et Henri-Pierre André pour le service français)