par Oliver Holmes

QAB ELIAS, Liban, 8 décembre (Reuters) - Les milliers de réfugiés syriens privés de l'aide du Programme alimentaire mondial (Pam) ne savent pas comment ils se nourriront, éduqueront leurs enfants et chaufferont leurs tentes dans les semaines d'hiver qui approchent.

Le Pam a suspendu il y a une semaine son aide à 1,7 million de réfugiés syriens, faute de financement, en s'abstenant de créditer, pour le mois de décembre, les cartes de paiement qui permettent à ces réfugiés de Jordanie, de Turquie et du Liban d'acheter des vivres dans les magasins.

"Il y a des jours où l'on mange, d'autres où l'on ne mange pas", résume Oum Ali, une mère de famille originaire de Homs, qui vit dans la plaine libanaise de la Bekaa avec 300 autres réfugiés. "Nous essayons de faire face du mieux que nous pouvons."

Pour certains, mieux vaut encore retourner en Syrie que mourir de faim de l'autre côté de la frontière. "Au moins là-bas, on devient martyr quand on meurt", déclare Ahmad Chaaban Abdallah, un habitant d'Alep qui dirige le camp libanais de Qab Elias - cinquante familles.

Au Liban, un quart de la population est constituée aujourd'hui de réfugiés et les autorités ont interdit aux Nations unies d'ouvrir de nouveaux camps. Les déplacés sont ainsi disséminés dans quelque 1.700 quartiers ou villages.

Beaucoup vivent dans des abris de fortune, cabanes de jardin, garages ou bâtiments en cours de construction.

A Qab Elias, la plupart des habitants sont des enfants.

En prévision de l'hiver, on creuse des tranchées autour des tentes pour empêcher la pluie de tout inonder. La neige est déjà présente sur les sommets environnants.

Peu de réfugiés ont trouvé du travail, alors que chaque famille de Qab Elias verse 500 dollars par an pour louer la terre à des propriétaires libanais.

APPEL AU PUBLIC

A trois semaines de la fin de l'année, les Nations unies n'ont touché que 53% des 3,7 milliards de dollars qu'elles avaient réclamés pour leurs opérations humanitaires en Syrie en 2014.

Emilia Casella, porte-parole du Pam à Rome, a toutefois déclaré qu'un appel de fonds au public lancé la semaine dernière, après l'annonce de la suspension, avait jusqu'ici reçu un bon écho.

Sur le site du Pam, il était précisé vendredi que 21,5 millions de dollars avaient été récoltés en 24 heures grâce à cette campagne lancée sur les réseaux sociaux, soit un tiers des fonds nécessaires pour maintenir l'assistance alimentaire tout au long du mois de décembre pour les réfugiés syriens.

Mardi se tiendra une conférence à Genève sur le sujet alors que la Jordanie, le Liban et la Turquie ont commencé à restreindre l'accès de leur territoire aux nouveaux arrivants.

Les organisations humanitaires ont appelé lundi les pays riches à prendre en charge au moins 5% de l'ensemble des réfugiés syriens d'ici la fin 2015.

Amnesty International s'indignait la semaine dernière que les riches Etats du Golfe n'aient pas accueilli le moindre réfugié syrien, jugeant cela "particulièrement honteux".

Quatre ans de guerre civile ont déjà provoqué la plus grave crise de réfugiés contemporaine, l'une des plus importantes depuis la Seconde Guerre mondiale.

Au moins 3,2 millions de réfugiés ont fui la Syrie, où 200.000 personnes sont mortes, selon l'Onu. (Jean-Stéphane Brosse pour le service français)