MOSCOU (Reuters) - La Russie a suspendu sa participation à la mise en oeuvre de l'accord sur les exportations de céréales depuis les ports ukrainiens après des attaques visant des bâtiments de sa marine en Crimée, a annoncé samedi le ministère russe de la Défense.

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmitro Kouleba, a accusé Moscou d'utiliser un "faux prétexte" et appelé "tous les Etats à exiger de Russie qu'elle cesse de jouer avec la faim et respecte ses obligations".

Andriy Yermak, chef de cabinet du président ukrainien Volodimir Zelensky, a accusé la Russie de "chantage" au prétexte d'"attaques terroristes inventées". "L'archaïsme du chantage russe est visible par tout le monde. Chantage sur le nucléaire, sur l'énergie, sur la nourriture", a-t-il dit sur Telegram.

La Russie accuse les forces ukrainiennes d'avoir mené, avec l'aide de "spécialistes britanniques", des attaques de drones contre des navires de la flotte russe de la mer Noire samedi matin dans le port de Sébastopol en Crimée, péninsule ukrainienne annexée par Moscou en 2014.

"En raison de (...) l'acte terroriste du régime de Kyiv avec la participation d'experts britanniques contre les navires de la flotte de la mer Noire et des vaisseaux civils impliqués dans la sécurisation du 'corridor de céréales', la partie russe suspend sa participation dans la mise en oeuvre des accords sur l'exportation de produits céréaliers à partir des ports ukrainiens", a déclaré le ministère de la Défense dans un communiqué.

MOSCOU PRÊT À "REMPLACER LES CÉRÉALES UKRAINIENNES"

Dans un communiqué samedi, le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré quant à lui qu'à la suite des attaques dénoncées par Moscou, "la partie russe ne peut garantir la sécurité des cargos participant à l'Initiative de la mer Noire' et suspend son application à partir d'aujourd'hui pour une période indéterminée".

"Des instructions adéquates ont été données aux représentants russes au centre de coordination conjoint d'Istanbul, qui contrôle le transport des produits ukrainiens", a-t-il ajouté.

Un peu plus tôt dans la journée, le ministre russe de l'Agriculture, Dmitri Patrouchev, avait annoncé que la Russie était prête à fournir jusqu'à 500.000 tonnes de céréales à des pays pauvres au cours des quatre prochains mois, avec l'aide de la Turquie. "En prenant en compte la récolte de cette année, la Fédération russe est tout à fait prête à remplacer les céréales ukrainiennes et à livrer des fournitures à des prix abordables à tous les pays intéressés", a-t-il dit.

L'accord sur les céréales, signé en Turquie le 22 juillet dernier sous les auspices des Nations unies, a été conclu pour une durée de 120 jours et doit expirer à la mi-novembre. Il a permis l'exportation de plusieurs millions de tonnes de céréales et d'engrais en levant le blocus des ports ukrainiens en vigueur depuis l'invasion russe en février dernier.

Mercredi, le secrétaire général adjoint des Nations unies aux affaires humanitaires, Martin Griffiths, s'est dit relativement optimiste quant à la prolongation de cet accord au-delà de cette date.

Vendredi soir, le porte-parole du secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, Stephane Dujarric, a "souligné l'urgence" de renouveler l'accord. "Les gouvernements, les compagnies de transport maritime, les négociants de céréales et d'engrais et les agriculteurs du monde entier" attendent de la clarté sur l'avenir de l'accord, a-t-il insisté.

(Bureaux de Reuters, version française Marc Angrand et Jean-Stéphane Brosse)