LARISSA, Grèce (Reuters) - Les efforts se sont poursuivis jeudi en Grèce pour tenter de retrouver des victimes sur les lieux de la catastrophe ferroviaire qui a fait au moins 57 morts près de Larissa, au milieu des carcasses calcinées des wagons qui ont déraillé et se sont enflammés après le choc frontal entre un train de passagers et un convoi de marchandises.

Dans l'un des wagons du train à grande vitesse en provenance d'Athènes à bord duquel se trouvaient plus de 350 passagers et membres d'équipage, la température est montée jusqu'à 1.300 degrés Celsius à la suite de la collision survenue tard mardi soir.

"Le moment le plus difficile, c'est celui-là, quand au lieu de sauver des vies on doit récupérer des cadavres", a dit à Reuters un membre des équipes de secours, Konstantinos Imanimidis, sur le site de l'accident.

"Des températures de 1.200 degrés et plus dans les wagons ne laissent à personne aucune chance de rester en vie."

Pour permettre d'identifier certaines victimes, des proches ont dû fournir des échantillons d'ADN dans un hôpital de Larissa. "Meurtriers!" a crié une femme nommée Katerina à l'adresse des autorités devant l'établissement, à la recherche de son frère disparu.

Les blessés sont nombreux. Parmi les victimes se trouvent beaucoup d'étudiants qui revenaient d'un week-end prolongé à la suite d'un jour férié lundi.

"C'est une opération difficile (...) nous devons progresser minutieusement, centimètre après centimètre, afin de récupérer et de rendre tous les gens à leurs proches", a dit un porte-parole des pompiers, Giannis Artopios, à la chaîne de télévision ERT.

LE CHEF DE GARE DE LARISSA ARRÊTÉ

Alors que le pays s'efforce d'encaisser le choc de cette catastrophe que le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a attribuée à une erreur humaine, les cheminots grecs ont cessé le travail jeudi, paralysant le trafic, en accusant les gouvernements successifs d'avoir ignoré leurs alertes régulières sur la dégradation des conditions de sécurité sur le réseau ferré.

Le chef de station de la gare de Larissa a été interpellé mercredi soir, les enquêteurs cherchant à comprendre comment le train de passagers en direction de Thessalonique, dans le nord de la Grèce, avait pu se retrouver sur la même voie que le convoi de marchandises circulant en sens inverse.

Le ministre des Transports, Kostas Karamanlis, avait auparavant démissionné en disant assumer la responsabilité des défaillances de l'Etat incapable de moderniser un réseau ferré "inadapté au XXIe siècle".

Environ 2.000 personnes ont manifesté leur colère jeudi à Athènes - brandissant une banderole où était inscrit le slogan : "Nos vies comptent" - jusqu'à ce que la foule se disperse sous une forte pluie.

La veille dans la capitale, des manifestants ont jeté des pierres contre les locaux de la société de chemin de fer Hellenic Train avant d'être dispersés par la police anti-émeutes. Des manifestations ont également eu lieu à Thessalonique.

Nikos Tsouridis, formateur de conducteurs de train désormais à la retraite, a attribué la mort de ses anciens collègues tués dans la catastrophe à l'absence de mesures de sécurité.

"Et pourquoi n'y avait-il pas de mesures de sécurité ? Le chef de gare a commis une erreur, il l'a reconnue, mais assurément il devrait y avoir un mécanisme de sécurité sur lequel s'appuyer", a-t-il dit.

Dans le cadre des réformes entreprises pour bénéficier d'une aide financière internationale à la suite de la crise de sa dette souveraine, la Grèce a vendu l'opérateur ferroviaire TRAINOSE à la compagnie italienne Ferrovie dello Stato Italiane en 2017, tout en attendant des centaines de millions d'euros d'investissements dans les infrastructures dans les années à venir.

Le groupe italien est responsable du transport de passagers et de marchandises tandis que l'opérateur public grec OSE est chargé du réseau.

(Reportage Lefteris Papadimas, Alexandros Avramidis, Renee Maltezou, Karolina Tagaris et Michele Kambas, rédigé par Renee Maltezou et Ingrid Melander, version française Bertrand Boucey, édité par Kate Entringer et Jean-Stéphane Brosse)

par Lefteris Papadimas