HELSINKI/BRUXELLES (Reuters) - La Finlande doit effectuer ce mardi son entrée dans l'Otan, un virage "historique" provoqué par l'offensive de la Russie en Ukraine, selon les termes du secrétaire général de l'Alliance atlantique Jens Stoltenberg.

La Suède, elle aussi devenue candidate l'an dernier, doit continuer de patienter pour rejoindre l'organisation militaire occidentale en raison du veto de la Turquie et de la Hongrie.

"Le président (Vladimir) Poutine avait pour objectif déclaré avec l'invasion de l'Ukraine d'affaiblir l'Otan. Il obtient l'exact opposé", a déclaré Jens Stoltenberg à quelques heures de l'intégration officielle de la Finlande. "La Finlande aujourd'hui, et bientôt également la Suède, deviendra membre à part entière de l'Alliance", a-t-il ajouté.

Une cérémonie organisée au siège de l'Otan, en périphérie de Bruxelles, va marquer l'arrivée de la Finlande comme 31e membre de l'Alliance. Le président finlandais Sauli Niinisto et plusieurs ministres y prendront notamment part.

Il s'agit du début d'une nouvelle ère pour la Finlande, après des décennies de non-alignement militaire à la suite de la tentative d'invasion menée par l'Union soviétique durant la Deuxième Guerre mondiale. Helsinki avait depuis lors privilégié le maintien de relations cordiales avec la Russie voisine.

Cependant, l'offensive en Ukraine lancée le 24 février 2022, que Moscou présente comme une "opération militaire spéciale" mais qualifiée d'"invasion" par les Occidentaux, a poussé la Finlande à rejoindre l'Otan, dont le pacte collectif de défense stipule qu'une attaque contre l'un de ses membres est une attaque contre tous.

La Suède a effectué le même virage dans sa politique sécuritaire et demandé en même temps que la Finlande à intégrer l'Otan. Mais sa candidature n'a pas encore été approuvée par la Turquie et la Hongrie, alors que le feu vert de tous les membres de l'Alliance est indispensable pour une nouvelle adhésion.

Depuis que Budapest et Ankara ont ratifié la semaine dernière la candidature de Helsinki, la dernière étape formelle est la remise du document d'adhésion aux représentants américains à Bruxelles chargés de l'approuver.

FRONTIÈRE RUSSE

Une fois que le chef de la diplomatie finlandaise, Pekka Haavisto, aura transmis ce document, le drapeau finlandais sera hissé devant le siège de l'Otan aux côtés des drapeaux des 30 pays déjà membres. Les ministres des Affaires étrangères de l'Alliance se réuniront alors.

Avec l'adhésion de la Finlande, l'Otan voit les frontières qu'elle partage avec la Russie doubler de longueur.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a dénoncé mardi une "intrusion" contre la sécurité et les intérêts nationaux de la Russie.

Moscou avait prévenu lundi qu'il allait renforcer ses capacités militaires dans ses régions occidentales en réponse à cet élargissement de l'alliance transatlantique. Toutefois, la Russie avait commencé bien avant cela à déployer ses troupes au plus près du flanc oriental de l'Otan.

Jens Stoltenberg a également relativisé l'annonce par la Russie du déploiement d'armes nucléaires tactiques en Biélorussie.

"Jusqu'ici, nous n'avons pas constaté de changements dans la posture nucléaire de la Russie qui nécessiterait un changement dans notre posture, mais nous restons vigilants, nous surveillons de près ce qu'ils font, et nous prendrons les mesures nécessaire pour garantir une dissuasion crédible pour tous nos alliés", a-t-il déclaré.

Finlande et Suède avaient dit vouloir rejoindre l'Alliance "main dans la main" afin d'accroître leur sécurité respective, mais ce projet a pris du plomb dans l'aile avec le refus de la Turquie de se prononcer sur la candidature suédoise.

Ankara reproche à la Suède d'abriter des membres de ce qu'il considère comme des groupes terroristes, ce que nie Stockholm, et a demandé leur extradition avant de ratifier sa candidature.

La Hongrie bloque aussi cette candidature à la suite de critiques sur le respect des valeurs démocratiques par son Premier ministre Viktor Orban.

Des diplomates de l'Otan ont dit s'attendre à ce que la Hongrie donne son feu vert une fois que la Turquie aura levé son veto - ce qui, selon eux, pourrait intervenir après les élections présidentielle et législatives de mai.

Jens Stoltenberg a fait part de son optimisme sur le fait que la Suède deviendra un membre de l'Otan. "C'est une priorité pour l'Otan, pour moi, de garantir que cela arrive aussi tôt que possible", a-t-il dit.

(Reportage Anne Kauranen et Tom Little à Helsinki, Andrew Gray à Bruxelles; version française Jean Terzian et Jean-Stéphane Brosse)

par Anne Kauranen et Andrew Gray