Ce rapport de 29 pages, daté du 21 décembre, a été publié par le quotidien économique Handelsblatt. La banque centrale allemande y avertit que le rachat de dette souveraine de pays de la zone euro en difficulté "compromettait l'indépendance de la banque centrale" et pourrait s'avérer difficile à arrêter.

La Cour constitutionnelle doit examiner les 11 et 12 juin prochains un recours contre les "opérations monétaires sur titres" (OMT), un dispositif présenté l'été dernier par la BCE pour venir en aide aux pays de la zone euro en difficulté mais qu'elle n'a pour l'instant pas mis en oeuvre.

Le président de la Bundesbank, Jens Weidmann, qui a critiqué les OMT à plusieurs reprises, se rendra à Karlsruhe pour être entendu par la Cour, a précisé la banque centrale.

Jens Weidmann a déclaré à la Cour l'an dernier que les rachats d'obligations de la BCE sur le marché secondaire transgressaient la régulation européenne s'ils visaient à "financer les budgets de certains membres (de la zone euro) indépendamment des marchés des capitaux" car ils iraient à l'encontre de l'interdiction du financement monétaire.

Des experts juridiques y voient une menace voilée à la BCE.

Le gouvernement allemand a toutefois affiché sa confiance vendredi dans l'issue des débats de juin.

AVERTISSEMENTS EUROPÉENS

"Le gouvernement (...) est confiant dans le fait que la Cour constitutionnelle va totalement confirmer sa décision du 12 septembre 2012 sur la base d'une audition orale approfondie et à partir de quoi l'Allemagne a pu accepter en toute légalité le MES (mécanisme européen de stabilité)", a dit un porte-parole du ministère des Finances.

Il n'a pas donné de précision sur le jugement qui pourrait être porté par la Cour sur le projet de rachat de dette, qui sera aussi examiné en juin avant le verdict définitif.

Des responsables de la zone euro ont d'ores et déjà affirmé que la BCE échappait à la juridiction de la Cour constitutionnelle allemande.

"Le programme OMT ne fait pas partie de la législation allemande, et ne peut donc pas être examiné par la Cour allemande", a dit l'un d'eux.

Le tribunal de Karlsruhe pourrait néanmoins conclure que les OMT aboutissent à une perte de souveraineté trop importantes pour l'Allemagne au regard de la Constitution du pays. Il pourrait aussi renoncer à examiner la question et demander à la Cour européenne de justice de se prononcer.

Steffen Seibert, porte-parole du gouvernement allemand, a par ailleurs déclaré qu'Angela Merkel ne souhaitait en aucune manière remettre en cause l'indépendance de la BCE, au lendemain de propos de la chancelière allemande sur l'avantage que représenterait pour Berlin un relèvement des taux de l'institution de Francfort.

"Il n'y aucune raison de penser que la chancelière souhaitait adresser un avertissement ou une suggestion quelconque à la BCE", a-t-il dit au cours d'une conférence de presse.

Juliette Rouillon et Julien Dury pour le service français

par Annika Breidthardt et Stephen Brown