MOSCOU, 22 novembre (Reuters) - La Biélorussie ne veut pas de confrontation avec la Pologne mais attend toujours une réponse de l'Union européenne sur sa proposition de transférer vers le bloc communautaire 2.000 migrants bloqués à la frontière de l'ancienne république soviétique, a déclaré lundi le président Alexandre Loukachenko.

Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a averti dimanche que la crise migratoire à la frontière biélorusse pourrait être le prélude à "quelque chose de bien pire" et accusé Minsk de continuer à acheminer des migrants vers son territoire avec la complicité des forces de sécurité.

Cité lundi par l'agence de presse biélorusse Belta, Alexandre Loukachenko a assuré vouloir éviter toute escalade.

"Nous devons parler avec les Polonais, avec chaque Polonais, et leur montrer que nous ne sommes pas des barbares, que nous ne cherchons pas la confrontation. Nous n'en avons pas besoin. Parce que nous savons que si cela va trop loin, la guerre est inévitable", a affirmé Alexandre Loukachenko.

"Et ce sera une catastrophe. Nous le savons parfaitement. Nous ne voulons pas d'une quelconque étincelle qui mette le feu aux poudres."

Le chef de l'Etat biélorusse, accusé d'instrumentaliser le sort des migrants pour faire pression sur l'UE, qui lui a imposé plusieurs trains de sanctions depuis la répression brutale des manifestations contre la réélection de Loukachenko à la tête de l'Etat en août 2020, a également mis en garde la Pologne après la menace de Varsovie de fermer un point de passage ferroviaire frontalier.

Cette menace pourrait se retourner contre la Pologne, a-t-il averti, car le trafic ferroviaire vers l'Est pourrait alors être détourné vers la région du Donbass, région de l'est de l'Ukraine en proie à un conflit séparatiste.

"J'ATTENDS UNE RÉPONSE DE L'UE"

L'Union européenne et l'Allemagne ont publiquement rejeté jeudi dernier un plan de sortie de crise proposé par Alexandre Loukachenko à la chancelière allemande Angela Merkel, lors de deux entretiens téléphoniques, prévoyant le rapatriement de 5.000 migrants par Minsk et la prise en charge de 2.000 autres par l'Union européenne.

Mais le président biélorusse a renouvelé lundi sa demande de transfert des 2.000 migrants vers l'Allemagne et s'est plaint de n'avoir aucun contact avec l'UE sur cette question.

"J'attends une réponse de l'UE. Ils n'étudient même pas la question. Et n'ont même pas pris contact - ce que (Merkel) m'avait promis", a déclaré Loukachenko.

Berlin a rejeté à nouveau la proposition de Minsk lundi. "L'idée d'avoir un couloir humanitaire vers l'Allemagne pour 2.000 migrants n'est pas une solution acceptable ni pour l'Allemagne ni pour l'UE", a déclaré un porte-parole du gouvernement fédéral.

Alexandre Loukachenko a assuré que la Biélorussie était en train d'organiser un deuxième vol de rapatriement de migrants pour la fin du mois. Environ 400 ressortissants irakiens ont été rapatriés la semaine dernière en Irak. Il s'agissait du premier rapatriement de migrants de Biélorussie depuis août dernier.

Selon Varsovie, les autorités biélorusses continuent d'acheminer des demandeurs d'asile vers la frontière polonaise, même si les principaux campements dans la zone frontalière ont été évacués la semaine dernière.

La police des frontières polonaise a déclaré lundi qu'un groupe de 150 migrants environ avait tenté de franchir la frontière la veille à hauteur du village de Dubicze Cerkiewne.

"Les groupes qui effectuent de telles tentatives et les officiels biélorusses deviennent de plus en plus agressifs", a écrit sur Twitter le porte-parole des services de sécurité polonais Stanislaw Zaryn. (Reportage Maria Kiselyova, Matthias Williams, Alan Charlish, Pawel Florkiewicz, avec Andreas Rinke à Berlin; version française Jean-Stéphane Brosse, édité par Blandine Hénault)