* Les pays de l'UE envisagent de prolonger les subventions au charbon

* La Pologne pourrait en bénéficier si certaines conditions sont remplies

* L'Allemagne et la Belgique s'opposent à l'aide au charbon

* La division menace l'accord sur les réformes énergétiques de l'UE

(ajoute les commentaires des ministres polonais, allemand, français et autrichien dans les paragraphes 5 à 11, et des détails sur la proposition de plafonnement des recettes dans les paragraphes 14 à 16)

LUXEMBOURG, 19 juin (Reuters) - Une proposition tardive visant à prolonger les subventions aux centrales à charbon a contrarié les projets des pays de l'Union européenne d'approuver lundi une réforme du marché de l'électricité, conçue pour orienter le système électrique vers des énergies plus propres.

Les ministres de l'énergie des pays de l'UE se réunissent lundi à Luxembourg pour adopter une position commune sur les nouvelles règles du marché de l'électricité de l'UE, qui visent à développer l'énergie à faible teneur en carbone et à éviter une répétition de la crise énergétique de l'année dernière, lorsque les prix du gaz ont atteint des sommets et que les consommateurs ont dû faire face à des factures d'énergie astronomiques.

La réforme proposée vise à rendre les prix de l'électricité plus stables et plus prévisibles, en intégrant les nouvelles énergies renouvelables soutenues par l'État et les centrales nucléaires à faible émission de carbone dans des "contrats pour la différence" à prix fixe. Les ministres doivent régler des détails tels que la manière de dépenser les recettes générées par ces programmes de subvention.

Mais les négociations ont été compliquées par une proposition tardive de la Suède, qui assure la présidence tournante de l'UE, visant à autoriser les pays à prolonger les subventions accordées aux centrales à charbon au titre du mécanisme de capacité, qui leur permet de maintenir une capacité de production d'électricité suffisante pour éviter les pannes de courant.

La Pologne, qui pourrait prolonger son régime de soutien aux centrales au charbon au-delà de 2025 en vertu de la proposition, a exhorté lundi les autres gouvernements à comprendre les besoins de chaque pays en matière de sécurité énergétique.

"Pour certains d'entre nous, la sécurité est synonyme de marchés de capacité", a déclaré la ministre polonaise du climat, Anna Moskwa.

Mais des gouvernements tels que l'Allemagne, la Belgique et le Luxembourg se sont opposés à cette proposition, qui menaçait de faire échouer un accord sur les réformes globales du secteur de l'énergie.

"Elle n'est pas compatible avec les objectifs de protection du climat de l'UE et des États membres", a déclaré à la presse le ministre allemand de l'économie et du climat, Robert Habeck.

Le ministre luxembourgeois de l'énergie, Claude Turmes, a qualifié la proposition d'"étonnante", tandis que le ministre autrichien de l'énergie a déclaré qu'une réunion de 14 pays lundi matin - parmi lesquels l'Espagne et l'Irlande - avait inclus des "voix très critiques".

APPEL À PLUS DE FLEXIBILITÉ

La ministre française de l'énergie, Agnès Pannier-Runacher, s'est montrée plus conciliante, appelant à une solution qui maintienne l'ambition climatique tout en tenant compte de la situation de chaque pays.

Le charbon est le combustible fossile qui émet le plus de CO2. Les scientifiques affirment que son utilisation doit chuter au cours de cette décennie si l'on veut éviter les conséquences les plus graves du changement climatique.

Certains pays de l'UE affirment qu'ils ont besoin d'une plus grande souplesse quant à la vitesse à laquelle ils abandonnent ce combustible et soutiennent les nouvelles industries dans les communautés qui dépendent depuis longtemps des emplois du secteur du charbon. La Pologne tire environ 70 % de son électricité du charbon.

La proposition, consultée par Reuters, indique que les mécanismes de capacité mis en place avant juillet 2019 pourraient temporairement échapper à la limite de CO2 que l'UE impose habituellement à ces programmes - permettant ainsi aux centrales au charbon de participer - s'ils ne parviennent pas à attirer suffisamment de générateurs à faible teneur en carbone.

Les ministres examineront également une proposition, soutenue par des pays tels que l'Espagne et la Grèce, visant à permettre aux pays de récupérer les recettes exceptionnelles de certaines centrales électriques en cas de flambée des prix de l'électricité, une mesure à laquelle les groupes du secteur de l'énergie se sont opposés.

Une fois que les pays de l'UE auront arrêté leur position, ils devront négocier la version finale de la modernisation du marché de l'électricité avec le Parlement européen, en vue d'adopter la loi avant les élections législatives de l'année prochaine. (Reportage de Kate Abnett ; reportage complémentaire de Tassilo Hummel ; rédaction de Giles Elgood et Emelia Sithole-Matarise)