Trois ministres de premier plan ont pris cette décision après que la BCE a relevé jeudi son taux d'intérêt de référence de 50 points de base, comme on s'y attendait généralement, et a annoncé de nouvelles augmentations tout en présentant des plans de réduction de ses achats d'obligations.

Alors que ce message a fait grimper les coûts d'emprunt italiens sur les marchés financiers vendredi, les responsables politiques de la banque se sont alignés pour renforcer les attentes selon lesquelles les taux de la zone euro continueraient à augmenter dans le but de maîtriser une inflation obstinément élevée.

Dans des commentaires inhabituellement durs, susceptibles d'alimenter les inquiétudes à l'étranger concernant les tendances eurosceptiques au sein du gouvernement de droite de Giorgia Meloni, le vice-premier ministre Salvini a qualifié la conduite de la BCE d'"incroyable, déconcertante, inquiétante".

Formé en octobre, le gouvernement de Mme Meloni attend également de ratifier le fonds de sauvetage de la zone euro.

Le ministre des affaires étrangères Antonio Tajani, également vice-premier ministre, a quant à lui déclaré que les mesures prises par la BCE nuiraient à la croissance économique, ce qui aurait des répercussions sur les marchés et les ménages à un moment où l'inflation en Europe est, selon lui, largement due à la guerre en Ukraine.

Le ministre de la défense, Guido Crosetto, proche allié de Mme Meloni et cofondateur de son parti Frères d'Italie, a déclaré sur Twitter que l'augmentation des taux d'intérêt n'avait "aucun sens" et a qualifié de "folle" la décision de la BCE de commencer à réduire ses achats d'obligations souveraines.

Jeudi, M. Crosetto a remercié de manière sarcastique la présidente de la BCE, Christine Lagarde, pour son "cadeau de Noël", à savoir la hausse des taux d'intérêt, à côté d'un graphique montrant que l'écart entre les coûts d'emprunt de l'Allemagne et de l'Italie s'est creusé.

OBJECTIF D'INFLATION

Les responsables politiques de la BCE de l'ensemble de la zone euro ont défendu le processus décisionnel de la banque vendredi.

Le gouverneur de la banque centrale française, François Villeroy de Galhau, a déclaré que cela était nécessaire pour ramener l'inflation de la zone euro, actuellement de 10 %, à l'objectif de 2 % de la BCE "d'ici la fin de 2024 (ou) la fin de 2025".

Le gouverneur estonien Madis Mueller a déclaré que les taux devraient probablement augmenter plus que ce que les marchés avaient prévu jusqu'à présent, tandis que le chef de la banque centrale finlandaise, Olli Rehn, a déclaré que des hausses de 50 points de base étaient probables lors de chacune des deux prochaines réunions.

La BCE a relevé le taux qu'elle paie sur les dépôts bancaires de -0,5 % en juillet à 2 % jeudi, date à laquelle elle a déclaré qu'elle prévoyait de le relever encore à un rythme régulier.

Elle cessera également, à partir du mois de mars, de remplacer une partie des 5 000 milliards d'euros (5 320 milliards de dollars) d'obligations qu'elle a achetées au cours des huit dernières années pour stimuler l'inflation lorsqu'elle était trop faible.

Ces achats d'obligations ont constitué une source vitale de financement pour les emprunteurs les plus faibles de la zone euro, dont l'Italie, depuis que le président de la BCE de l'époque, Mario Draghi, un Italien qui allait devenir Premier ministre, les a lancés en 2015.

L'écart de rendement entre les obligations italiennes et allemandes a clôturé à 206 points de base jeudi, en forte hausse par rapport aux 191 points de base enregistrés la veille, et s'est encore creusé pour atteindre 219 points de base vendredi matin.

L'inflation en Allemagne, la plus grande économie de la zone euro, est susceptible d'être plus élevée que prévu, tandis que la croissance économique sera plus faible et qu'une récession l'année prochaine est désormais certaine, a déclaré la Bundesbank vendredi.

(1 dollar = 0,9406 euro)