PARIS (Reuters) - Les Bourses européennes ont terminé en baisse mardi et Wall Street évoluait également dans le rouge à mi-séance, les chiffres supérieurs aux attentes de l'inflation dans la zone euro ayant ravivé l'aversion au risque et la crainte d'une remontée brutale des taux d'intérêt, tandis qu'aux Etats-Unis Joe Biden va discuter de la flambée des prix avec le président de la Fed.

À Paris, le CAC 40 a fini en repli de 1,43% à 6.468,8 points. Le Footsie britannique a lâché 0,08% et le Dax allemand a fléchi de 1,29%.

L'indice EuroStoxx 50 a reculé de 1,36%, le FTSEurofirst 300 de 0,83% et le Stoxx 600 de 0,72%.

Sur l'ensemble du mois, l'indice parisien a perdu 0,99% et le Stoxx 600 paneuroéen 1,09%.

La première estimation d'Eurostat a montré mardi que l'inflation dans la zone euro avait inscrit un nouveau record en mai à 8,1% sur un an après 7,4% en avril sur fond de hausse ininterrompue des prix de l'énergie et des produits alimentaires.

"Le problème de l'inflation dans la zone euro s'aggrave", a souligné Christoph Weil, économiste chez Commerzbank. "Les données sur les prix d'aujourd'hui accroissent une fois de plus la pression sur la BCE pour qu'elle mette fin à sa politique monétaire ultra-accommodante", a-t-il ajouté.

Le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a estimé mardi que la hausse de l'inflation confirmait la nécessité d'une "normalisation monétaire progressive mais résolue" et son homologue de la banque centrale slovaque, Peter Kazimir, a jugé que la BCE devait garder l'option d'une hausse d'un demi-point de ses taux en septembre.

Outre les données jugées décevantes sur l'inflation, le produit intérieur brut (PIB) de la France s'est contracté au premier trimestre de 0,2% et en Allemagne, un rapport de la Banque d'Espagne a indiqué que le PIB de l'UE pourrait chuter de 4,2% en cas d'embargo total sur les énergies russes.

Aux Etats-Unis, où la hausse des prix a atteint un pic de 40 ans, un entretien entre Joe Biden et Jerome Powell, le patron de la Réserve fédérale américaine, est prévu ce mardi à 17h15 GMT, afin, dit la Maison blanche, de discuter de la priorité absolue du président de "lutter contre l'inflation pour passer d'un rebond économique historique à une croissance stable et régulière en phase avec les classes laborieuses".

Christopher Waller, l'un des gouverneurs de Fed, a plaidé lundi pour une augmentation de 50 points de base du coût du crédit jusqu'à ce qu'il y ait une baisse "substantielle" de l'inflation, douchant l'espoir d'une pause dans la hausse des taux d'intérêt en septembre, qui avait notamment permis la semaine dernière un rallye des marchés d'actions.

Dans ce contexte, l'indice de la volatilité repart à la hausse aux Etats-Unis à 26,8 points (+4%) et en Europe, il a fini sur un gain de 5,9% à 25,1 points.

VALEURS EN EUROPE

Sur le marché européen, hormis l'énergie (+0,42%) et la consommation non-cyclique (+0,45%), tous les principaux compartiments du Stoxx 600 ont fini dans le rouge, la plus forte baisse étant à l'actif de l'industrie (-1,54%) et des nouvelles technologies (-1,41%)

Le baril de Brent, soutenu par l'accord européen sur un embargo massif sur le pétrole russe, la perspective d'une forte demande de brut aux Etats-Unis pour la saison estivale et l'assouplissement des restrictions sanitaires en Chine, a permis à TotalEnergies, BP et Eni de finir dans le vert.

La perspective d'une hausse des taux a en revanche pesé sur Worldline, Capgemini ou encore SAP qui ont cédé de 2,4% à 3,1%.

Dans l'actualité des entreprises, Credit Suisse a chuté de 5,1%, la banque ayant entamé, selon deux sources, une réflexion pour renforcer son bilan après de lourdes pertes ces dernières années. Deutsche Bank, pour sa part, a reflué de 2,5% après l'annonce par le parquet allemand d'une perquisition dans des locaux de DWS, sa filiale de gestion d'actifs.

Côté hausse, le fabricant néerlandais de produits chimiques de spécialisés DSM a avancé de 8% après l'annonce d'un projet de fusion avec le suisse Firmenich et la vente de sa filiale de matériaux d'ingénierie au fonds Advent International et au chimiste allemand Lanxess (+11,1%).

Unilever s'est octroyé 9,4% après l'annonce de l'entrée de l'investisseur activiste Nelson Peltz à son conseil d'administration.

A WALL STREET

Au moment de la clôture en Europe, le Dow Jones recule de 0,42%, le Standard & Poor's 500 de 0,32% et le Nasdaq de 0,05%.

Dix des onze principaux secteurs du S&P évoluent dans le rouge, affectés essentiellement par les craintes sur l'inflation alors que le marché pensait la semaine dernière que le pic avait été atteint après la publication de l'indice des prix "core PCE" aux Etats-Unis.

Les géants du numérique reculent à l'image d'Apple et Microsoft qui perdent environ 1% chacun, leur indice sectoriel cédant également environ 1%.

Les groupes pétroliers comme Exxon Mobil et Occidental Petroleum sont recherchés dans le sillage de la hausse des cours du brut.

Le producteur d'or canadien Yamana Gold bondit de 6,5% à la faveur d'une offre d'achat de 6,7 milliards de dollars (6,3 milliards d'euros) du sud-africain Gold Fields (-21,6%).

CHANGES

Le dollar remonte de 0,12% face à un panier de devises de référence après cinq séances de repli mais il devrait accuser un repli d'environ 1% sur le mois de mai, sa plus forte perte mensuelle en un an.

L'euro cède 0,52% à 1,0721 dollar mais s'achemine vers sa meilleure performance mensuelle depuis un an, les chiffres de l'inflation en zone euro plaidant pour une forte augmentation des taux de la BCE.

TAUX

L'inflation record en zone euro a favorisé la remontée des rendements obligataires en Europe. Les marchés anticipent désormais une hausse des taux de 115 points de base d'ici la fin de l'année contre une augmentation de 110 la semaine dernière.

Le taux du Bund allemand à dix ans a pris huit points de base à 1,125% après un pic de plus de trois semaines en séance à 1,128%. Son équivalent à deux ans est remonté à 0,503% (+6,2 points).

Le rendement des obligations britanniques à dix ans a atteint un sommet depuis juillet 2015 à 2,094% et celui à 30 ans un pic depuis mai 2016 à 2.361%.

Aux Etats-Unis, le rendement des Treasuries à dix ans gagne 11,3 points de base à 2,862%, soutenu notamment par les déclarations de Christopher Waller.

PÉTROLE

Le marché pétrolier est tiré principalement par la décision des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne d'interdire immédiatement plus des deux tiers des importations de pétrole russe et de mettre fin à celles-ci à 90% d'ici la fin de l'année.

Le baril de Brent et celui du brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI), qui ont touché un plus haut depuis le 9 mars, avancent respectivement de 1,87% à 123,95 dollars et de 2,09% à 117,17 dollars.

(Rédigé par Claude Chendjou, édité par Jean-Michel Bélot)

par Claude Chendjou