Paris (awp/afp) - L'économie française devrait croître de 1,1% en 2024 comme l'année précédente et bénéficier d'un effet JO, mais l'impact de l'incertitude politique post-législatives reste indéterminé, a indiqué mardi l'Insee, de quoi alimenter les inquiétudes sur des finances publiques très dégradées.

Retombées positives des Jeux olympiques, accélération de la consommation sur fond de baisse d'inflation, contribution du commerce extérieur... Le PIB bénéficierait de plusieurs soutiens cette année, malgré l'atonie de l'investissement.

"Cette prévision est bien sûr entourée d'un aléa majeur, qui est celui de la situation politique en France", a prévenu Dorian Roucher, chef du département de la conjoncture de l'institut statistique, lors d'un point presse.

Ainsi, la note de conjoncture publiée mardi tient compte des coupes budgétaires de plusieurs milliards d'euros actées par le gouvernement sortant pour redresser les finances publiques. Mais elle n'intègre pas les mesures que pourrait prendre un nouveau gouvernement, potentiellement de nature à modifier la politique économique du pays.

Note en sursis

Après son succès au second tour du scrutin dimanche, le Nouveau Front populaire (gauche) espère toujours gouverner seul malgré son absence de majorité absolue, une hypothèse rejetée par le camp présidentiel qui prône une coalition plus large.

"Notre politique économique donne des résultats positifs. Elle confirme que la politique de l'offre est la meilleure possible pour la France", a déclaré le ministre le ministre de l'Economie et des Finances sortant, Bruno Le Maire. Le gouvernement tablait sur une hausse du PIB de 1%.

"Revenir sur cette politique de l'offre pour basculer à nouveau sur une politique de la demande - 1981 puissance 10 - serait une faute économique irrémédiable", a-t-il estimé.

"Nous devons donc faire nos meilleurs efforts pour bâtir une majorité de projets", a-t-il ajouté auprès de journalistes. Parmi les compromis possibles, le ministre a cité la représentation des salariés au sein des entreprises ou une accélération de la réduction de l'écart entre salaires net et brut.

Ce climat n'est pas de nature à rassurer sur les finances publiques, déjà fragilisées par les crises et dont les risques de dérapage ont été amplifiés avec ces législatives anticipées.

Alors que la dette publique atteint environ 111% du PIB (presque 3.160 milliards d'euros à fin mars) et que le déficit s'est élevé à 5,5% du PIB en 2023, Bruno Le Maire a qualifié de "folie furieuse" la volonté de la gauche de "redistribuer de l'argent que nous n'avons pas".

"Il y a un risque sérieux sur la note française" si le rétablissement des finances publiques ne se poursuit pas, a-t-il ajouté, comme l'ont souligné de leur côté les agences Moody's et S&P Global.

L'écart entre le taux d'intérêt de l'emprunt de la France et celui de l'Allemagne, référence en Europe, demeure plus élevé qu'avant la dissolution, le 9 juin. Il devrait le rester "face au manque de clarté et de visibilité politique dans les semaines à venir", a estimé François Rimeu, stratégiste senior chez Crédit Mutuel AM.

Plus de pouvoir d'achat

En 2024, outre le commerce extérieur (+0,9%), l'activité devrait profiter d'une accélération de la consommation des ménages (+1,3%) grâce au reflux de l'inflation, la progression des salaires réels et la revalorisation de prestations sociales.

"Après deux années de vaches maigres, (...) les ménages réengrangent un peu de pouvoir d'achat" tout en continuant d'épargner plus qu'avant le Covid (17,1% de leurs revenus en moyenne), a expliqué Dorian Roucher.

L'inflation atteindrait 1,9% sur un an en décembre, contre 3,1% en janvier. En moyenne annuelle, elle s'établirait à 2,2%, un net repli par rapport à 2023 (4,9%), désormais surtout tirée par les services plutôt que l'alimentation.

L'investissement serait atone (-1,0%), encore pénalisé par des conditions de financement difficiles, malgré le léger assouplissement des taux amorcé par la Banque centrale européenne en juin.

Après une hausse de 0,2% au premier trimestre, le PIB augmenterait de 0,3% entre avril et juin.

Au troisième trimestre, les Jeux olympiques auraient un impact de 0,3 point sur la croissance, qui atteindrait 0,5%, grâce aux ventes de billets et de droits de diffusion ainsi qu'à un surcroît d'activité touristique.

Cet "effet ponctuel" disparaîtrait toutefois au dernier trimestre, où le PIB baisserait de 0,1% "par contrecoup", selon l'Insee.

afp/rp