(Répétition titre)

par Marc Joanny

PARIS, 7 novembre (Reuters) - Le Pacte de compétitivité présenté mardi par le gouvernement lui permettra surtout d'éviter un choc de chômage que la faiblesse attendue de la croissance et la dégradation de la rentabilité des entreprises rendaient inévitable en 2013.

"Les entreprises n'étaient plus en mesure de sauvegarder l'emploi au détriment des marges dans l'attente d'une reprise qui ne vient pas", déclare Olivier Passet, responsable des études économiques de l'institut Xerfi.

Il rappelle que les entreprises françaises ont consenti un effort exceptionnel de rétention d'emploi depuis le début de la crise au prix d'une dégradation de la productivité et par conséquent des marges et de leur rentabilité.

Graphique sur l'évolution de la productivité du travail en France :


Graphique sur l'évolution des taux de marge et d'investissement des entreprises non-financières en France :


Depuis 2008 et le début d'une crise à rechutes, les entreprises françaises du secteur marchand ont supprimé 275.000 emplois contre plus de 500.000 lors de la crise du début des années 1990.

Graphique sur les variations trimestrielles de l'emploi dans le secteur marchand en France depuis le début des années 1980 :


Le pacte présenté par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault prévoit un abaissement des coûts des entreprises de 20 milliards d'euros sous forme d'un crédit d'impôt indexé sur la masse salariale avec une montée en charge progressive sur la période 2013-2016. Les PME et les entreprises de taille intermédiaires pourront bénéficier de l'effet de trésorerie de cette mesure dès 2013.

Le financement sera assuré pour partie par une baisse des dépenses publiques mais aussi par la création d'une taxe écologique et une hausse de la TVA qui interviendra en 2014.

"Le formatage est assez bien vu : l'annonce d'une hausse de la TVA entraîne généralement des achats par anticipation, le gouvernement accroît ainsi ses chances de respecter la cible d'un déficit public de 3% du PIB et réduit l'impact du plan de rigueur sur la consommation", relève Olivier Passet.

"Il y aura là un effet de court terme sur l'emploi".

Avant l'annonce du plan, Xerfi tablait toutefois sur une contraction de l'activité de 0,4% l'année prochaine après une croissance de 0,1% cette année impliquant mécaniquement environ 465.000 destructions d'emplois dans le secteur marchand entre la mi-juin 2012 et la fin 2013.

Compte tenu de la montée en charge des emplois aidés - contrats d'avenir et contrats de génération - chiffrée par Xerfi à 45.000 mais aussi d'une hausse de la population active de 135.000 personnes sur la période, le nombre de chômeurs supplémentaires s'établissait à 560.000, portant potentiellement de taux de chômage à plus de 11,5% fin 2013, un record historique.

RAZ-DE-MAREE DU CHÔMAGE

Le gouvernement anticipe une croissance de 0,3% en 2012 et de 0,8% l'année prochaine pour laquelle sa prévision est deux fois plus élevée que celle du Fonds monétaire international et de la Commission européenne. (Voir et ).

François Hollande s'est par ailleurs engagé à inverser la courbe du chômage à l'horizon de la fin 2013.

L'absence de mesures permettant aux entreprises de desserrer leurs contraintes de trésorerie et de restaurer leurs marges, les auraient acculées à des ajustements beaucoup plus brutaux sur l'emploi.

Pour Xerfi, un simple rattrapage des pertes de productivité accusées depuis le début de la crise aurait impliqué 400.000 suppressions d'emplois supplémentaires et un taux de chômage culminant à 13%.

"Ce scénario d'un raz-de-marée du chômage s'éloigne un peu" avec le pacte de compétitivité, estime Olivier Passet.

Pour Jean-Christophe Caffet, de Natixis, la préservation de l'emploi est un des objectifs poursuivis de manière implicite par le plan gouvernemental au risque de brouiller le message.

"Le plan veut ménager la chèvre et le chou en essayant de redonner un peu d'oxygène en termes de profitabilité aux entreprises tout en préservant l'emploi", relève-t-il.

"Le traduction concrète est un dispositif tous secteurs confondus et ciblé sur les bas et les moyens salaires dont on sait que ce sont ceux pour lesquels la demande de travail des entreprises est très élastique au prix", poursuit-il.

"Soutenir l'emploi peu qualifié n'est pas l'essentiel, nous aurions préféré que soit suivie la recommandation du rapport Gallois et que le dispositif soit étendu aux salaires allant jusqu'à 3,5 smic, ce qui aurait permis d'inclure les salariés hautement qualifiés du secteur manufacturier", regrette-t-il.

Le montant du "crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi", prévu dans le cadre du plan Ayrault sera calculé dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille et leur régime fiscal, en fonction de leur masse salariale brute de un à 2,5 smic, ce qui représentera, selon le gouvenrement l'équivalent d'une baisse d'environ 6% du coût du travail. (Edité par Yves Clarisse)