* Le bilan de la BNS représente 80% du PIB du pays

* Un poids relatif quatre fois supérieur à celui de la BCE

* Le poids du bilan de la BCE inférieur à celui de la Fed, BoE

PARIS, 19 janvier (Reuters) - L'annonce par la Banque centrale européenne d'un programme d'assouplissement quantitatif (QE) lors de sa réunion de politique monétaire est donnée pour acquise et présentée comme l'une des justifications de l'abandon surprise par la Banque nationale suisse du plancher de 1,20 franc pour un euro instauré en septembre 2011.

La défense de ce seuil a conduit la BNS à acheter des actifs libellés en euros qui représentent autour de 40% du total de son bilan porté à 525 milliards de francs suisses, soit près de 80% du produit intérieur brut du pays.

Il s'agit du ratio le plus élevé des grands pays développés, supérieur même à celui qui prévaut au Japon, où l'amplification de l'assouplissement quantitatif annoncé par la banque centrale en novembre dernier devrait porter les actifs figurant au bilan de la BoJ à environ 75% du PIB à la fin de cette année.

La perspective d'une poursuite de l'affaiblissement de l'euro avec le lancement d'une politique d'assouplissement quantitatif par la BCE aurait contraint la BNS a accroître encore la taille de son bilan en achetant encore plus d'actifs libellés en euro pour freiner l'appréciation de sa devise et défendre le cours plancher.

La décision de la BNS semble indiquer qu'une politique d'expansion monétaire atteint ses limites lorsque la taille du bilan de la banque centrale se rapproche, voire excède, celle de son économie et que les pertes potentielles sur ses actifs menacent sa crédibilité et risquent de miner la solvabilité de l'Etat.

Le poids relatif du bilan de la BCE, à 22% du PIB, est sans commune mesure avec celui de la BNS et comparable, bien qu'inférieur, à celui de la Fed ou de la Banque d'Angleterre (25% et 27% respectivement).

Graphique sur la comparaison du poids relatif du bilan de la BNS et de la BCE dans l'économie:

Dans un entretien à Libération publié vendredi, Benoît Coeuré, membre du directoire de la BCE, a dit que le programme d'assouplissement quantitatif devrait être massif pour être efficace et que le Conseil des gouverneurs de la BCE prendrait en compte les expériences américaine et britannique pour décider du montant des titres qu'elle devrait acheter pour restaurer la confiance dans sa capacité à ramener l'inflation à un niveau inférieur à mais proche de 2%.

Porter le total de bilan de la BCE au même niveau relatif que celui de la Fed conduirait la BCE à augmenter son bilan d'environ 500 milliards d'euros, justement le montant évoqué pour le programme d'assouplissement quantitatif dont l'annonce est attendue jeudi.

Ce nouveau plan d'assouplissement monétaire laisse toutefois les investisseurs sceptiques quant à sa capacité à faire remonter l'inflation.

La comparaison avec la Fed et la Banque d'Angleterre suggère en effet que la BCE devrait frapper beaucoup plus fort pour être crédible.

Car l'institution de Francfort est dans une position beaucoup moins favorable que la Fed lorsque cette dernière a lancé son propre programme d'assouplissement quantitatif, parce que le soutien budgétaire est bien moindre au sein de la zone euro actuellement qu'à l'époque aux Etats-Unis.

Le déficit public au sein de la zone euro s'établit autour de 3% du PIB tous pays confondus contre un niveau de 12% aux Etats-Unis lors du lancement du QE par la Fed.

La Banque d'Angleterre a de son côté estimé que son premier programme d'assouplissement quantitatif, d'un montant de 200 milliards de livres, conduit entre mars 2009 et janvier 2010 et représentant 14% du PIB du pays, avait ajouté entre 0,5 et 1,5 point de pourcentage au taux d'inflation. Sur cette base, la BCE devrait gonfler son bilan de 1.300 à 1.500 milliards d'euros pour se rapprocher de son objectif.

Sources :

*Why did the SNB drop its peg ? The Silver Bullet. RNS. 16 janvier 2015.

*Vers un "QE" non neutre pour la Suisse. EcoWeek. BNP Paribas. 16 janvier 2015

* Le politique de la Banque nationale suisse est difficile à comprendre. Flash Marchés. Natixis. 16 janvier 2015.

* Interview de Benoît Coeuré publiée par Libération le 16 janvier, sur le site de la BCE : http://bit.ly/1IU1nDZ (Marc Joanny, édité par Marc Angrand)