Londres (awp/afp) - Les ventes au détail au Royaume-Uni ont nettement reculé en décembre sur un mois: même si la tendance semble toujours à la hausse depuis le vote pour le Brexit, cette mauvaise surprise pourrait présager un coup de frein à la consommation.

L'Office national des statistiques (ONS) a annoncé vendredi que ces ventes s'étaient repliées de 1,9% en décembre par rapport à celles de novembre, un repli qui a touché toutes les catégories mais surtout les magasins de vêtements et de chaussures (-3,7%) et les commerces spécialisés dans l'équipement domestique (-7,3%).

L'institut de statistiques a tenu à préciser que la tendance de fond de la consommation au Royaume-Uni restait positive. Lors de l'ensemble du quatrième trimestre par rapport au troisième, les ventes au détail restent ainsi en hausse de 1,2% grâce à un très bon début d'automne. Et sur un an, les ventes de décembre s'affichent en progression de 4,3%.

"La baisse de décembre doit être remise dans son contexte, le quatrième trimestre reste très correct", a souligné Howard Archer, analyste chez IHS.

L'activité s'est dans son ensemble bien tenue au Royaume-Uni depuis la décision des Britanniques de quitter l'Union européenne, lors du référendum du 23 juin. Le choc sur la confiance craint par nombre d'économistes ne s'est pas produit jusqu'à présent et la plupart des indicateurs sont au vert.

Les données préliminaires sur la croissance du produit intérieur brut du quatrième trimestre, attendues jeudi prochain, pourraient ainsi faire état d'une progression encore vigoureuse, de 0,5% d'un trimestre sur l'autre d'après un consensus d'analystes établi par Bloomberg, ce qui porterait la croissance pour l'ensemble de 2016 au niveau enviable de 2,1%.

Mais les chiffres publiés vendredi n'en ont pas moins désagréablement étonné. Les économistes sondés par Bloomberg s'attendaient à un simple effritement de 0,1%, d'autant que des études sectorielles et plusieurs grandes chaînes de supermarchés avaient fait état d'une activité très soutenue lors de la période cruciale de Noël.

Ces données semblent en outre marquer un coup d'arrêt au récent flot de statistiques encourageantes pour l'économie britannique, qui avaient rassuré les responsables du pays au moment où ils s'apprêtent à négocier les termes de sa sortie de l'Union européenne - en des termes plus "hard" que "soft" au vu du ton offensif adopté par la Première ministre Theresa May dans un discours fondateur mardi.

"L'ampleur de la baisse laisse penser que les dépenses des consommateurs pourraient être notoirement plus faibles en 2017, à mesure que les fondamentaux soutenant la consommation s'affaiblissent", a prévenu M. Archer.

- Les entreprises, autre inconnue -

L'un des enjeux de l'année qui s'ouvre pour l'économie britannique résidera dans le comportement des ménages, dont la progression du pouvoir d'achat pourrait être stoppée net par le bond attendu de l'inflation.

Après avoir longtemps oscillé autour de 0, cette dernière a décollé récemment et atteint 1,6% en décembre sur un an, reflétant la faiblesse de la livre vendue à tour de bras par des cambistes intrigués par les incertitudes du Brexit.

Les distributeurs qui se livrent une véritable "guerre des prix" depuis des années peinent à contenir les hausses de prix constatées par leurs fournisseurs, confrontés à un renchérissement des produits importés du fait de la dépréciation de la monnaie britannique.

"La chute des ventes en décembre est le premier signe indiquant que l'accélération de l'inflation et le ralentissement des créations d'emploi commencent à pousser les consommateurs à réduire leurs dépenses", juge Samuel Tombs de Pantheon Macroeconomics, pour qui le dynamisme des mois précédents s'expliquerait par des achats anticipés de clients inquiets de futures hausses de prix.

Au-delà, le comportement des entreprises constituera un facteur crucial pour l'économie du Royaume-Uni, au moment où certaines sociétés pourraient rechigner à investir avant le saut dans l'inconnu du Brexit. Plusieurs grandes banques ont confirmé ces derniers jours qu'elles allaient déplacer des milliers d'emplois du Royaume-Uni vers d'autres cieux.

afp/jh