PARIS, 22 novembre (Reuters) - Les établissements scolaires et les services préfectoraux doivent rester fermés ce lundi en Guadeloupe où les tensions persistent, tandis qu'une grève générale reconductible doit commencer en Martinique à l'appel d'une quinzaine d'organisations syndicales.

En Guadeloupe, la mobilisation contre le "pass sanitaire" et l'obligation vaccinale contre le COVID-19 pour les soignants a dégénéré en violences la semaine dernière, après l'appel à la résistance lancé lundi dernier par un collectif de syndicats et d'organisations citoyennes.

Le chef de l'Etat a décrit lundi la situation en Guadeloupe comme "très explosive", du fait selon lui du contexte local, des tensions "historiques" mais aussi de "certains intérêts qui cherchent un peu à utiliser ce contexte et l'anxiété" liée à la campagne de vaccination contre le COVID-19.

"Il faut pas du tout céder aux injonctions d'une toute petite minorité", a prévenu Emmanuel Macron, lors d'un point de presse en fin de matinée en marge d'un déplacement à Amiens (Somme), en soulignant que le taux de couverture vaccinale avait d'ailleurs beaucoup progressé dans l'île depuis cet été.

Selon le dernier bilan disponible de l'épidémie de COVID-19, publié mercredi dernier par l'Agence régionale de santé (ARS) de la Guadeloupe, le taux de protection des soignants libéraux s'établit à 85,3%, tandis qu'il oscille entre 85% et 100% pour les personnels des établissements hospitaliers de l'île.

"Nous devons accélérer la vaccination afin de protéger les plus fragiles mais aussi créer une immunité collective dans notre archipel", souligne l'ARS dans ce point de situation.

"RETROUVER LA QUIÉTUDE"

"Notre priorité c'est de continuer à convaincre que la vaccination est la meilleure protection et de ne rien céder au mensonge, au détournement d'information", a également insisté Emmanuel Macron en soulignant la nécessiter de "retrouve(r) la quiétude et l'ordre public".

Un discours comparable à celui tenu en début de matinée sur franceinfo par le maire de Pointe-à-Pitre, Harry Durimel (EELV).

"Il faut bien faire la distinction entre ceux qui revendiquent la levée de l'obligation vaccinale et ceux qui dans le contexte essaient de se faire entendre et de tout brûler pour être remarqués", a-t-il expliqué, en appelant à "trouve(r) une issue" car "il y a une grosse crainte que ça ne s'embrase".

"C'est une situation aussi de détresse sociale qui s'ajoute à cette crise sanitaire, à cette peur du vaccin et qui fait qu'on en est là aujourd'hui", a-t-il souligné.

Pour tenter de restaurer l'ordre, des renforts de police et de gendarmerie ont été dépêchés ce week-end depuis la métropole et un couvre-feu (entre 18h00 et 05h00, heure locale) a été décrété vendredi, sans permettre pour l'instant d'empêcher la poursuite des pillages et incidents nocturnes, la préfecture faisant par ailleurs état de plusieurs tirs d'armes à feu contre les forces de sécurité.

VERS UNE CONTAGION EN MARTINIQUE ?

"On a parlé de pillages, on a parlé de violences urbaines, c'est évidemment inadmissible. D'ailleurs il y a d'ores et déjà des interpellations et des gardes à vue", a souligné lundi sur Europe 1 Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'Intérieur.

Le gouvernement a également promis d'ouvrir le dialogue, avec une réunion prévue lundi à 18h00 autour du Premier ministre Jean Castex, en présence des ministres de la Santé Olivier Véran et Outre-mer Sébastien Lecornu, avec l'ensemble des élus de l'île.

Il faut "restaurer la paix publique (...) mais ça ne va pas suffire, il va falloir qu'il y ait un dialogue" pour restaurer la confiance avec l'Etat, a souligné Harry Durimel, en rappelant que les populations des Antilles restaient marquées par le scandale de la pollution à la chlordécone.

Ce pesticide toxique a durablement contaminé les sols après avoir été utilisé de 1972 à 1993 en Guadeloupe et en Martinique dans les bananeraies pour lutter contre le charançon, un insecte qui ravageait les plantations, et il est désormais soupçonné d'être responsable de nombreuses maladies, dont des cancers.

Face aux "violences urbaines, exactions et autres entraves à la circulation" compromettant la sécurité de déplacement, l'académie de Guadeloupe a annoncé dimanche dans un communiqué que l'accueil des élèves ne serait pas assuré ce lundi dans les écoles, collèges et lycées de l'île.

La préfecture de Guadeloupe a quant à elle annoncé sur Twitter que les services de la sous-préfecture à Pointe-à-Pitre et ceux de la préfecture à Basse-Terre seraient "exceptionnellement fermés le lundi 22 novembre 2021".

Alors que la situation ne donne pas de signe d'apaisement en Guadeloupe, un appel à une grève générale reconductible à partir de ce lundi a été lancé dans l'île voisine de Martinique par les six centrales syndicales de l'île, ainsi qu'une dizaine d'organisations professionnelles.

Le préavis de grève, déposé la semaine dernière, réclame notamment la fin de l'obligation vaccinale et des suspensions pour les soignants, une hausse des salaires et des minima sociaux, ou encore la prise en charge intégrale des tests de dosage sanguin de la chlordécone dans le sang (chlordéconémie). (Rédigé par Myriam Rivet, édité par Blandine Hénault)