* Le système actuel "peut induire" des actes inutiles

* 15% des financements grâce aux paiements au forfait

* Le forfait, un système largement utilisé en Allemagne

* Projet de loi présenté le 13 février en conseil des ministres.

PARIS, 29 janvier (Reuters) - La maîtrise des dépenses de santé passera par un changement des modes de rémunération des médecins qui seront de plus en plus rémunérés au forfait ou à la qualité, préconise le rapport sur Réforme du financement du système de santé remis mardi à la ministre de la Santé Agnès Buzyn.

Cette diversification des modes de financement à côté du traditionnel paiement à la consultation, présumé pousser à la consommation, concernera la médecine de ville et les hôpitaux, indique le rapport rédigé par une "task force" dirigée par Jean-Marc Aubert, un des directeurs de l'administration centrale.

Après consultations des professionnels de santé, la ministre de la Santé donnera en mars les orientations définitives. Elles seront pour partie intégrées à la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 qui sera discutée à l'automne prochain au Parlement. Une partie des dispositions figurera également dans la loi "Ma santé 2022" qui sera présentée le 13 février en conseil des ministres.

"Le système actuel de paiement à l'acte et de tarification à l'activité peut induire des risques de réalisation d'actes non pertinents, (...) voire inutiles", lit-on dans le rapport.

A terme, préconise le rapport, la part de la tarification à l'activité pour les établissements de santé ne devra plus représenter que 50% de leur financement, soit 40 milliards d'euros, contre 63% aujourd'hui.

Parmi les paiements alternatifs qui seront développés, les paiements au forfait devront représenter 15% des financements des hôpitaux.

Dans le paiement au suivi ou forfaitisé, le médecin touche la même somme, quel que soit le nombre de rencontres avec son patient dans le mois ou dans l'année.

Ces paiements au forfait sont présentés comme particulièrement adaptés à la prise en charge des pathologies chroniques (diabète, maladies rénales chroniques, maladies cardio-vasculaires, etc.) qui représentent 20 millions de patients en France et 60% des dépenses d'assurance maladie.

RÉDUIRE LES DÉLAIS D'ATTENTE

Pour éviter les stratégies de sélection des patients, le montant du forfait devra différer en fonction de l'état clinique du patient, précise le rapport.

La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) est plutôt opposée à l'idée du forfait, très utilisé par exemple en Allemagne, alors que les pathologies chroniques constituent l'essentiel de l'activité de nombreux médecins généralistes et spécialistes, indique son président Jean-Paul Ortiz.

"Jusqu'à présent, quand il y a une rémunération au forfait, les revalorisations tarifaires sont très difficiles à obtenir", souligne-t-il. "Nous restons très attachés à un paiement à l'acte", dit Jean-Paul Ortiz.

La CSMF préférerait un paiement à la qualité et à la pertinence. Ce paiement existe déjà pour les généralistes par exemple. S'ils effectuent un certain pourcentage de vaccinations de leurs clients contre la grippe ou de dépistages du cancer du sein, dans un objectif de prévention, l'assurance maladie leur verse un complément de rémunération annuelle dans le cadre de la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp).

Le rapport propose d'étendre progressivement ce type de financement à toutes les structures et notamment aux hôpitaux.

Mais attention, dit la CSMF, il faudra que les indicateurs utilisés soient élaborés par les médecins eux-mêmes.

Le rapport propose aussi de développer le paiement globalisé à la séquence de soins, concernant par exemple le financement d'une prothèse de hanche, qui fait intervenir de nombreux professionnels de santé. Reste à savoir qui recevra le paiement et comment il sera redistribué au sein du groupe d'intervenants.

Le rapport, qui envisage une mise en oeuvre progressive de la réforme sur quatre ans, propose aussi d'améliorer le financement de la psychiatrie pour réduire les inégalités entre les régions et réduire les délais d'attente.

Les régions recevraient un financement proportionnel à leur population et qui tiendrait compte de la proportion de leur nombre d'habitants en situation précaire. (Danielle Rouquié, édité par Yves Clarisse)