(Répétition avec précision sur la création d'un parquet national antiterroriste, dernier §)

PARIS, 9 mars (Reuters) - Le Premier ministre, Edouard Philippe, et la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, ont présenté vendredi à Reims les grands axes de la réforme de la justice, qui s'inscrira dans une loi de programmation présentée en conseil des ministres le 18 avril, selon l'entourage de la ministre.

Voici les principaux points de cette réforme, déclinée en cinq chantiers.

SIMPLIFICATION DE LA PROCÉDURE PÉNALE

L'enjeu est notamment d'accélérer des procédures aujourd'hui ralenties par de nombreuses règles et formalités.

- expérimentation d'un tribunal criminel départemental composé de magistrats professionnels, qui interviendra en première instance pour les crimes punis de 10 à 20 ans au lieu d'une cour d'assises, afin d'avoir un jugement plus rapide ;

- les cours d'assises resteront compétentes pour les crimes les plus graves punis de plus de 20 ans ou commis en récidive et pour les procès en appel ;

- extension du juge unique, notamment en appel ;

- développement de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ;

- possibilité de ne faire appel que du quantum de la peine ;

- possibilité de déposer les plaintes et de se constituer partie civile sur internet ;

- instauration d'un dossier pénal unique et numérique, du dépôt de la plainte au jugement ;

- simplification des modalités et seuils prévus par le code de procédure pour rendre les enquêtes plus efficaces ;

- mise en place d'amendes forfaitaires pour certains délits comme l'usage de stupéfiants ;

- possibilité pour le parquet de conclure une transaction financière avec un suspect sans passer par une homologation par un juge du siège.

SIMPLIFICATION DE LA PROCÉDURE CIVILE

L'enjeu est là aussi d'accélérer les procédures et de rendre prévisibles les délais.

- mise en place d'un mode unique de saisine au lieu des cinq actuels et possibilité de saisine en ligne ;

- possibilité pour le juge de statuer sans audience si les parties sont d'accord ;

- développement des règlements amiables et simplification de certaines procédures de divorce ;

- possibilité de fixer dès le premier rendez-vous judiciaire la date de fin de procès ;

- extension de la représentation obligatoire par un avocat mais maintien du seuil actuel de litiges portant sur au moins 10.000 euros ;

- reconnaissance du caractère exécutoire de la décision de première instance, pour une exécution rapide.

TRANSFORMATION NUMÉRIQUE

"C'est là le coeur du réacteur", a déclaré Nicole Belloubet le 15 janvier, en présentant ce chantier.

- triplement progressif, à partir de 2018, des débits des réseaux des cours d'appel, des tribunaux de grande instance et, à terme, en 2020, des 1.600 sites de la justice ;

- déploiement de plus de 12.000 smartphones sécurisés et d'ultraportables en cinq ans ;

- développement des systèmes de visio-conférence et mise en place d'une plateforme d'échange des documents volumineux ;

- ouverture en 2018 d'un portail d'accueil unique du justiciable, le SAUJ, pour permettre aux greffes de donner des informations sur toute procédure ;

- mise en place d'ici fin 2018 de la saisine en ligne de la justice pour toutes les procédures civiles ;

- demande d'aide juridictionnelle possible en ligne ;

- extension aux cours d'appel et chambres de l'instruction, à la gestion des scellés et des procès hors normes (plus de 500 parties) du système Cassiopée de traitement informatisé des procédures et d'échange d'informations entre les parquets, aujourd'hui déployé dans les tribunaux de grande instance.

SENS ET EFFICACITÉ DES PEINES

L'enjeu est notamment de réduire la surpopulation carcérale et de prévenir la récidive tout en assurant l'exécution effective de peines. Un volet présenté le 6 mars par le chef de l'Etat, Emmanuel Macron.

- suppression des peines d'un jour à un mois de prison ;

- possibilité d'exécuter les peines d'un à six mois en dehors d'un établissement pénitentiaire ;

- développement des peines alternatives, comme la détention à domicile sous surveillance électronique (bracelet) ou les travaux d'intérêt général, avec la création d'une agence dédiée à ces TIG et l'implication des collectivités publiques et du secteur privé dans leur mise en oeuvre ;

- fin de l'automatisation systématique de l'aménagement des peines entre six mois et un an de détention (le tribunal devra décider explicitement cet éventuel aménagement) ;

- suppression des aménagements de peine pour les condamnations au-delà d'un an de prison ;

- renforcement des enquêtes de personnalité pour mieux adapter les peines aux prévenus ;

- libération systématique sous contrainte aux deux-tiers de la plainte pour les peines de moins de cinq ans de détention, sauf avis contraire du juge d'application des peines ;

- développement du travail et de la formation en détention ;

- création d'unités de détention étanches dans près de 80 établissements susceptibles d'accueillir des détenus radicalisés ou violents, avec un objectif de 1.500 places dont 450 en 2018 ;

- création de 7.000 places de prison supplémentaires d'ici 2022 et engagement de la construction de 8.000 autres, pour livraison d'ici 2027 ;

- objectif : 80% de placements en cellules individuelles.

ADAPTATION DE L'ORGANISATION JUDICIAIRE

- aucune juridiction ne sera fermée ;

- tribunaux de grande instance et d'instance fusionnés ;

- création d'un parquet national antiterroriste dont le procureur pourra s'appuyer sur des magistrats délégués dans les parquets territoriaux.

(Emmanuel Jarry, édité par Sophie Louet)