(Bien lire "maire de Pau" au 12e paragraphe)

* Une nouvelle attaque contre le candidat de la droite

* Le centriste maintient le suspense sur une candidature

* Fillon assure ne rien redouter

par Sophie Louet

PARIS, 5 janvier (Reuters) - François Bayrou persiste dans sa stratégie de pression envers François Fillon, agitant la menace d'une rupture et d'une quatrième candidature à la présidentielle qui embarrasserait le chef de file de la droite pour le premier tour.

Le président du MoDem, dont les critiques sur le programme de l'ancien Premier ministre s'étaient quelque peu tues ces derniers temps, a vivement attaqué mercredi celui pour qui il évoque toujours de "l'amitié" en dénonçant "l'instrumentalisation politique" de sa foi chrétienne.

Face aux accusations de "casse sociale" dont il fait l'objet, François Fillon a assuré mardi soir sur TF1 qu'il mènerait ses réformes en "gaulliste" et "chrétien".

"Franchement, qu'est-ce que ça a à voir? Je suis croyant, je ne vais pas m'offusquer d'un mouvement de foi. Mais comment peut-on arriver à mélanger la politique et la religion à ce point, de cette manière déplacée?", a déclaré François Bayrou sur iTELE.

Cette rare référence du candidat à ses convictions religieuses, qu'il a toujours revendiquées, mais sans ostentation, a aussi résonné d'un singulier écho dans son camp, où des juppéistes se disent au mieux "intrigués" tandis que le député (Les Républicains) Henri Guaino a dénoncé jeudi une "faute morale". "La chrétienté n'est pas une clientèle électorale", a-t-il lancé sur LCI.

En affichant de nouveau son "gaullisme social", qui avait laissé place à une radicalité thatchérienne durant la primaire, François Fillon entend parer aux attaques de la gauche et de l'extrême droite mais sacrifie aussi aux exigences du rassemblement avec des juppéistes et des centristes, notamment, inquiets de ses propositions économiques.

UN ESPACE POLITIQUE RÉDUIT

Ce profil plus modéré aurait pu correspondre aux attentes du maire de Pau, qui s'était élevé après la primaire contre un projet "dangereux", "récessif" et d'"accroissement continuel des inégalités". Mais la "dérive" religieuse a laissé François Bayrou dans l'"incompréhension".

De là à y voir un motif de rupture définitive, l'entourage de François Fillon relativise. "Il ne se détermine pas par rapport à François Bayrou ni à d'autres candidats d'ailleurs".

Les deux hommes se sont vus début décembre et n'ont pas eu depuis d'échanges directs.

Le dirigeant centriste a démenti lundi sur RTL tout pacte secret avec le candidat, une information du Canard enchaîné qualifiée d'"intox".

Il reste déterminé, assure-t-il, à "bâtir un autre projet" qui sera l'objet d'un livre-programme dont la parution est prévu fin janvier, après la primaire de la gauche, avec pour mesure-phare "un droit à un semestre d'expérience professionnelle salariée". Puis viendra le temps de la décision sur une éventuelle candidature, "dans la première moitié du mois de février".

L'état-major de François Fillon assure ne rien redouter d'un possible cavalier seul - le maire de Pau n'a ni troupes ni budget - et souligne que l'entrée en lice d'Emmanuel Macron, plus menaçante pour le candidat de la droite, a réduit l'espace politique du "troisième" homme de la présidentielle de 2007 (18,57% au premier tour).

Un sondage Elabe réalisé fin novembre 2016 le créditait de 5 à 6% des intentions de vote.

"Il n'y a pas d'espace pour François Bayrou aujourd'hui : François Fillon prend au centre, pas forcément au MoDem mais à l'UDI et quant au centre-gauche, c'est Emmanuel Macron qui le capte", soulignait alors Yves-Marie Cann (Elabe).

Selon un autre sondage Elabe diffusé mercredi, 66% des Français sont opposés à une alliance entre François Fillon et François Bayrou. (Edité par Yves Clarisse)