"Au cours du mois écoulé, les enjeux politiques européens, l'actualité et le débat sur les mécanismes futurs de restructuration des dettes ont entraîné un regain de volatilité sur le marché des obligations d'Etat de la zone euro. Craignant que l'Etat irlandais ne soit pas en mesure de renflouer les banques si leurs pertes venaient à se creuser, les investisseurs sont devenus de plus en plus pessimistes à l'égard du secteur financier irlandais", note BNPP IP.

"Il aura fallu attendre le mois de mars 2009 pour que les marchés financiers commencent à s'inquiéter de l'ampleur de la dette souveraine dans la zone euro. Tous les regards se sont alors tournés vers la Grèce, le nouveau gouvernement ayant révélé que le déficit budgétaire était nettement plus élevé que précédemment annoncé."

"En dépit de l'élargissement des spreads qui a suivi, les autorités européennes ont mis du temps à trouver un terrain d'entente. Traumatisée par deux épisodes d'inflation galopante, l'Allemagne s'est dans un premier temps refusée à prendre le risque d'un dérapage inflationniste, tandis que la France, à l'instar d'autres pays, s'est montrée davantage disposée à apporter son soutien. Elections obligent, l'Allemagne a opté pour le statu quo, mais rien n'était possible sans sa participation. La crise grecque s'est donc envenimée et a commencé à faire tache d'huile. Lorsque les autorités se sont enfin décidées à intervenir, elles ont dû déployer des moyens nettement plus importants que ce qui aurait été nécessaire si elles avaient agi plus tôt."

"Dans l'intervalle, la crise s'est propagée à d'autres pays. Afin de rassurer les marchés, les autorités ont annoncé le 10 mai dernier la création d'un Fonds européen de stabilité financière (FESF) de 750 milliards d'euros, dont 500 milliards d'euros garantis par les Etats membres et une enveloppe du FMI de 250 milliards d'euros. Le 29 octobre, les dirigeants européens ont annoncé avoir accepté le principe d'amender le traité européen afin d'y inclure un nouveau mécanisme permanent de renflouement des Etats en crise. Cette initiative, applicable exclusivement aux nouvelles émissions d'emprunts d'Etat, traduit la volonté de la France et de l'Allemagne de voir les investisseurs privés, notamment les porteurs obligataires, assumer une plus grande part du coût des futurs renflouements."

"Depuis cette annonce, les marchés financiers interprètent ce nouveau dispositif comme un changement de cap, qui pourrait contraindre même les porteurs obligataires existants à supporter des décotes si l'Irlande ou d'autres Etats périphériques de l'Union européenne devaient être renfloués. Dans ce contexte, les primes de risque se sont sensiblement élargies, la Grèce, l'Irlande et le Portugal subissant l'essentiel des pressions vendeuses."

"Depuis le mois de septembre, les portefeuilles et fonds gérés par l'équipe Eurozone Core Fixed Income de BNPP IP affichent globalement une légère surpondération tactique (pourcentage d'allocation des actifs d'un portefeuille par rapport à celle de son indice de référence) sur les émissions souveraines irlandaises, italiennes, grecques et portugaises et sous-pondèrent en revanche la dette belge. Nos positions surpondérées concernent essentiellement les obligations d'échéance courte couvertes par le mécanisme de protection offert par le Fonds européen de stabilité financière."

"L'adoption du mécanisme proposé par l'Allemagne serait susceptible selon nous de déclencher une crise systémique. Par ailleurs, nous imaginons mal la Grèce, l'Irlande, l'Espagne ou le Portugal accepter un dispositif qui serait de nature à faire grimper leurs taux obligataires. Par conséquent, le débat devrait se poursuivre l'année prochaine, voire jusqu'à l'arrivée à échéance du FESF en 2013. En tout état de cause, notre analyse s'appuie sur la conviction que la volonté de rigueur budgétaire du gouvernement allemand ne se traduira pas par la mise en place de mesures susceptibles de menacer la configuration actuelle de l'Union européenne."

"Nous sommes toutefois conscients que les enjeux de politique intérieure, par exemple, la perspective des prochaines élections régionales en Allemagne, que doit gérer le gouvernement de coalition actuel risquent de compliquer le débat, ce qui serait source d'instabilité pour les marchés obligataires et pourrait entraîner un regain de volatilité des spreads des émetteurs de la zone euro. Dans le contexte actuel de taux bas, cette situation pourrait permettre aux investisseurs de profiter d'un effet de portage au travers notamment d'une exposition à des émissions d'échéance courte (et donc couvertes par le FESF) d'Etats périphériques de la zone euro."