par Wilfrid Exbrayat

CANNES, 26 mai (Reuters) - La compétition du 65e Festival de Cannes aura été marquée par un goût prononcé pour le mélange des genres mais c'est surtout dans les premiers jours que l'on trouve les films qui, parmi les 22 en lice, ont le plus impressionné la critique.

Les choix de la critique, comme à l'accoutumée, ne préjugent en rien de ceux que dévoilera le jury présidé par Nanni Moretti dimanche en début de soirée.

"Au-delà des collines", du Roumain Cristian Mungiu, et "Amour", de l'Autrichien Michael Haneke, restent en tête du classement de la critique internationale, au sein de laquelle figure un journaliste français, selon la grille publiée par la revue quotidienne Screen. (voir et )

Ce serait la seconde Palme pour Mungiu, cinq ans après celle de "4 mois, 3 semaines, 2 jours", ainsi que pour Haneke, trois ans après celle du "Ruban blanc".

Suivent "De rouille et d'os", de Jacques Audiard, "La chasse", de Thomas Vinterberg, "Cogan - La mort en douce", d'Andrew Dominik, et "La part des anges", de Ken Loach.

Screen a cessé sa publication jeudi, comme à son habitude. En revanche, le classement de la critique française, publié quotidiennement par la revue Le Film Français, a continué jusqu'à samedi.

La critique française met également en avant "Amour" - dont le réalisateur est autrichien mais les acteurs sont français et la langue du film également - puis "De rouille et d'os" et "Holy Motors", de Leos Carax, deux films français.

En revanche, "Holy Motors" est dans les profondeurs du classement de Screen. "Vous n'avez encore rien vu", d'Alain Resnais, le troisième film français qui était en compétition, figure en distant challenger.

Si le délégué général Thierry Frémaux s'est abstenu d'envoyer au feu un film d'animation, genre dont il a largement contribué à redorer le statut sur la Croisette, il a saupoudré les genres dans la sélection en compétition.

On trouvait la comédie douce-amère (La part des anges, Reality), le film d'amour (De rouille et d'os), le semi-documentaire (Paradis : Amour), le film inspiré du théâtre (Vous n'avez encore rien vu), l'inclassable (Holy Motors) ou le thriller.

RÉORIENTATION ADULTE

Sans surprise, c'est dans ce dernier genre que s'est située l'offre américaine, abondante cette année mais d'une qualité moyenne.

N'est pas Terence Malick qui veut. Ce dernier était seul à défendre la bannière étoilée l'an passé mais il n'en était pas moins reparti avec la Palme d'or.

Qui dit thriller dit violence mais le cinéma d'outre-Atlantique semble se complaire dans l'outrance sanglante.

"Des hommes sans loi", de John Hillcoat, "Cogan - La mort en douce", d'Andrew Dominik, "Paperboy", de Lee Daniels sont tombés, à l'occasion de quelques brèves scènes, dans ce travers.

C'est particulièrement dommageable pour Andrew Dominik, qui avait livré précédemment une magnifique relecture du genre du western avec "L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford".

En revanche, le dernier film américain de la compétition, et ultime film de cette dernière, a apporté un répit bienvenu. "Mud" est un film beau, parfois lumineux, peu susceptible toutefois de prétendre au précieux trophée.

Des films très attendus, montrés durant la seconde partie du festival, ont suscité la déception au pire, des avis mitigés au mieux.

Le premier cas est illustré par "Sur la route", trop conventionnelle mise en image du réputé inadaptable roman de Jack Kerouac par le Brésilien Walter Salles.

Le second est mis en évidence par une autre adaptation littéraire, celle du Canadien David Cronenberg du roman "Cosmopolis", de Don deLillo.

Ce dernier film a pour interprète principal Robert Pattinson, l'une des stars adulée des teenagers de la franchise suceuse de sang "Twilight". Son alter égo féminin, dans cette même franchise, Kristen Stewart, apparaît elle dans "Sur la route".

Un autre chéri des jeunes générations est Zac Efron, l'éphèbe obscur objet de désir de "Paperboy" et héros de la série de films "High School Musical".

Le 65e Festival de Cannes aura vu ainsi un trio de toutes jeunes stars, dont la popularité s'est bâtie sur du pur divertissement, tenter d'orienter leur carrière dans un sens beaucoup plus adulte. Avec des fortunes diverses, si l'on en juge par la seule prestation cannoise. (Wilfrid Exbrayat, édité par Jean-Baptiste Vey)