Bouygues propose à Vivendi 10,5 milliards d'euros en numéraire et une participation de 46% de l'ensemble constitué de Bouygues Telecom et SFR, qui serait ensuite mise en Bourse.

Bouygues, qui conserverait 49% du capital de la nouvelle société, estime en outre à 10 milliards d'euros les synergies potentielles du rapprochement. Il fait donc valoir que son offre valorise SFR à 19 milliards d'euros après synergies (14,5 milliards avant synergies).

Le groupe diversifié est seul en concurrence face à Numericable, filiale d'Altice, pour prendre le contrôle de SFR, la filiale télécoms que Vivendi a mise en vente dans le cadre de la scission de ses activités de médias et de télécoms.

Selon des sources proches des négociations, Numericable propose 11 milliards d'euros en numéraire à Vivendi ainsi qu'une participation de 32% dans la nouvelle société, un projet qui valoriserait SFR à 14,75 milliards d'euros.

Bouygues a précisé qu'il n'aurait pas besoin de recourir à une augmentation de capital pour financer l'opération ni de céder des actifs.

En Bourse, l'action fait un bond après ces annonces, tandis que le titre Numericable accuse le coup.

"Traditionnellement, dans un arbitrage de M&A, on vend l'acheteur et on achète la cible, mais ici la cible n'est pas cotée et visiblement Bouygues est choisi par le marché de préférence à Numericable car c'est un acteur déjà installé et plus crédible, qui pourra se renforcer par cette acquisition", commente Christian Jimenez, président de Diamant Bleu Gestion.

"L'annonce massue ce sont les synergies", estime un opérateur de marché, tout en estimant difficile de vérifier les chiffres avancés.

DES "MESURES" POUR GARANTIR LA CONCURRENCE

Vers 13h00, l'action Bouygues s'adjuge 7% à 30,7 euros, dans des volumes représentant près de 4,5 fois ceux réalisés en une séance entière sur Euronext ces trois derniers mois. Numericable recule de 8%.

"L'offre de Numericable semble démesurée par rapport à la situation financière du groupe", note Frédéric Rozier, conseiller de gestion chez Meeschaert Gestion Privée.

Vivendi gagne 1% et Iliad, maison mère de l'opérateur mobile Free qui a mis sens dessus dessous le marché français des télécoms depuis deux ans, s'adjuge 5,2%.

"Iliad devrait être vainqueur au final des mouvements de consolidation à venir", écrit Nomura dans une note. Le broker estime qu'une opération entre Numericable et SFR serait principalement neutre pour le marché et qu'une "consolidation impliquant Bouygues (avec SFR ou Iliad) serait très positif pour le marché".

Lors d'une conférence téléphonique, le directeur financier de Bouygues Philippe Marien a indiqué sans plus de précision que le groupe était prêt à envisager "des mesures" pour assurer la concurrence sur le marché français des télécoms et qu'il "serait en mesure d'éviter tout départ contraint".

"Les contacts avec l'Autorité de la concurrence n'ont pas commencé", a-t-il ajouté, précisant que l'offre n'aurait pas besoin d'être examinée par les autorités européennes de régulation.

A l'occasion de l'introduction en Bourse, Bouygues prévoit de lancer une augmentation de capital du nouvel ensemble Bouygues Telecom-SFR, à laquelle le groupe ne participerait pas.

Prié de chiffrer cet appel au marché, Philippe Marien a simplement répondu que la levée de fonds et les produits de cessions potentielles liées au rapprochement permettraient d'atteindre quelque trois milliards d'euros.

Philippe Marien n'a pas voulu dire si l'offre comprenait une clause de pénalité en cas d'échec des discussions.

(Avec Blaise Robinson, Alexandre Boksenbaum-Granier et Dominique Rodriguez, édité par Jean-Michel Bélot)