par Simon Carraud

PARIS, 25 décembre (Reuters) - Six mois de doute puis six mois de gloire. Voilà comment pourrait se résumer une année 2012 ambivalente pour le sport français qui aura goûté au bonheur olympique à Londres et connu la promiscuité des locaux de la police judiciaire de Nanterre.

Quoi de commun entre les sacres de Teddy Riner et de Lucie Décosse sur le tatami londonien, de Yannick Agnel et de Camille Muffat dans les bassins olympiques et européens ou de Sébastien Loeb sur les pistes de rallye? Ils remontent à six mois maximum.

Quoi de commun entre les échecs des Bleus aux Euros de football et de handball? Ils datent du début 2012. Une période d'autant plus noire pour le hand que s'est noué le scandale le plus retentissant de son histoire, d'habitude si confidentielle.

12 mai. Montpellier a d'ores et déjà acquis son 14e titre de champion quand, surprise, le club s'incline 31-28 sur le parquet de Cesson-Sevigné, alors à la lutte pour son maintien en première division. Signe avant-coureur d'un séisme à venir.

Soupçonnés d'avoir parié contre leur club, plusieurs joueurs, dont Nikola Karabatic, sont conduits à Nanterre sous l'oeil éberlué des journalistes après un match fin septembre, et mis en examen. En attendant l'épilogue de l'affaire.

Quelques mois plus tôt, en janvier, l'année avait mal commencé pour les handballeurs français, qui ont bouclé le championnat d'Europe en Serbie à la 11e place. Loin de leur statut de champions olympiques, du monde et d'Europe.

Contrairement à la troupe de Claude Onesta, les footballeurs emmenés dans les bagages de Laurent Blanc en Ukraine et en Pologne avaient beaucoup à prouver, deux ans après le psychodrame du Mondial en Afrique du Sud.

Mais, une fois encore, on a surtout parlé des débordements en dehors du terrain, en particulier des insultes de Samir Nasri envers un journaliste. Bilan de l'Euro: trois matches de suspension pour le milieu de terrain de Manchester City.

LA DÉCONTRACTION DU JUDOKA

Voilà pour le premier semestre qui s'est refermé le 23 juin, date du quart de finale perdu 2-0 par les Bleus contre les Espagnols, futurs champions d'Europe, sur la pelouse de Donetsk à l'extrême Est de l'Ukraine.

La tête au football, on n'avait quasiment pas vu à l'époque qu'une autre équipe de France, celle de rugby, était allée s'imposer aux antipodes, face à l'Argentine (49-10) à un petit millier de kilomètres de Buenos Aires.

On n'avait pas vu non plus que cette victoire dans l'indifférence générale en annonçait d'autres, cinq mois plus tard, lors de la tournée d'automne. Trois victimes expiatoires: les Samoa, l'Argentine et, surtout, l'Australie.

Quelques jours à peine après ce 23 juin charnière, une autre éclaircie est venue d'Helsinki. La France a fini sur la troisième marche au classement des nations aux championnats d'Europe d'athlétisme. Excellent augure à un mois des JO.

Car, année olympique oblige, les regards sont restés braqués pendant un peu plus de deux semaines sur la ville organisatrice, en l'occurrence Londres, où la France a tenu son rang habituel. Et même brillé d'un éclat inattendu dans quelques disciplines.

Trente-quatre médailles au total - c'est sept de moins qu'en 2008 -, mais onze en or - contre sept à Pékin. Et la France a fini au septième rang des nations sportives, soit trois rangs de gagnés.

Suffisant pour faire dire à la ministre des Sports Valérie Fourneyron au lendemain de la cérémonie de clôture que le bilan a été "extrêmement positif".

La délégation française a réalisé ce qu'on appelle, en bon jargon sportif, une "moisson" en un lieu bien précis: l'Aquatics Centre. Les nageurs y ont décroché quatre médailles d'or, sept au total. Du jamais-vu pour la natation hexagonale.

Une médaille d'or en 50 m nage libre pour Florent Manaudou, une autre pour Camille Muffat en 400 m nage libre, encore une autre pour Yannick Agnel en 200 m nage libre et, pour couronner le tout, le sacre des relayeurs en 4x100 m libre, c'est plus qu'il n'en fallait pour combler les dirigeants.

Quant à Teddy Riner, il a gravi l'Olympe en solitaire. Déjà cinq fois champion du monde à seulement 23 ans, il a ajouté la dernière ligne qui manquait à son palmarès chez les plus de 100 kg. Le tout avec, semble-t-il, une décontraction déconcertante.

LES LARMES DU BOXEUR

Dès la victoire acquise, le colosse s'est jeté aux pieds de son entraîneur pour les lui embrasser. Une façon de s'accrocher au plancher avant de monter tout là-haut, au sommet de l'Olympe en compagnie notamment du perchiste Renaud Lavillenie.

Mais pendant que les deux hommes faisaient une entrée en majesté au panthéon du sport français, d'autres enterraient leurs ambitions mortes dans les entrailles de Londres, cimetière à ciel ouvert pour athlètes en quête de gloire.

Car il y a eu des larmes versées, comme celles du boxeur Alexis Vastine, éliminé sans vraiment comprendre pourquoi, ou le désarroi contagieux du marcheur Yohann Diniz, disqualifié au bout de 50 km d'effort insensé.

Mais il y a eu en contrepartie des bonheurs qui valaient bien les années de sacrifice. Les anonymes Emilie Fer en kayak ou Julie Bresset en VTT se sont offert le même métal qu'Usain Bolt, sprinteur roi de ces Jeux.

Et les joueurs de tennis français, pour le moins discrets tout au long de l'année sur le circuit ATP avec quatre titres en tout et pour tout, ont quitté Londres bardés de deux médailles, l'argent et le bronze en double chez les hommes.

Il fallait pour ce conte olympique une fin heureuse. Rescapés du naufrage serbe, Nikola Karabatic et les siens se sont chargés de l'écrire en lettres d'or. Et ce métal scintillait d'autant plus qu'il avait couleur de revanche.

Oublié les turpitudes du premier semestre - avant le contrecoup de Nanterre -, les handballeurs ont retrouvé le chemin du succès, tout comme leurs collègues de l'équipe de France de football, confiée aux soins de Didier Deschamps.

Ces Bleus remaniés ont assuré le minimum en éliminatoires de la Coupe du monde 2014 face à des nations de seconde zone sur le plan footballistique, la Finlande et la Biélorussie, avant de réussir un excellent coup à Madrid, le 16 octobre.

Face à ces champions espagnols qui paraissaient si intouchables au mois de mai, ils ont remisé leurs complexes au vestiaire et arraché un match nul 1-1 dont l'histoire dira s'il a signé l'acte de naissance d'une équipe nouvelle.

Il n'était plus temps pour Sébastien Loeb de naître, mais plutôt de s'éclipser. Ce fut chose faite après un neuvième titre en rallye, le dernier avant sa pré-retraite. Inutile de dire qu'il s'agit là d'un nouveau record pour l'Alsacien.

D'autres ont pris leur retraite pour de bon. Parmi eux, Tony Estanguet, qui a rangé son canoë après un troisième sacre olympique, et Christine Arron, cinquième femme la plus rapide de tous les temps sur 100 m.

Les bonnes nouvelles n'ont pas manqué fin 2012. Les adieux non plus. (Edité par Chrystel Boulet-Euchin)