par Pascale Denis

Un an après avoir lancé son recentrage stratégique sur les marques de luxe et de "lifestyle", le groupe dirigé par François-Henri Pinault a bouclé jeudi la cession de Conforama au sud-africain Steinhoff pour un prix évalué, de source proche du dossier, à 1,62 milliard d'euros, légèrement supérieur aux 1,5 milliard généralement avancés par les analystes financiers.

Largement anticipée, l'annonce de cette cession n'a guère surpris le marché qui a cependant fraîchement accueilli la nouvelle. A la Bourse de Paris, le titre cède 2,0% à 124,40 euros vers 15h50, alors le CAC avance de 0,8% au même moment. "C'était déjà dans les cours, y compris le prix. C'est plutôt un non-événement", commente un trader.

"PPR a historiquement mieux réussi dans les cessions que dans les acquisitions", observe un analyste qui a souhaité garder l'anonymat, faisant référence au prix d'acquisition de Puma, "au plus haut de sa valeur", et à la "très belle cession" d'Yves Saint Laurent Beauté à L'Oréal pour 1,15 milliard d'euros.

Avec l'explosion des valorisations du secteur du luxe, dopé par un très vif rebond de ses ventes en 2010, des groupes comme le britannique Burberry ou l'allemand Hugo Boss, jugés encore accessibles il y a un an, sont aujourd'hui hors de portée, sauf à ce que PPR choisisse d'attendre et de vendre ses deux autres enseignes, la Fnac et son pôle de vente à distance Redcats.

IMPACT DILUTIF

"Une acquisition de Burberry paraît difficilement envisageable sans cessions additionnelles car elle mettrait sous pression la notation (BBB-) du groupe et irait à l'encontre de l'idée d'un désendettement", estiment les analystes de Natixis dans une note. La capitalisation boursière de Burberry atteint aujourd'hui 5,0 milliards de livres (près de 6,0 milliards d'euros).

Le ratio d'endettement net de PPR était de 39,5% des capitaux propres à la fin 2009.

PPR pourrait cependant avoir recours au crédit syndiqué de 2,5 milliards d'euros qu'il a lancé début décembre et présenté comme étant destiné à ses dépenses courantes.

Dans l'intervalle, une cession dont le cash ne serait pas réinvesti dans une acquisition pourrait avoir, selon un analyste, un impact dilutif d'environ 10% sur le bénéfice par action du groupe.

Conforma comptait pour près de 9% du résultat opérationnel et 18% du chiffre d'affaires de PPR en 2009.

La chaîne d'ameublement discount était, de l'avis des analystes, l'actif le plus facile à vendre. Elle a redressé ses ventes de 4,8% sur les neuf premiers mois de 2010 et a vu sa marge opérationnelle augmenter de 1,3 point au premier semestre à 3,7%.

"La cession de la Fnac est handicapée par la faible valorisation des enseignes de produits high tech et de produits culturels et celle de Redcats requiert une séparation entre les actifs se trouvant en France, aux Etats-Unis et en Scandinavie", notent les analystes de CM-CIC Securities.

CIBLES POTENTIELLES

Le secteur "lifestyle" des marques de sportswear ou de mode plus grand public offre moins de croissance et de marges que le luxe, mais un plus grand nombre de cibles potentielles.

Le récent changement de gouvernance de Puma - dont PPR détient 70% du capital et autour duquel il veut bâtir son pôle de marques de mode ou de sport grand public - laisse supposer, selon JP Morgan, que PPR pourrait vouloir "aller vite" dans son processus d'acquisition.

Les analystes estiment que la marque américaine Quiksilver cotée à New York et détenue à 19% par le fonds Rhône Capital, constitue une cible crédible, pour une valorisation d'environ un milliard d'euros.

"La société est opéable, elle est plus petite que Puma et elle a une forte notoriété mondiale", souligne l'un d'entre eux.

L'australien Billabong, spécialiste des vêtements de surf coté à la Bourse de Sydney, constitue lui aussi une proie attractive, bien que nettement plus chère.

Avec Juliette Rouillon, édité par Jean-Michel Bélot