par Sam Edwards

BARCELONE, 28 septembre (Reuters) - Les séparatistes catalans ont appelé leurs partisans à s'opposer aux efforts des autorités espagnoles pour empêcher la tenue du référendum de dimanche sur l'indépendance, préconisant des formes de résistance pacifique devant les bureaux de vote que la police a ordre de bloquer.

Les organisations populaires indépendantistes ANC (Assemblée nationale catalane) et Omnium demandent à la population de former des files d'attente si elle se heurte à des policiers bloquant l'accès aux bureaux de vote.

Certains redoutent que le mécontentement susceptible de naître si le scrutin ne peut se tenir normalement ne dégénère en des émeutes de rue.

A Madrid, les autorités ont décrété que le référendum était contraire à la Constitution et demandé aux forces de police de faire en sorte que personne ne puisse voter.

Le président de la Généralité, Carles Puigdemont, a jugé l'attitude de Madrid antidémocratique et a déclaré avoir des solutions de rechange pour garantir que le vote puisse avoir bel et bien lieu.

Pour ANC et Omnium, la priorité pour dimanche sera que la Catalogne donne au monde une image d'unité et de responsabilité, même si cela se solde par la formation de longues files d'attente de gens ne pouvant voter.

"Résistance passive, zéro violence(...). Si vous ne pouvez pas accéder aux bureaux de vote, vous ne devez en aucune façon répliquer par la violence", dit ANC dans un document interne distribué à ses membres.

"Par dessus tout, ayez présent à l'esprit que ce n'est pas une manifestation, mais une gigantesque file d'attente. L'image de millions de personnes faisant la queue avec un bulletin de vote à la main sera plus impressionnante", lit-on.

PIQUE-NIQUER OUI, VOTER, NON

ANC et Omnium ayant déjà l'habitude de mener des actions non violentes, le risque le plus fort de troubles pourrait plutôt venir de membres de groupes anarchistes étrangers qui, selon les journaux El Confidencial et El Espanol, sont déjà arrivés à Barcelone.

S'ils s'approchent de l'un ou de l'autre des 2.500 bureaux de vote prévus à travers la Catalogne, ils se heurteront à un déploiement de police renforcé.

Quatre mille policiers venus d'autres régions d'Espagne ont été déployés pour empêcher le référendum et maintenir la sécurité. Ils rejoignent sur place 5.000 policiers espagnols basés en Catalogne et 17.000 policiers catalans, les "Mossos d'Esquadra".

Les Mossos ont estimé que l'ordre de fermer les bureaux de vote augmentait le risque de confrontations entre manifestants et policiers, crainte partagée jeudi par deux experts des Nations unies.

"Nous craignons que cette consigne, et la rhétorique qui va avec, n'attisent les tensions et les troubles", ont déclaré David Kaye, rapporteur spécial pour la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression, et Alfred de Zayas, expert indépendant pour la promotion d'un ordre international démocratique et juste.

A l'issue d'une réunion de hauts responsables de la sécurité à Barcelone, le secrétaire d'Etat espagnol à l'Intérieur, José Antonio Nieto, a confirmé qu'il ne serait pas permis de voter dimanche mais que le gouvernement n'empêcherait pas la population de manifester.

"Dimanche, il sera possible d'exprimer un sentiment, de différentes façons, par un pique-nique ou une manifestation, mais il ne devra pas y avoir d'infractions à la loi", a-t-il dit lors d'une conférence de presse. (avec Julien Toyer à Madrid et Stéphanie Nebehay à Genève, Eric Faye pour le service français, édité par Gilles Trequesser)