par Alister Bull et Caren Bohan

"Mon engagement est de récupérer chaque centime dû aux contribuables américains", déclare le président américain dans un communiqué.

"Et ma détermination à y parvenir a été renforcée par les publications faisant état de bénéfices colossaux et de bonus indécents au sein de sociétés qui doivent leur survie au peuple américain", ajoute-t-il.

Désireux de prendre ses distances avec une sphère financière devenue la cible de la colère de l'opinion publique, le chef de l'Etat a accusé Wall Street d'être déconnectée des difficultés subies au quotidien par les Américains avec un taux de chômage atteignant 10%.

La taxe voulue par la Maison blanche doit permettre au Trésor de récupérer jusqu'à 117 milliards de dollars perdus lors du renflouement du secteur financier, réalisé pour l'essentiel dans le cadre du "Troubled Asset Relief Program" (Tarp) de 700 milliards de dollars (485 milliards d'euros) créé fin 2008.

Barack Obama a reconnu que l'essentiel des fonds publics dépensés par le gouvernement avaient été récupérés avant d'ajouter que ce n'était pas suffisant.

Il a invité les grandes banques à réduire les primes versées à leurs traders afin de pouvoir honorer cette "taxe de responsabilité financière", avant de préciser que l'objectif de cet impôt n'était pas de punir Wall Street mais d'empêcher de nouveaux abus ou excès.

Le renflouement des banques par le fonds Tarp a suscité la colère des contribuables en raison des excès de Wall Street. Et, cette colère est d'autant plus grande que les banques s'apprêtent à distributeur à leurs salariés des dizaines de milliards de dollars de bonus.

Le texte prévoit l'instauration d'une taxe de 15 points de base, soit 0,15%, sur les bilans des grands établissements disposant d'actifs dont le montant total dépasse 50 milliards de dollars.

Le dispositif devrait concerner environ 35 sociétés américaines et 10 à 15 filiales de groupes étrangers.

L'administration Obama espère ainsi récolter 90 milliards de dollars sur les dix premières années d'application de la taxe et elle estime qu'à terme, le dispositif couvrira l'ensemble des pertes liées au TARP, actuellement estimées à 117 milliards.

LES BANQUES AYANT REMBOURSÉ L'ÉTAT PAS ÉPARGNÉES

Des spécialistes du secteur estiment que la taxe risque de pénaliser les banques, tout en soulignant que son étalement sur dix ans devrait atténuer son impact.

"Cela met un grain de sable dans la machine. C'est encore un élément qui risque de peser sur le secteur mais il est étalé sur plus de dix ans donc cela n'aura pas tant que ça d'impact. C'est un petit vol sur les comptes des banques", explique Robert Albertson, stratège à Sandler O'Neill.

Le rebond des marchés financiers en 2009 et la volonté des banques de réduire l'influence de Washington sur la conduite de leurs affaires ont conduit ces derniers mois certains établissements à rembourser l'argent public reçu dans le cadre du TARP.

Mais ces groupes ne seront pas pour autant épargnés et devront s'acquitter de cette taxe, tout comme les établissements n'ayant pas reçus directement de fonds publics mais ayant bénéficié de l'effet stabilisateur du TARP sur l'économie, a précisé la Maison blanche.

L'assureur AIG, l'un des groupes dont le sauvetage a coûté le plus cher à l'Etat, devrait lui aussi être soumis à cette taxe. En revanche, les établissements de refinancement de crédits immobiliers Fannie Mae et Freddie Mac, qui sont sous la tutelle de Washington, en seront exonérés, de même que les constructeurs automobiles aidés par Washington.

Les modalités détaillées du projet ne seront pas dévoilées avant la présentation, début février, du projet de budget pour l'exercice fiscal 2011, qui débutera en octobre.

Mercredi, les dirigeants des plus grandes banques américaines ont défendu devant une commission d'enquête du Congrès leurs généreuses politiques de rémunération, tout en admettant que la régulation du secteur devait être renforcée.

Version française Alexandre Boksenbaum-Granier et Gwénaëlle Barzic