* Un extrait de rapport de décembre 2017 rallume la polémique

* Les familles de victimes demandent la fermeture de l'usine

* Leur association menace d'appeler au boycottage de Lactalis

PARIS, 30 novembre (Reuters) - Le groupe laitier Lactalis s'est de nouveau défendu vendredi de manquements dans la crise sanitaire qui a touché son usine de Craon (Mayenne), arrêtée de décembre 2017 à septembre dernier en raison de la contamination la salmonelle de lait pour bébé.

Ses dénégations n'ont cependant pas convaincu l'association des familles de victimes de Lactalis (AFVLCS), qui demande la fermeture définitive de l'usine et menace d'appeler au boycott de tous les produits du géant mondial du lait.

Une phrase extraite d'un compte rendu de la Direction générale de la Santé (DGS) du 27 décembre 2017, dont Reuters a obtenu copie, a relancé la polémique sur la gestion sanitaire de cette usine.

La DGS y fait état de "la mise en évidence" en novembre 2017, lors "d'autocontrôles environnementaux", de deux types de salmonelle, dont la salmonella agona responsable de plus de 200 contaminations de bébés entre 2005 et 2017, "dans les produits fabriqués par la tour 2" du site de Craon.

Ce constat a conduit à l'extension le 20 décembre 2017 des mesures de retrait ou de rappel décrétées au début du même mois à l'ensemble des produits fabriqués dans cette usine, rappelle la DGS. Jusqu'à cette date, les retraits ne concernaient que les produits fabriqués dans la tour n°1, définitivement condamnée, alors que la tour n°2 a repris sa production cet automne.

Dans un communiqué publié vendredi, Lactalis admet que des "autocontrôles dans l'environnement de la tour n°2" se sont avérés "positifs" mais nie qu'ils aient mis en évidence des salmonelles dans les produits fabriqués dans cette tour "avant le déclenchement de la crise début décembre (2017)".

BIENTÔT 250 PLAINTES ?

"En aucun cas il n'y a eu, avant l'arrêt de la tour n°2 début décembre 2017 de résultat positif de salmonelle dans les produits issus de cette tour n°2", écrit le groupe.

Lactalis dit avoir demandé à la DGS de "rectifier le compte rendu erroné de ses services".

Contactée, la DGS n'a pas souhaité commenter dans l'immédiat ces informations mais a fait savoir qu'elle faisait le point avec les services concernés.

Pour l'AFVLCS, les dénégations de Lactalis relèvent de "l'enfumage permanent" d'un groupe soucieux de ne pas perdre le marché très lucratif de l'alimentation infantile.

Si des produits issus de la tour n°2 ont effectivement été aussi contaminés, cela remet en cause les arguments avancés par Lactalis pour justifier la réouverture de l'usine de Craon, estime le président de l'association, Quentin Guillemain.

"Dans les jours qui viennent, nous ferons des actions dans des magasins et des pharmacies pour appeler les consommateurs au boycott de tous les produits de Lactalis, en appui à notre demande de fermeture de l'usine", a-t-il déclaré à Reuters.

Le parquet de Paris a ouvert en octobre une information judiciaire pour tromperie et blessures involontaires contre Lactalis.

L'avocate de l'AFVLCS, Me Jade Dousselin, a déclaré à Reuters avoir déposé jusqu'ici 130 plaintes de familles de victimes et s'attendre à ce que chiffre passe dans les prochaines semaines à 250. "Toutes les familles de victimes se constitueront parties civiles", a-t-elle ajouté. (Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)