Depuis le début de l'année, l'indice des 30 industrielles a gagné près de 11%, tandis que le S&P-500 a pris 9,4%, tutoyant ses plus hauts de 2007 après avoir progressé sur 10 des 11 dernières semaines.

La marche en avant de la Bourse américaine a certes ralenti. Sur les huit dernières séances, le S&P-500 n'a qu'une seule fois gagné plus de 0,5%. Des interrogations demeurent sur l'impact potentiel des négociations sur le budget fédéral ou sur la poursuite des rachats d'actifs massifs de la Réserve fédérale, qui réunit cette semaine son comité de politique monétaire.

Pourtant, les analystes et gérants continuent de voir un potentiel de hausse à Wall Street et se fondent en cela sur diverses mesures de valorisation.

Le ratio cours/bénéfices à un horizon de 12 mois s'établit ainsi à 13,5 actuellement, soit neuf points de base de moins qu'en octobre 2007, lors du dernier record du S&P-500, quand il était de 14,8.

"Cela signifie que les actions sont moins chères qu'au moment des derniers plus hauts, et en même temps les autres classes d'actifs comme les obligations sont beaucoup plus chères", remarque Paul Zemsky, responsable des allocations d'actifs chez ING Investment Management à New York.

"Nous sommes certes à des niveaux jamais atteints, mais il faut replacer les actions dans le bon contexte, et dans ce contexte-là elles ne sont pas chères du tout".

Le rendement du S&P-500 - le ratio cours/bénéfices inversé - s'établit actuellement à 7,1%, contre 6,41% pour l'indice US High Yield calculé par BofA Merrill Lynch. Autrement dit, les actions rapportent plus que les obligations "junk" à haut rendement.

L'actuel ratio cours/bénéfices se situe en outre sous sa moyenne historique de 14,8, établie à partir des données de Thomson Reuters qui remontent à 1968. Il faudrait que le S&P-500 monte jusqu'à 1.647 points pour égaler sa moyenne historique, soit une hausse de 5,6% au-dessus de son niveau actuel.

Les actions ont aussi pour atout de s'accompagner de dividendes en hausse alors que les taux d'intérêt stagnent près de leurs plus bas.

Sur le trimestre écoulé, le rendement moyen des dividendes pour les sociétés du S&P-500 a atteint 2,19%, contre 1,89% lors du dernier record de l'indice au quatrième trimestre 2007, selon Standard & Poor's. In 2012, 403 sociétés du S&P-500 ont versé un dividende, soit la proportion la plus élevée depuis 1998.

Par contraste, l'emprunt de référence à 10 ans du Trésor américain a un rendement actuel de 2%.

"RIEN QUI RESSEMBLE À UNE BULLE SPÉCULATIVE"

L'indice S&P-500 se négocie aussi en-deçà de sa valeur intrinsèque, autre mesure de la valorisation qui prend en compte la trajectoire de croissance attendue sur les 10 prochaines années ou davantage.

Selon les données de Thomson Reuters StarMine, le ratio de valeur intrinsèque de l'indice se situe à 0,85, ce qui signifie qu'il lui faudrait progresser de 15% encore pour être conforme à la trajectoire de croissance des résultats des entreprises.

Plus des deux tiers des entreprises se négocient à un cours inférieur à leur valeur intrinsèque, dont certaines des plus importantes. Apple, qui a dégringolé depuis ses records de l'automne dernier, se paie ainsi 28,2% sous sa valeur intrinsèque, Exxon Mobil 23,3% en-dessous et Bank of America 53,3% en-dessous.

D'autres valeurs, au contraire, sont surachetées à l'aune de cet indicateur. Google, en hausse de quelque 15% depuis le début 2013, est environ 16% au-dessus de sa valeur intrinsèque et pour Amazon.com ce dépassement atteint 85%.

"Il faut être sélectif. Si, de manière générale, on se trouve dans un marché haussier soutenu par les dividendes et résultats, certaines valeurs ont déjà atteint leurs pics", commente John Carey, gérant chez Pioneer Investment Management à Boston.

La hausse depuis le début de l'année a été alimentée par la politique accommodante de la Fed et de solides résultats de sociétés, deux facteurs que les investisseurs voient perdurer.

Malgré les réserves exprimées par certains de ses "faucons", le comité de politique monétaire de la Fed devrait maintenir cette semaine son engagement d'acheter 85 milliards de dollars par mois d'obligations du Trésor et de titres hypothécaires afin de soutenir la reprise.

Les derniers indicateurs, allant des ventes au détail aux créations d'emplois en passant par la production industrielle, montrent que l'activité économique se renforce, mais le taux de chômage toujours élevé, à 7,7%, devrait pousser la banque centrale à maintenir sa politique expansive.

Et si les deux précédents pics de Wall Street ont été suivis de récessions, l'une en 2000 après l'éclatement de la bulle de la nouvelle économie et l'autre en 2008 avec la crise du crédit, les intervenants ne voient pas d'équivalent aujourd'hui.

"Je ne vois rien qui ressemble à une bulle spéculative et il n'y a aucun signe de l'euphorie qui marque la fin d'un marché haussier", dit Ken Fisher, chez Fisher Investments à Woodside, en Californie.

Véronique Tison pour le service français

par Ryan Vlastelica