(Actualisé avec diplomate syrien § 7-9)

par Steve Holland

WASHINGTON, 30 avril (Reuters) - Barack Obama a mis en garde mardi contre tout jugement hâtif concernant l'utilisation par le régime syrien d'armes chimiques contre sa propre population, affichant une approche prudente sur ce dossier qui pourrait conduire les Etats-Unis à intervenir militairement.

En août dernier, le président américain avait prévenu son homologue syrien Bachar al Assad que l'usage d'armes chimiques représentait une "ligne rouge" pour Washington.

Lors d'une conférence de presse à la Maison blanche, le président américain a confirmé mardi l'usage d'armes chimiques en Syrie "mais nous ne savons pas comment elles ont été utilisées, quand elles ont été utilisées, qui les a utilisées" et "nous n'avons pas d'éléments de traçabilité établissant ce qui s'est exactement produit".

Réaffirmant que l'usage d'armes chimiques en Syrie équivaudrait au franchissement d'une "ligne rouge", il a ajouté qu'il faudrait du temps pour formuler un jugement sûr à ce propos. "Je dois m'assurer que j'ai les éléments en main", a-t-il dit.

Barack Obama a déclaré que le département de la Défense avait déjà préparé des "options" qui pourraient être mises à disposition, mais qu'il a refusé de préciser, en réponse à ce qui serait clairement une "escalade" et "une menace pour la sécurité de la communauté internationale, de nos alliés et des Etats-Unis".

Mais il a ajouté qu'un "jugement hâtif, sans preuve solide risquerait de mettre les Etats-Unis en position de ne pas pouvoir mobiliser la communauté internationale", allusion à la guerre d'Irak déclenchée unilatéralement par George Bush en 2003.

L'ambassadeur de Syrie à l'Onu a appelé mardi les Nations unies et les scientifiques à enquêter sur une attaque chimique perpétrée selon lui par les insurgés à Alep le mois dernier.

Il a ajouté qu'il ne se fiait pas aux accusations américaines et britanniques faisant état de recours à l'arme chimique dans d'autres endroits en Syrie.

Bachar Dja'afari a affirmé que des "groupes terroristes armés" avaient utilisé des sacs en plastique remplis d'une poudre, "probablement une sorte de matériel chimique" lundi contre la foule à Sarakeb, dans le nord du pays.

L'ONU CHERCHE À ENQUÊTER

Ces dernières semaines, le gouvernement du président Bachar al Assad et les rebelles syriens se sont mutuellement accusés d'avoir mené des attaques à l'arme chimique.

La semaine dernière, des responsables américains ont indiqué que la communauté américaine du renseignement avait conclu, "avec différents degrés de certitude", que des armes chimiques, notamment du gaz sarin, avaient été employées en Syrie.

Lundi déjà, Barack Obama avait fait part de ses inquiétudes sur le sujet lors d'une conversation téléphonique avec son homologue russe, Vladimir Poutine.

Les deux dirigeants ont décidé de rester en contact. Le secrétaire d'Etat américain John Kerry et le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, poursuivront le dialogue.

L'Iran estime aussi que l'usage d'armes chimiques dans les affrontements en Syrie marquerait une "ligne rouge", mais accuse les insurgés d'être le "principal coupable" ( ).

Une mission d'enquête de l'Onu dirigée par le Suédois Ake Sellström a été créée à la mi-mars sur le recours éventuel à des armes chimiques dans le conflit syrien, qui a fait plus de 70.000 morts.

Mais Damas refuse d'accorder aux inspecteurs, qui sont basés à Chypre et prêts à partir en Syrie dans un délai de 24 à 48 heures, un accès sans entraves aux sites suspects. (Rédaction de Washington, avec Yeganeh Torbati à Dubai et Michelle Nichols aux Nations unies; Jean-Stéphane Brosse et Jean-Loup Fiévet pour le service français, édité par Pascal Liétout)