(Complété avec Susan Rice §8-9)

par Louis Charbonneau et Oliver Holmes

NATIONS UNIES/BEYROUTH, 21 avril (Reuters) - Le Conseil de sécurité de l'Onu a adopté samedi à l'unanimité une résolution qui autorise un premier déploiement de 300 "bérets bleus" non armés pendant trois mois en Syrie pour contrôler l'application du fragile cessez-le-feu en vigueur depuis plus d'une semaine dans le pays.

La résolution 2043, fruit d'un compromis rédigé par la Russie et l'Union européenne, souligne que cette mission sera "soumise à l'évaluation par le secrétaire général de l'Onu (Ban Ki-moon) de l'évolution de la situation sur le terrain, notamment de l'arrêt des violences". Elle juge par ailleurs le respect du cessez-le-feu "clairement incomplet".

La mission élargie veillera également au respect de la mise en oeuvre des six points du plan de l'envoyé spécial conjoint Kofi Annan, qui prévoit notamment l'ouverture d'un accès humanitaire et un dialogue avec l'opposition en vue d'une "transition politique".

"L'adoption de cette résolution ne doit cependant pas nous faire oublier que, sur le terrain, la situation est toujours aussi inquiétante du fait du refus de Damas d'appliquer réellement ses engagements", a déclaré Gérard Araud, représentant permanent de la France à l'Onu.

Le chef de la diplomatie française Alain Juppé a pour sa part prévenu dans un communiqué: "Si l'on devait constater une nouvelle fois que le régime syrien ne respectait pas ses obligations, le Conseil de Sécurité devra examiner, dans les plus brefs délais, toutes les options envisageables."

L'ambassadeur de la Russie à l'Onu, Vitali Tchourkine, a également salué l'adoption de la résolution.

"L'objectif actuel est le respect intégral par tous les camps des dispositions de la résolution", a-t-il dit devant le Conseil de sécurité. "Tout écart dans l'interprétation ou toute déviation des dispositions est inacceptable."

A l'issue du vote, l'ambassadrice américaine à l'Onu Susan Rice a prévenu que les Etats-Unis pourraient ne pas prolonger la mission des observateurs en Syrie après les trois premiers mois si les violences se poursuivaient.

"Nous n'allons pas attendre 90 jours pour prendre des mesures contre le gouvernement syrien s'il continuer de violer ses engagements ou d'entraver le travail des observateurs", a-t-elle dit. "Notre patience est à bout."

NOMBRE D'OBSERVATEURS

Le secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon a appelé le gouvernement syrien et l'opposition à créer les conditions nécessaires au déploiement des observateurs. Il a ajouté souhaiter un accord rapide avec le gouvernement syrien sur l'utilisation de moyens aériens par la mission d'observation.

Mais le nombre d'observateurs, même revu à la hausse, ne satisfait pas tout le monde.

A commencer par la Turquie, frontalière de la Syrie et où se trouvent quelque 25.000 réfugiés syriens. En visite au Qatar, son Premier ministre, Tayyip Erdogan, a déclaré que les effectifs de la mission devaient être plus importants. "Il pourrait y en avoir des milliers parce que la Syrie en a besoin", a-t-il dit.

Le Conseil national syrien (CNS), principal groupe de l'opposition, a salué la résolution mais estimé lui aussi qu'un plus grand nombre d'observateurs devraient être déployés.

Pendant ce temps-là, huit observateurs de la mission avancée de l'Onu étaient en visite à Homs samedi. C'est la première fois depuis leur arrivée dimanche dernier en Syrie que des "bérets bleus" ont été autorisés à se rendre à Homs, épicentre de la répression du soulèvement contre Bachar al Assad.

Une vidéo postée sur internet les montre se déplaçant dans les rues jonchées de décombres entourés par une foule d'opposants. "Le peuple veut renverser le président", ont scandé les habitants, qui arboraient le drapeau de la résistance syrienne.

"Une équipe d'observateurs a été envoyée à Homs et a rencontré le gouverneur", a déclaré un porte-parole de l'Onu, Khaled al Masri. "Ils inspectent maintenant des quartiers de la ville", a-t-il ajouté.

"TERRORISTE ARME"

Mais des militants de Homs ont déclaré que les bombardements avaient cessé uniquement pour montrer que le gouvernement respectait la trêve et qu'ils reprendraient après le départ des observateurs.

"Il est très clair que le gouvernement syrien peut stopper s'il le souhaite à n'importe quel moment la violence dans le pays", a déclaré à Reuters Walid al Fares, un militant de l'opposition qui vit à Homs.

L'agence de presse officielle syrienne SANA a rapporté qu'un groupe "terroriste armé" avait fait exploser un oléoduc dans la province de Daïr az Zour, dans l'est du pays, près de la frontière irakienne.

Neuf déserteurs de l'armée ont également été tués samedi dans la province d'Alep par les troupes syriennes, a annoncé l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Des tirs et des explosions ont été entendus par des habitants de la ville de Karak, dans la province de Deraa, berceau de la révolution, selon la même source.

Le Haut Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés (HCR) a lancé par ailleurs un appel aux dons pour recueillir 84 millions de dollars qui permettront de venir en aide aux 60.000 Syriens réfugiés en Jordanie, au Liban, en Turquie et en Irak.

La répression violente de l'opposition au régime de Bachar al Assad a fait plus de 11.000 morts, selon l'Onu, des dizaines de milliers de prisonniers et des centaines de milliers de réfugiés depuis treize mois. (Hélène Duvigneau et Marine Pennetier pour le service français)