Bienne BE (awp/ats) - Après une nouvelle année record en matière d'exportations, l'horlogerie suisse table sur un exercice 2024 "modérément positif". La branche salue la relance de la voie bilatérale avec l'Union européenne (UE), selon Jean-Daniel Pasche, président sur le départ de la FH.

Les exportations dépasseront les 26 milliards de francs suisses cette année, sachant qu'au terme des onze premiers mois leur valeur avait déjà atteint 24,6 milliards. C'est pratiquement autant que sur l'entier de 2022 (24,8 milliards). "La croissance ne peut que ralentir", note toutefois Jean-Daniel Pasche dans un entretien à Keystone-ATS.

C'est ce qui s'est déjà passé avec l'inflexion survenue à compter du mois de juillet, avec un taux cumulé qui a ralenti de 12% à la fin du premier semestre à 7% à fin novembre. "La demande s'est normalisée après le rattrapage postpandémie", constate le président de la Fédération de l'industrie horlogère suisse (FH).

Ensuite, l'économie souffre des incertitudes géopolitiques, avec l'Ukraine et le conflit israélo-palestinien. "Si l'on y ajoute l'impact de l'inflation et du franc fort, on comprend mieux la perte de confiance", relève Jean-Daniel Pasche. La pharma mise à part, la branche s'en sort néanmoins mieux que d'autres secteurs exportateurs.

Croissance de l'emploi

Notamment que l'industrie des machines, le textile ou l'alimentaire. Avec le tassement attendu de la croissance, "à un haut niveau cependant", les marques horlogères font preuve de prudence. Ce qui peut affecter des sous-traitants ou des fabricants de machines. "Des ajustements pour éviter la constitution de stocks", précise-t-il.

"Et comme de tout temps, des différences existent entre entreprises du secteur", répète le président de la FH. Un secteur par ailleurs dont les effectifs ont bondi en 2023 pour dépasser la barre des 65'000 collaborateurs, une première depuis plus de 50 ans, selon la statistique de la Convention patronale de l'industrie horlogère.

L'analyse des exportations sur 11 mois cette année montre que seuls des 3 des 30 premiers marchés ont subi une baisse (Corée du Sud, Qatar et Bahreïn). Le trio de tête demeure, avec les Etats-Unis (+6,6% à 3,82 milliards) devant la Chine et Hong Kong, l'ancienne colonie britannique signant une hausse de 24% à 2,18 milliards.

Libre-échange capital

En revanche, le rattrapage ne s'est pas révélé aussi fort qu'escompté pour la Chine (+7,8% à 2,58 milliards de francs suisses), dont l'économie ralentit. Derrière, le Japon et le Royaume-Uni restent solides, avec la faiblesse de leurs monnaies qui favorisent les achats de montres suisses par des touristes s'y trouvant.

Deux pays qui rappellent combien l'horlogerie helvétique dépend de la bonne santé du libre-échange, elle qui exporte 95% de sa production. Ici, souligne Jean-Daniel Pasche, "le monde s'est complexifié depuis 10 à 15 ans", avec la multiplication des entraves au commerce: interdictions, certifications et autres marquages.

"D'où la nécessité d'être attentif et réactif, histoire d'éviter le manque d'harmonisation", insiste celui qui cédera son poste à Yves Bugmann à fin décembre. "Il y a partout davantage de réglementations qu'avant, y compris en matière environnementale". Dans ce contexte, la FH salue vivement le réchauffement des relations Suisse-UE.

Relance avec Bruxelles

L'annonce récente de l'approbation de part et d'autre d'un mandat de négociation ouvre la voie à des bilatérales III, avec la perspective d'une mise à jour des accords existants. Les Vingt-Sept membres de l'UE forment tout de même le premier débouché de l'industrie horlogère suisse, avec près de 25% de ses exportations annuelles.

Jean-Daniel Pasche espère encore un retour de la Suisse dans le programme de recherche Horizon Europe, important notamment pour le Centre suisse d'électronique et de microtechnique (CSEM), à Neuchâtel. "La recherche d'aujourd'hui, ce sont les emplois de demain", dit-il. Sans oublier la libre circulation des personnes.

Au-delà, le président de la FH attend une relance de l'accord de libre-échange avec l'Inde avant les élections générales prévues en mai dans le pays le plus peuplé de la planète. Tout comme la finalisation de celui avec le Mercosur en Amérique du Sud, marché comprenant le Brésil où les montres suisses s'exportent trop peu.

30 ans à la FH

"Le retour du président Lula et les premières déclarations de son homologue argentin Javier Milei sont prometteurs", a indiqué il y a peu à Keystone-ATS Henri Gétaz, secrétaire général de l'AELE sur le départ aussi. L'Association européenne de libre-échange est synonyme pour la Suisse d'une quarantaine d'accords avec des Etats tiers.

Quant au Royaume-Uni "après Brexit", il faut continuer de suivre l'évolution du libre-échange et intervenir en cas de nouvelles entraves. La FH y veille via son activité de "veille législative". Au total, Jean-Daniel Pasche aura passé 21 ans en tant président de la fédération, après en avoir été le directeur 9 ans durant.

ats/rp