LE CAIRE, 6 octobre (Reuters) - Bravant l'interdiction des autorités, les partisans des Frères musulmans ont quitté dimanche les faubourgs du Caire pour se rendre à la place Tahrir, dans le centre de la capitale égyptienne, où se tient un rassemblement de soutien au gouvernement mis en place par l'armée.

Un sympathisant de la confrérie islamiste a par ailleurs été tué par les forces de l'ordre lors d'une manifestation à Delga, une ville située à environ 300 km au sud du Caire, a-t-on appris de sources médicales et de sécurité.

Les affrontements ont débuté lorsque les manifestants favorables à la confrérie se sont approchés d'un commissariat de police. Les protestataires ont lancé des pierres contre les policiers, qui ont répliqué par des tirs à balles réelles.

Les autorités égyptiennes ont lancé samedi une sévère mise en garde aux Frères musulmans, soulignant que tout participant à une manifestation contre l'armée dimanche, jour anniversaire de l'offensive du Kippour en 1973 contre Israël, serait considéré comme un agent de l'étranger.

Des affrontements meurtriers se sont produits vendredi entre les forces de l'ordre et des partisans des Frères. Ces violences, à l'issue desquelles quatre personnes ont été tuées, étaient d'une ampleur sans précédent depuis le 14 août, date à laquelle deux campements de partisans de l'ancien président Mohamed Morsi, déposé par l'armée début juillet, avaient été violemment démantelés au Caire. ? La télévision égyptienne a diffusé dimanche après-midi des images de la place Tahrir et d'Alexandrie montrant la foule brandissant des portraits du chef d'état-major de l'armée, le général Abdel Fatah al Sissi, et agitant des drapeaux égyptiens.

"FÊTER L'ARMÉE"

A Alexandrie, les forces de sécurité ont dispersé une manifestation en faveur des Frères à l'aide de grenades lacrymogènes.

Au Caire, Islam Taoufik, journaliste et membre des Frères musulmans, a déclaré à Reuters que les manifestants étaient décidés à atteindre la place Tahrir.

"Ceux d'entre nous qui sont descendus dans la rue aujourd'hui veulent fêter l'armée qui pointait jadis ses armes contre l'ennemi, et non contre le peuple", a-t-il dit.

"Les personnes protestant contre l'armée le jour anniversaire de la victoire (6 octobre 1973) exerceront les activités d'un agent, pas d'un activiste", a déclaré samedi le porte-parole présidentiel.

"Il n'est pas convenable de passer d'un combat contre les autorités à un conflit avec la nation", a ajouté Ahmed al Mouslimani.

Samedi après-midi, un millier de partisans de Mohamed Morsi ont tenté de rejoindre les environs de la mosquée cairote, Rabaa al Adaouiya, siège de l'un des campements démantelés en août, mais des sources des services de sécurité ont rapporté qu'ils avaient été repoussés par la police, à l'exception d'une cinquantaine d'entre eux.

"Nous voulons entrer à Tahrir et à Rabaa parce que ces endroits ne sont pas réservés à ceux qui ont soutenu le coup d'Etat", a dit encore Islam Taoufik.

La répression en cours contre les Frères musulmans est l'une des plus violentes subies par la confrérie depuis sa création il y a 85 ans. Des centaines de ses partisans ont été tués par les forces de l'ordre et nombre de ses dirigeants sont en prison. (Hadeel Al-Shalchi, Pascal Liétout pour le service français)