La décision du procureur de Padoue, qui a été révélée lundi en fin de journée, a mis en évidence le marasme juridique auquel sont confrontées les familles homosexuelles en Italie. Elle intervient quelques mois après que le gouvernement de la Première ministre Giorgia Meloni a ordonné aux mairies de ne plus enregistrer les enfants de parents de même sexe.

L'Italie a légalisé les unions civiles entre personnes de même sexe en 2016 sous un gouvernement de centre-gauche, mais s'est abstenue de donner aux couples des droits d'adoption complets, craignant que cela n'encourage les grossesses de substitution, qui restent illégales.

En l'absence d'une législation claire sur la question, certains tribunaux ont statué en faveur de l'adoption par ces couples des enfants de l'autre, et les maires de certaines villes, dont Padoue, ont enregistré des naissances pour les deux partenaires issus d'unions de même sexe.

Cependant, le procureur de Padoue, Valeria Sanzari, a ouvert une procédure judiciaire ce mois-ci, affirmant que 33 certificats de naissance signés par le maire de la ville depuis 2017 devraient être modifiés, en supprimant le nom de la mère non biologique.

Un tribunal se prononcera sur ses demandes dans le courant de l'année.

L'initiative du procureur a indigné la communauté LGBTQ+ italienne.

"Ces enfants deviennent orphelins par décret", a déclaré Alessandro Zan, parlementaire de centre gauche, qui a milité en faveur des droits des homosexuels en Italie. "C'est une décision cruelle et inhumaine", a-t-il ajouté.

Le fait de retirer le nom d'un parent d'un acte de naissance crée à la fois des obstacles bureaucratiques et des tensions émotionnelles.

La mère dont le nom est supprimé ne pourra plus accomplir une série de tâches, notamment aller chercher son enfant à l'école sans l'autorisation écrite de son partenaire. En cas de décès du parent légalement reconnu, les enfants pourraient être retirés du domicile familial et devenir pupilles de l'État.

Pour retrouver ses droits parentaux, la mère non biologique doit se soumettre à une procédure d'adoption spéciale, longue et coûteuse.

Le gouvernement a défendu la décision du procureur.

"En Italie, le mariage n'existe qu'entre un homme et une femme et, par conséquent, seul le parent biologique est le parent dont le nom de famille peut être enregistré", a déclaré Luca Ciriani, ministre des relations parlementaires, à la radio RTL mardi.

La chambre basse italienne débat actuellement d'une loi qui ferait des couples qui vont à l'étranger pour avoir recours à une mère porteuse un délit, passible d'une peine pouvant aller jusqu'à deux ans de prison, même dans les pays où cette pratique est légale, comme les États-Unis ou le Canada.

Mme Meloni, qui se déclare ennemie de ce qu'elle appelle "l'idéologie du genre" et "le lobby LGBT", fait l'objet d'un examen de plus en plus minutieux à l'étranger en raison de son programme très conservateur pour les familles.

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a déclaré publiquement à Mme Meloni, lors d'un sommet des dirigeants du Groupe des Sept au Japon le mois dernier, que le Canada était "préoccupé" par certaines des positions prises par l'Italie en matière de droits des personnes LGBTQ+.