Washington (awp/afp) - La croissance de l'activité économique américaine a doublé au troisième trimestre, portée par la consommation des ménages, un nouveau pied de nez à la récession promise depuis des mois, et un argument supplémentaire pour Joe Biden, en campagne pour sa réélection.

La croissance du produit intérieur brut (PIB) des Etats-Unis s'est établie à 4,9% en rythme annualisé pour les trois mois de juillet à septembre, selon la première estimation du département du Commerce, publiée jeudi.

Ce rythme est plus fort encore que les 4,0 à 4,7% attendus par les analystes, selon plusieurs consensus.

"Je n'ai jamais cru que nous aurions besoin d'une récession pour faire baisser l'inflation", a réagi le président Joe Biden, dans un communiqué.

Comme à son habitude, le démocrate, qui espère être réélu à la Maison Blanche en 2024, a attribué le mérite de cette solide croissance aux mesures mises en place depuis son élection: "C'est un témoignage de la résilience des consommateurs et travailleurs américains, soutenus par les Bidenomics", surnom donné à sa politique économique.

Les ménages américains, en effet, ont continué de dépenser, alimentant ainsi le principal moteur de l'économie américaine.

Il leur a toutefois fallu consacrer une large part de leur budget aux dépenses en électricité, soins de santé et médicaments, services financiers et assurances. Ils ont aussi acheté des équipements informatiques, et ont voyagé.

"L'investissement immobilier a également rebondi", relève Rubeela Farooqi, cheffe économiste pour High Frequency Economics, dans une note.

Dégradation en vue

Les États-Unis privilégient la croissance en rythme annualisé, c'est-à-dire la croissance qui serait atteinte sur l'année entière si elle se poursuivait au même rythme pendant les trois trimestres suivants.

D'autres économies avancées comparent simplement chaque trimestre au précédent, ce qui donne 1,2% pour les Etats-Unis au 3e trimestre.

C'est une croissance "explosive", relève Kathy Bostjancic, cheffe économiste de la compagnie d'assurances Nationwide.

Au deuxième trimestre déjà, l'expansion de l'économie américaine avait surpris par sa vigueur, à 2,1% en rythme annualisé, et 0,5% par rapport au trimestre précédent.

Le ralentissement tant annoncé finira-t-il par arriver ?

La croissance devrait perdurer au quatrième trimestre, mais à un rythme "significativement" ralenti, prévoit Rubeela Farooqi, car les hausses de taux "devraient avoir un impact plus important sur les consommateurs et les entreprises à l'avenir".

Le chef économiste de l'Association des banquiers immobiliers (MBA), Mike Fratantoni, s'attend lui aussi à ce que la situation se dégrade, soulignant que "l'épargne accumulée pendant la pandémie continue de diminuer et que les salaires augmentent moins vite".

Menace du "shutdown", de nouveau

L'inflation réduit depuis deux ans le pouvoir d'achat des ménages américains. Et le remède pourrait se révéler pire encore, puisque la banque centrale américaine (Fed) veut faire volontairement ralentir la croissance, pour desserrer la pression sur les prix.

Pour cela, elle a relevé ses taux à 11 reprises depuis mars 2022. Ceux-ci se trouvent désormais au plus haut depuis 2001. Résultat: le coût des crédits se sont envolés, et les achats ont été freinés.

Pas assez jusqu'ici, cependant, pour arrêter la croissance.

Car les Américains ont des emplois, et donc des revenus. Et les ménages les plus aisés ont toujours de côté une partie de l'épargne amassée pendant le Covid.

Le fameux "atterrissage en douceur", qui ferait ralentir l'inflation sans faire flamber le taux de chômage ni faire plonger l'économie dans la récession, semble désormais à portée de main.

Mais de nouveau, les Etats-Unis sont sous la menace d'une paralysie de l'Etat fédéral, le "shutdown", dès le 17 novembre, si le responsable de la Chambre des représentants, fraîchement élu, Mike Johnson, ne parvient pas à faire voter un budget pour l'administration fédérale.

L'inflation était en septembre de 3,7% sur un an, selon l'indice CPI publié par le département du Travail. L'indice PCE, le baromètre préféré de la Fed, sera publié vendredi.

En 2022, la croissance du PIB des Etats-Unis avait ralenti à 2,1%, après avoir connu en 2021 son plus fort taux depuis 1984 (5,9%). Et 2020 avait vu le plus fort recul du PIB depuis 1946 (-3,5%), avec deux mois de récession à cause du Covid-19.

afp/rp