par Balazs Koranyi

FRANCFORT, 18 décembre (Reuters) - Il faudra attendre au moins jusqu'au printemps avant de voir la Banque centrale européenne (BCE) réévaluer ses perspectives en matière de politique monétaire, tandis que les attentes des marchés en faveur d'une réduction des taux d'intérêt en mars ou en avril sont prématurées, a déclaré lundi Bostjan Vasle, membre du Conseil des gouverneurs de l'institution de Francfort.

La BCE a laissé ses taux d'intérêt inchangés la semaine dernière et s'est prononcée en faveur d'une politique stable dans les mois à venir, alors même que les investisseurs faisaient pression pour qu'elle emboîte le pas à la Réserve fédérale américaine (Fed) en annonçant des baisses de taux en 2024 au regard du reflux des pressions inflationnistes.

Bostjan Vasle, également gouverneur de la banque centrale de Slovénie, rejette non seulement cette idée mais fait également valoir que les conditions actuelles de financement pourraient ne plus être suffisamment restrictives au regard du repli des rendements obligataires et des anticipations d'une baisse de 150 points de base des taux en 2024.

"Les attentes du marché concernant les baisses de taux d'intérêt sont prématurées à mon avis, à la fois en ce qui concerne le début des baisses et l'ensemble des mouvements ", a-t-il déclaré à Reuters.

"L'intégration par les marchés (d'une réduction des taux) a abaissé le niveau des conditions de restriction et ce biais accommodant récent intégré dans les taux d'intérêt n'est pas en accord avec la position appropriée pour ramener l'inflation à l'objectif (de 2%)", a-t-il dit.

Bostjan Vasle est considéré comme l'un des membres les plus conservateurs du Conseil des gouverneurs de la BCE chargé de la fixation des taux d'intérêt.

La semaine dernière, des sources proches des discussions au sein de ce Conseil ont déclaré à Reuters qu'une révision du message de la BCE avant le mois de mars était peu probable, ce qui rendrait difficile toute baisse des taux avant le mois de juin.

ATTENDRE LES DONNÉES DU 1ER TRIMESTRE

Les marchés considèrent actuellement qu'il y a une chance sur deux pour qu'une baisse des taux intervienne en mars, tandis que la probabilité d'une baisse en avril est évaluée à 100%. Ils prévoient également au moins deux réductions de taux d'ici juin.

Selon Bostjan Vasle, la BCE pourrait devoir patienter jusqu'au premier trimestre avant d'envisager une révision de sa position actuelle.

"Nous recevrons peu de nouvelles données avant la réunion de janvier, donc ce n'est pas avant mars ou avril que nous obtiendrons davantage d'informations sur l'inflation, la croissance, la politique budgétaire et le marché du travail", a-t-il déclaré.

"Nous devrons mieux comprendre les tendances sous-jacentes et nous aurons également besoin des nouvelles projections", a-t-il poursuivi.

Même si l'inflation en zone euro est tombée récemment à 2,4% sur un an, certains responsables de la BCE estiment qu'elle pourrait repartir à la hausse avant de redescendre à 2% d'ici le second semestre 2025.

"L'inflation pourrait repartir à la hausse dès le début de l'année, puis osciller dans une fourchette de 2,5% à 3% au cours du premier semestre de l'an prochain", a déclaré Bostjan Vasle. "Il convient donc d'attendre et d'observer la croissance des prix au cours de cette période et de réévaluer nos perspectives", a-t-il fait valoir.

La croissance des salaires est également une donnée incertaine, car les salariés, qui ont perdu une grande partie de leurs revenus réels dans un contexte d'inflation élevée ces dernières années, réclament des revalorisations.

Le marché du travail échappe toutefois aux prévisions attendues en comparaison des normes historiques en la matière puisqu'il reste tendu malgré le durcissement monétaire sans précédent de la BCE en zone euro.

"La majeure partie de la formation des salaires aura lieu au cours du premier trimestre et nous devons voir si les salariés demandent des compensations supplémentaires ou si les entreprises absorbent une partie de la croissance des salaires par le biais des marges", a déclaré Bostjan Vasle. (Reportage Balazs Koranyi; version française Claude Chendjou, édité par Kate Entringer)