* Un diagnostic sévère et 22 mesures principales

* Des décisions du gouvernement attendues mardi

* Le rapport sera appliqué très largement-Moscovici (Actualisé avec Pierre Moscovici)

par Elizabeth Pineau et Emmanuel Jarry

PARIS, 5 novembre (Reuters) - Louis Gallois propose de baisser les cotisations sociales de 30 milliards d'euros pour enrayer le déclin de l'industrie française, dans un rapport remis au gouvernement lundi, à la veille de l'annonce de premières mesures sur la compétitivité.

L'ex-PDG d'EADS et de la SNCF suggère de transférer 20 milliards d'euros de cotisations patronales et 10 milliards de cotisations salariales, jusqu'à 3,5 smic, sur la fiscalité (TVA, CSG, taxe carbone, fiscalité immobilière, niches, etc.).

"Je propose 22 mesures principales (...) pour arrêter la glissade, arrêter le décrochage, soutenir l'investissement", a-t-il dit à des journalistes. "C'est ce que j'appelle (...) le choc de compétitivité, qui est en fait un choc de confiance."

Selon le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, ce rapport "on va l'appliquer très très largement". Le président François Hollande a quant à lui promis des "décisions fortes" orientées prioritairement sur l'emploi.

Le gouvernement s'est néanmoins jusqu'à présent opposé à un transfert massif de cotisations sociales vers la fiscalité, pour protéger la consommation des ménages et donc la croissance.

"J'ai toujours dit que l'économie française n'avait pas besoin d'un traumatisme mais d'une thérapie, d'une thérapie en profondeur, d'une thérapie dans la durée", a ajouté Pierre Moscovici sur BFM TV.

Un effort de 30 milliards d'euros de redressement budgétaire étant déjà programmé pour 2013, "il faut aussi avoir en tête le pouvoir d'achat des ménages", a-t-il ajouté, promettant des mesures pour baisser le coût du travail, sans plus de précision.

Louis Gallois plaide pour que ce transfert soit effecuté sur un an ou deux "si les contraintes des finances publiques ou la volonté de limiter l'impact sur la demande des ménages l'imposaient", mais pas plus pour ne pas diluer ses effets.

Le gouvernement s'étant prononcé contre une hausse du taux normal de TVA, l'essentiel de l'effort (environ les deux tiers, soit 20 à 22 milliards) devra être financé par une hausse de la CSG, estime-t-il.

VERS UN CRÉDIT D'IMPÔT ?

Selon le site internet de l'hebdomadaire Le Point, le gouvernement, qui se réunira mardi en séminaire sur le sujet, envisage de recourir à un crédit d'impôt pour réduire les charges des entreprises d'une vingtaine de milliards d'euros.

Le Point croit aussi savoir qu'il serait prêt à revenir partiellement sur sa décision de ne pas augmenter le taux normal de TVA, qui pourrait être porté de 19,6% à 20% en 2013. (voir )

"Je ne commente pas les fuites ou les rumeurs", a dit Pierre Moscovici. Pour le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg : "Les décisions ne sont pas finalisées. Nous les rendrons demain. Nous travaillons sur toutes les hypothèses."

Louis Gallois part d'un diagnostic sévère du décrochage accéléré de l'industrie française, dont la part dans la valeur ajoutée de l'économie française est tombée à 12,5% en 2011, ce qui place la France au 15e rang de la zone euro.

"L'industrie française atteint aujourd'hui un seuil critique au-delà duquel elle est menacée de déstructuration", écrit-il. (voir ).

Il souligne que la baisse de 10 milliards des cotisations salariales limitera l'impact d'une hausse de la CSG sur le pouvoir d'achat des salariés. En tout état de cause, il renvoie à la concertation sur le financement de la protection sociale les modalités de ce transfert. (voir Propositions )

Il estime également que la réduction de la dépense publique devra, à terme, prendre pour une part le relais de la fiscalité.

En avançant le chiffre de 30 milliards, soit la moitié de la perte de marge des entreprises françaises depuis 2001, il dit vouloir concilier à la fois une "masse critique suffisante", les contraintes de la conjoncture et "la capacité d'absorption du système fiscal dans un délai court".

Dans son esprit, si la baisse de charges sociales doit apporter un "ballon d'oxygène" aux entreprises, elle doit être clairement orientée vers l'investissement et l'innovation, non vers la distribution de dividendes ou des hausses de salaires.

Pour faciliter l'autofinancement, il propose aussi une baisse limitée de l'impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis et une taxation des rachats d'actions, qui ne sont selon lui que des distributions de dividendes "déguisées".

Il suggère des mesures de stabilisation des règles juridiques et fiscales, d'amélioration des relations entre grandes entreprises et sous-traitants et de soutien à l'innovation, ainsi que la poursuite des recherches sur les techniques d'exploitation des gaz de schistes.

Il propose en outre une amélioration de la gouvernance des entreprises, comme l'octroi automatique d'un droit de vote double aux actionnaires gardant leurs actions au moins deux ans.

Pour faire face aux besoins de fonds propres d'entreprises de taille intermédiaire (ETI), il prône notamment la création, au sein de la nouvelle Banque publique d'investissement (BPI) d'actions sans droit de vote mais mieux rémunérées.

Ce rapport a reçu le soutien de l'opposition de droite et a été critiqué par le Parti communiste, tandis que les organisations patronales invitaient le gouvernement à agir vite. (voir REACTIONS ) (Avec Julien Ponthus à Vientiane et Service France, édité par Yves Clarisse)