Milan (awp/afp) - Le géant laitier français Lactalis a échoué dans sa tentative de contrôler totalement sa filiale italienne Parmalat et de la retirer de la Bourse de Milan, ne parvenant pas à atteindre le seuil fixé de 90% du capital.

Lactalis, qui contrôlait avant cette OPA 87,74% de Parmalat via Sofil, n'a obtenu que 34,365 millions d'actions, soit 1,85% du capital, selon des documents publiés mardi par la Bourse de Milan.

Plusieurs actionnaires minoritaires, dont le fonds Amber Capital, avaient dénoncé le prix proposé par Lactalis, le jugeant trop bas.

Etrangement, cette OPA a été menée à un prix inférieur au marché, ce qui a limité l'intérêt des investisseurs.

En effet, après l'annonce par Lactalis de cette opération le 27 décembre, le titre Parmalat a bondi.

Conséquence: quand l'OPA a débuté le 6 février, l'action évoluait autour de 3 euros, avant de baisser à 2,9 euros, alors même que Lactalis n'offrait que 2,8 euros. Les actionnaires gagnaient ainsi plus en vendant leurs actions sur le marché.

Face aux faibles adhésions récoltées et aux critiques exprimées par certains actionnaires minoritaires et certains courtiers ou analystes, comme Kepler Cheuvreux, Lactalis s'est finalement résolu le 9 mars, après quatre semaines d'opération, à augmenter à 3 euros le prix offert.

Mais, porté par cette augmentation, le titre est alors passé au-dessus de 3 euros.

Lactalis, qui avait prolongé l'opération jusqu'au 21 mars, avait souligné que le nouveau prix représentait une prime de 16,2% par rapport au 23 décembre et de 26,2% sur la valeur moyenne des 12 mois précédents.

Si certains analystes comme ceux de Kepler Cheuvreux ont validé le nouveau prix proposé, cela n'a pas été le cas des fonds Gabelli et Amber Capital, qui se sont refusés à remettre leurs actions.

- Tensions avec les minoritaires -

Ceci représente "une victoire du marché, qui a démontré que le prix de 3 euros n'était pas un prix juste", a déclaré à l'AFP Arturo Albano, représentant d'Amber Capital.

Selon Amber, qui détient 4% de Parmalat, le titre "pourrait valoir entre 3,8 et 4,5 euros".

Amber met en avant le contentieux avec Citigroup, auquel Parmalat réclame 1,8 milliard d'euros en l'accusant de complicité dans les événements ayant mené à sa banqueroute en 2003.

En cas d'accord après l'OPA, les actionnaires minoritaires seraient restés lésés, a argumenté Amber.

D'après ce fonds, Parmalat a aussi de fortes capacités à générer de l'argent dans le futur, avec les sociétés acquises entre 2014 et 2016 au Brésil, en Australie, au Mexique, alors que celles-ci lui ont coûté environ 1 milliard d'euros.

Lactalis avait estimé pour sa part que l'opération offrait "aux actionnaires une opportunité unique de monétiser leurs investissements à un niveau de prix jamais atteint en quasi dix ans".

Lactalis s'était offert une vaste campagne publicitaire dans les journaux italiens, en tentant de jouer sur l'inquiétude. "Evite le risque de rester actionnaire d'une société non cotée en Bourse", affirmait l'encart, en invitant l'actionnaire à contacter "immédiatement" sa banque.

Il peut désormais choisir de rester à 87,74% du capital et de ne pas récolter les actions remises, ou décider de les prendre et de les payer.

Le géant français - dont "l'opacité" est critiquée régulièrement par les actionnaires minoritaires mais aussi par des observateurs plus neutres - a pris le contrôle de Parmalat en 2011 via une OPA hostile, qui avait suscité un vif émoi en Italie et que Rome avait tout fait pour bloquer.

Pour justifier sa volonté de retirer Parmalat de la Bourse, Lactalis avait expliqué qu'il souhaitait "lui donner une nouvelle dynamique qui pourrait être plus facilement et plus efficacement atteinte sur le long terme sans faire appel au marché actions".

L'objectif de l'opération, avait estimé un analyste, était de lui permettre de "gérer librement l'entreprise, sans devoir rendre compte au marché".

Depuis 2011, le groupe a en effet connu régulièrement de fortes tensions avec des actionnaires minoritaires.

Amber Capital a ainsi accusé des membres du conseil d'administration de Parmalat d'avoir agi en privilégiant les intérêts de Lactalis au détriment de ceux du groupe italien. En cause notamment: le rachat par Parmalat en 2012 d'une filiale de Lactalis, LAG (Lactalis American Group), à un prix jugé trop élevé.

afp/rp