* Le "Cavaliere" également déclaré inéligible à vie

* Ces peines ne seront effectives qu'après les procédures d'appel

* Cela pourrait prendre plusieurs années

* Berlusconi crie à la "persécution" et compte "résister" (Actualisé § 7-8 avec réaction de Berlusconi)

par Silvia Aloisi

MILAN, 24 juin (Reuters) - Silvio Berlusconi a été condamné lundi à Milan à sept ans de prison et à une peine d'inéligibilité à vie dans l'affaire du "Rubygate".

Ces condamnations ne seront effectives qu'une fois épuisées les deux possibilités d'appel, ce qui pourrait prendre plusieurs années.

L'ancien président du Conseil italien était poursuivi pour incitation à la prostitution de mineure et pour abus de pouvoir. Le tribunal de Milan composé de trois juges, toutes des femmes, l'a reconnu coupable dans les deux volets de l'affaire.

Ce verdict fait suite à une procédure de deux ans à l'encontre du "Cavaliere", âgé de 76 ans, accusé d'avoir eu des relations sexuelles tarifées avec la danseuse marocaine Karima El Mahroug, dite "Ruby", alors que celle-ci était encore mineure.

Silvio Berlusconi était également accusé d'abus de pouvoir pour avoir fait libérer "Ruby" en mai 2010 dans une affaire concernant le vol d'un bracelet d'une valeur de 3.000 euros.

Niccolo Ghedini, avocat de Berlusconi, a dénoncé un jugement "complètement illogique" et aussitôt annoncé qu'il faisait appel.

De son côté, l'ancien président du Conseil a dénoncé dans une déclaration une sentence d'"une violence invraisemblable" en se disant "persécuté".

"Une sentence invraisemblable a été rendue avec une violence inédite jusqu'ici, pour essayer de m'éliminer de la vie politique de ce pays. Je compte résister à cette persécution parce que je suis totalement innocent et parce que je ne veux en aucun cas renoncer à mon combat pour faire de l'Italie une nation véritablement libre et juste".

Le parquet avait requis six ans de prison et l'inéligibilité à vie. Sur ces six ans, cinq ans étaient requis pour l'abus de pouvoir et un an pour incitation à la prostitution de mineure.

Plusieurs membres du Peuple de la liberté (PDL), le parti du "Cavaliere", souhaitent que Berlusconi retire son soutien au gouvernement de grande coalition droite-gauche dirigé par Enrico Letta, ce qu'il pourrait être tenté de faire s'il estime que ce gouvernement ne lui apporte aucune protection.

"C'est écoeurant, honteux", a réagi l'une des fidèles de Berlusconi au sein de la direction du PDL, Daniela Santanche, devant le siège du tribunal, tout en affirmant que ce jugement n'aurait pas de conséquences sur le fonctionnement du gouvernement. "Cela n'a rien à voir", a-t-elle dit.

"SOIRÉES BUNGA BUNGA"

Les faits reprochés à l'ancien président du Conseil se seraient déroulés alors qu'il était encore chef du gouvernement, dans le cadre de soirées organisées dans sa villa d'Arcore, près de Milan.

L'examen du portable de Ruby a montré que la jeune femme avait passé au moins sept nuits à Arcore entre février et mai 2010, selon le parquet.

Ruby a toujours nié s'être prostituée et avoir eu des relations sexuelles avec Berlusconi. Des témoins assurent toutefois qu'elle faisait partie des habitués des soirées "bunga bunga".

Après le vol du bracelet, Berlusconi était intervenu auprès de la police en prétendant que Ruby était une petite-nièce du président égyptien Hosni Moubarak.

Silvio Berlusconi se dit quant à lui victime de magistrats motivés par des considérations politiques.

Une cour d'appel de Milan a confirmé en mai une peine de quatre ans de prison, dont un ferme, prononcée à son encontre en première instance pour les conditions d'achat frauduleuses de droits télévisés par son empire médiatique Mediaset. Il s'est pourvu en cassation.

L'ex-président du Conseil, revenu dans le jeu politique à la faveur des élections législatives de février sans pour autant revenir personnellement au gouvernement, a en outre été déclaré inéligible pour cinq ans dans le cadre de cette affaire Mediaset.

Bien qu'il ait assuré Enrico Letta de son soutien, de nombreux observateurs s'attendent à le voir quitter la coalition et provoquer de nouvelles élections qui pourraient le ramener à la tête du gouvernement, plutôt que de risquer une condamnation définitive. (avec Gavin Jones; Jean-Philippe Lefief, Guy Kerivel et Jean-Loup Fiévet pour le service français)