par Matthieu Protard et Julien Ponthus

Dexia, sauvé de la faillite en septembre 2008 grâce à une recapitalisation d'urgence de 6,4 milliards d'euros, est sous le coup d'un examen de la Commission européenne sur les aides publiques dont elle a bénéficié au plus fort de la crise.

L'établissement bancaire, dont la Caisse des dépôts (CDC) détient 17,61% du capital, pourrait, dans le cadre de la décision de Bruxelles, être contraint à d'importantes cessions d'actifs comme des filiales à l'étranger. La cession de sa filiale turque Denizbank a d'ailleurs été évoquée.

"Imposer des cessions pour des raisons qui ne seraient pas justifiées serait profondément injuste, profondément anormal" a déclaré Michel Bouvard, rappelant que la CDC avait participé à hauteur de deux milliards d'euros au renflouement de Dexia.

"C'est une affaire qui serait choquante pour l'actionnaire et qui détruirait de la valeur", a-t-il ajouté.

"Cela créerait d'ailleurs, de mon point de vue, pour la Commission européenne un élément de jurisprudence qui peut être lourd de conséquences", a ajouté Michel Bouvard qui est aussi député UMP.

La Commission européenne doit rendre sa décision sur le plan de réorganisation de Dexia d'ici à fin février. Mais l'entrée en fonction de la nouvelle Commission courant février pourrait accélérer le calendrier.

D'après la presse belge, le groupe pourrait parvenir à un accord avec la Commission dès fin janvier, c'est-à-dire avant l'échéance du mandat de la commissaire à la Concurrence Neelie Kroes.

"C'est bien que ce soit quelqu'un qui connaisse le dossier qui le boucle", estime Michel Bouvard. "Il ne faut pas que ce dossier s'éternise. (...) Une période d'incertitudes pour une société telle que Dexia qui se prolonge est une mauvaise période".

DÉBAT SUR DENIZBANK

Dans le cadre de la restructuration entamée après son sauvetage, la banque a d'ores et déjà vendu à l'américain Assured Guaranty sa filiale de rehaussement de crédit FSA à l'origine de ses difficultés.

Le groupe a aussi cédé ses 20% dans Crédit du Nord à la Société générale et sa filiale Dexia Epargne Pension à BNP Paribas.

Pierre Mariani, l'administrateur délégué de Dexia, a en revanche écarté une cession de sa filiale Dexia Crédit Local mais celle de sa filiale turque Denizbank reste une menace.

"On sait très bien qu'il y a un débat sur la Turquie. C'est de notoriété publique", a déclaré Michel Bouvard en allusion à Denizbank. "Je serai très attentif à ce qui se passera."

Rappelant que la participation dans Dexia était pour la CDC un actif stratégique, le député a fait savoir que la Caisse des dépôts allait défendre ses "intérêts patrimoniaux".

"S'il y a un actionnaire qui peut considérer qu'il a pris sa responsabilité d'actionnaire dans cette affaire c'est bien la Caisse des dépôts", a souligné Michel Bouvard au sujet du sauvetage de Dexia. "Il serait vraiment tout à fait anormal que la DG Concurrence ne respecte pas la responsabilité de l'actionnaire."

QUELLE ATTITUDE VIS-A-VIS DE LA BANQUE POSTALE?

Rappelant que la CDC allait entrer au capital de La Poste, qui possède une filiale bancaire la Banque postale, Michel Bouvard indique qu'il demandera à la Caisse des dépôts de définir sa stratégie d'investissement vis-à-vis du secteur bancaire.

"Ma question c'est: monsieur le directeur général (Augustin de Romanet, ndlr), quelle est demain la stratégie de la Caisse des dépôts par rapport au fait que nous allons être actionnaires de deux structures, l'une qui est directement une banque et l'autre qui comporte une banque?", explique le président de la commission de surveillance.

"Est-ce qu'il y a des synergies? Est-ce qu'il faut sortir de l'une, rester dans l'autre? Est-ce qu'il faut faire des adossements?", s'interroge le député. "Tous les schémas sont possibles. J'attends d'abord que ce soient ceux qui sont en charge des dossiers qui les proposent".

Alors que la paysage bancaire européen a été profondément bouleversé du fait de la crise, Dexia a déjà fait l'objet de spéculations et de rumeurs autour d'un rapprochement tant avec la Banque postale qu'avec la Société générale.

Édité par Marc Joanny et Jean-Michel Bélot