20.11.2012

A la recherche des bonnes réponses, des responsabilités et des options possibles, les pays de l'union monétaire se livrent au jeu du chat et de la souris. Burkhard P. Varnholt, directeur des investissements à la Banque Sarasin & Cie SA, explique dans ses dernières "Perspectives", pourquoi la "suissisation" de l'Europe pourrait être une piste pour sortir de la société du "no future". Il invite aussi à réfléchir sur les évolutions improbables, mais possibles qui pourraient surprendre les investisseurs en 2013. Au final, une conséquence s'impose pour ces derniers: la tolérance à l'erreur toujours plus faible dans les domaines social, écologique et économique ne peut être surmontée qu'avec un mandat de gestion actif systématique axé sur la durabilité.

"No Future" était le slogan le plus célèbre du mouvement punk anglais. Même s'il est vrai qu'à première vue, les taux d'intérêt et la musique contestataire n'ont rien en commun, on relève néanmoins des parallèles intéressants: durant le mouvement punk de la fin des années 1970, la jeune génération en voulait à l'argent de la génération précédente. Aujourd'hui, la situation est inverse. En Europe, aux Etats-Unis et au Japon, la génération vieillissante réalise qu'elle ne pourra conserver son niveau de vie et remplir ses promesses sociales qu'avec l'aide de politiques monétaires et fiscales ignorant les coûts que la société devra assumer à l'avenir. Dans cette optique, la politique des taux d'intérêt nuls actuellement suivie en Europe, aux Etats-Unis et au Japon n'est que la pointe de l'iceberg. Une société qui ne récompense pas l'épargne supprime aussi les incitations à investir. En d'autres termes, une société qui n'économise pas et investit peu déplace son attention du futur vers le présent. Le mouvement "no future" actuel est porté par les cols blancs qui tentent à tout prix de préserver leur niveau de vie actuel en grevant l'avenir économique de la génération montante.

Burkhard P. Varnholt, directeur des investissements de la Banque Sarasin & Cie SA

"De nombreux pays occidentaux accroissent leur endettement en hypothéquant le revenu imposable des générations futures. Par rapport à cette mise à disposition "gratuite" de liquidités additionnelles au travers d'une augmentation illimitée de la dette publique, les rebelles du mouvement punk "no future" - qui en voulaient à l'argent de l'ancienne génération - étaient des enfants de chœur."

La "suissisation" est la seule voie possible pour l'Europe

Les répercussions de cet état d'esprit du "no future" se reflètent aussi dans la crise de confiance et de la dette qui ravage actuellement les pays européens. Les uns préféreraient sortir de l'union, alors que d'autres souhaitent exclure les Etats surendettés. D'autres enfin proposent une mise en commun des dettes publiques, une centralisation des compétences de politique financière et - si nécessaire - de nouvelles injections de liquidités de la Banque Centrale Européenne. Rares sont ceux qui ont remarqué que la Suisse utilisait depuis des décennies un mécanisme simple et flexible pour limiter efficacement la croissance de l'endettement. Il s'agit de l'application conséquente du principe de subsidiarité. Ce principe - l'affectation des dépenses, des recettes et des dettes à un seul et même niveau juridique - pourrait permettre à l'Union économique et monétaire européenne issue d'une volonté politique commune de souffler un peu.

Surprises possibles en 2013

Pour pouvoir élaborer des stratégies d'investissement, il est nécessaire de formuler des évolutions improbables, mais possibles. C'est dans cet esprit que Burkhard P. Varnholt esquisse cette année aussi les surprises que 2013 pourrait nous réserver:

  1. Économie: l'UEM introduit des freins à l'endettement et des réformes du marché du travail
    Suite à des pressions discrètes, mais efficaces de la BCE, du FMI et des milieux politiques européens, l'Espagne, l'Italie et le Portugal réforment en profondeur leur marché du travail. Les chefs d'Etat de la zone euro approuvent pour la première fois une feuille de route politiquement contraignante pour l'introduction d'un frein à l'endettement.

  2. Politique internationale: la transmission du pouvoir en Chine favorise le développement d'une économie de marché sociale
    En Chine, la transmission du pouvoir au nouveau chef du gouvernement souligne clairement la volonté de développer une économie de marché sociale. Cette évolution contribuera à soutenir non seulement l'économie chinoise, mais aussi les bourses notoirement sous-évaluées.

  3. Science et technologie: les technologies énergétiques durables provoquent une révolution
    Des percées technologiques non coordonnées dans le domaine de la production d'électricité avec les vagues, le vent et le soleil contribuent à augmenter durablement l'offre de courant et à la diversifier. Les capacités de transmission de l'énergie se multiplient aussi grâce à diverses innovations.

  4. Marchés financiers: 2013 est l'une des meilleures années boursières
    L'année 2013 entre dans les annales comme l'une des meilleures années boursières de l'histoire, avec une hausse des cours comprise entre 10% et 40% selon le marché. Cette évolution positive est soutenue par des taux d'intérêt toujours très bas, l'absence de solutions de substitution pour les investisseurs et une progression étonnamment robuste des bénéfices des entreprises.

Vous trouverez d'autres scénarios dans la newsletter complète qui peut être téléchargée gratuitement sur le site www.sarasin.ch.

Conséquences à long terme pour les investisseurs

La tolérance de notre planète aux erreurs politiques, sociales, écologiques et économiques diminue rapidement. Telle est l'idée simple, mais cruciale à la base du concept du développement durable, qui ne fonctionne cependant que si la durabilité est vraiment bien comprise selon une perspective politique, économique et financière. Dans ce contexte et compte tenu du rapide enchaînement des cycles, de la forte volatilité et du flux d'informations, la plupart des investisseurs sont dépassés - du moins psychiquement et émotionnellement. Un mandat de gestion actif systématique axé sur la durabilité s'impose donc comme une priorité pour chacun d'entre eux.


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