Les opérateurs de télécommunications sont à nouveau au centre de l'attention ce vendredi après l'annonce inattendue hier d'un relèvement de l'offre de Bouygues (-0,7% à 30,445 euros) sur SFR. Le groupe diversifié, ignorant les négociations exclusives de trois semaines entamées par Vivendi (+0,60% à 20,060 euros) il y a tout juste sept jours avec Altice, propose désormais 13,15 milliards d'euros au groupe de médias pour sa filiale, contre 11,3 milliards auparavant.

Souhaitant par ailleurs répondre au souhait de Vivendi de se dégager au plus vite du secteur des télécoms, il lui offre une participation de 21,5% dans le capital du nouvel ensemble, contre 43% précédemment.

Altice avait remporté le 14 mars la préférence de Vivendi en offrant 11,75 milliards d'euros en numéraire et 32% de participation dans le groupe à naître de la fusion entre sa filiale Numericable (-0,53% à 27,95 euros) et SFR.

L'annonce d'hier bouleverse la donne malgré le laconique communiqué de Vivendi rappelant la tenue des pourparlers avec la maison-mère du câblo-opérateur Numericable. L'entêtement de Bouygues semble confirmer l'aspect vital d'une fusion entre SFR et Bouygues Telecom pour la survie de ce dernier. Afin de s'assurer une structure financière solide, le groupe de Martin Bouygues a en effet mobilisé l'ensemble de son réseau. Comme une réponse aux observateurs qui critiquait une offre trop coûteuse pour Bouygues et débouchant sur un endettement intenable, le groupe s'est assuré du soutien financier de grand groupes et institutions dans ce dossier et déclare avoir "fédéré autour de son projet des actionnaires industriels et financiers de long terme qui partagent le sens de l'entrepreneuriat familial". Il ajoute que « l'augmentation de la partie en numéraire ne modifie en rien le niveau d'endettement du nouvel ensemble qui resterait Investment Grade ».

Après avoir reçu le soutien du gouvernement par le biais du ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg, l'offre pourrait désormais compter, selon les chiffres avancés par Aurel BGC, sur 150 millions d'euros en provenance d'Artemis, holding de François Pinault. JCDecaux Holding, actionnaire à 9,5% de Bouygues Telecom, devrait de son côté contribuer à hauteur de 100 millions. Enfin, la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), déjà actionnaire de Bouygues, devrait porter sa participation aux alentours de 3,5% du capital du nouvel ensemble grâce à une contribution de 300 millions d'euros.

En définitive, Bouygues détiendra 67% du nouvel ensemble contre 52% dans l'offre précédente. Il souligne par ailleurs que d'autres investisseurs pourraient proposer à Vivendi l'acquisition du solde de sa participation résiduelle dans la nouvelle entité. Il ajoute en outre que l'accord de cession d'une grande part de son réseau mobile (15 000 sites et un portefeuille de fréquences 2G, 3G et 4G) conclu avec Iliad pour 1,8 milliard d'euros reste d'actualité.

Bouygues a confirmé un montant de 10 milliards d'euros de synergies créées par le rapprochement de Bouygues Telecom et SFR. La nouvelle offre valorise ainsi SFR à 17,4 milliards d'euros en intégrant la totalité des synergies, dont 16,3 milliards d'euros d'ores et déjà sécurisés par l'accord avec Free.

Pour les analystes, la surenchère de Bouygues relance la saga. Alors que Kepler Cheuvreux n'est pas certain que l'offre puisse être acceptée en raison des négociations exclusives, Aurel estime que dans ces conditions, l'offre devient irrésistible. Société Générale va plus loin en affirmant que Vivendi, coté aux Etats-Unis, pourrait être la cible de recours collectifs en justice de la part des actionnaires si elle préférait l'offre d'Altice, maintenant inférieure à celle de Bouygues. L'analyste indique que la dette nette de Bouygues devrait grimper à 10,1 milliards après l'IPO, contre 4,4 milliards à fin 2013.

(E.B)